2. David

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Mon reflet dans le miroir me semble étranger. Je savais que j'aurais dû me méfier des mélanges d'alcool de Bruno. Les cocktails sont sa spécialité, il est barman dans une boîte de nuit branchée et fait donc profiter tout le monde de son talent à chaque soirée que l'on donne à la maison. Bruno Costa est mon colocataire, mais également mon meilleur ami, mon confident, mon frère. Pas au sens propre parce que je suis fils unique, mais c'est tout comme.

Nous sommes amis depuis le collège, toujours ensemble pour faire des mauvais coups et les pires bêtises. Malgré les chemins différents que nous avons empruntés, nous sommes restés très soudés. C'est après le lycée, lorsque nous avions pour projet d'entrer tous les deux dans une école de commerce parisienne, que nous avons décidé de prendre un appartement ensemble. Nous avions le même style de vie, les mêmes goûts pour la fête et les filles. Nous voyions là notre vie parfaite. Nous avons choisi un appartement moderne, avec un grand salon afin de pouvoir recevoir du monde, et deux chambres face à face, séparées par un couloir. Ça laisse assez d'intimité à chacun et nous permet de vivre notre vie à notre rythme.

Je vais finir par être en retard pour ouvrir la boutique si je continue à lambiner, et vu ma tête, je risque de ressembler à un zombie toute la journée.

À la sortie de la douche, je fonce me brosser les dents et me coiffer en même temps. Autant dire que ce n'est pas une réussite, je me serais collé un balai-brosse sur la tête que ça aurait été la même chose !

En passant par le salon, je frôle la crise cardiaque. On dirait qu'un tsunami est passé par là. Les meubles ont changé de place, tout ce qui est habituellement rangé dans les placards se trouve à présent à terre, un vrai capharnaüm. En colère, j'hésite à aller réveiller Bruno afin de lui montrer l'étendue des dégâts et, éventuellement, négocier le nettoyage puisqu'il est en congé aujourd'hui. Redoutant de découvrir une plus ou moins jolie créature dans le lit de mon ami, je me contente de trouver une tasse propre et de me servir un café. Bruno n'est pas spécialement difficile dans le choix de ses conquêtes, il passe souvent pour un goujat, mais il a néanmoins de quoi faire tomber les femmes. Il a tout d'un latin lover, avec un charme méditerranéen qui les fait toutes craquer. En plus d'être grand, il a des yeux noisette et des cheveux bruns, mi-longs et ondulés dans lesquels les filles adorent passer leurs doigts.

La pauvre fille qui a le malheur de se trouver dans son lit à la fin d'une soirée se fait éjecter sans ménagement le lendemain matin. Au mieux, elle a le droit de boire un café avant de partir. Hors de question cependant de lui servir le petit-déjeuner au lit, et encore moins d'aller lui chercher des croissants chauds.

Pas mal de choses ont changé entre mes 18 ans et mes 28. D'abord, je ne considère plus les femmes comme des objets, uniquement destinés à satisfaire nos besoins primaires, à nous les hommes. Je devais avoir 25 ans lorsqu'une femme, plus âgée que moi d'une dizaine d'années, m'a traité de la même façon que moi je traitais la gent féminine depuis toujours. Elle s'appelait Sabine et m'avait promis monts et merveilles. Elle m'a joué la comédie pendant quelques semaines, puis lorsqu'elle en a eu assez, elle m'a simplement dit que c'était terminé, que c'était sympa, mais qu'elle n'avait fait que s'amuser. Ce jour-là je suis tombé des nues. Je me suis fait avoir comme un débutant, le piège s'était refermé sur moi sans que je n'aie le temps de le remarquer. Elle a été tellement subtile et maligne que je suis tombé fou amoureux d'elle. Après avoir rampé et m'être humilié pour tenter de la récupérer, j'ai fini par me faire une raison et je suis parvenu à l'oublier. Avec le recul, j'en ai tiré quelques leçons et aujourd'hui, je me méfie des femmes et de leur fourberie.

Les quelques aventures que j'ai pu avoir depuis n'avaient certes rien de sérieux, mais elles se sont révélées beaucoup plus teintées de respect envers ces demoiselles. Même si je m'en méfie, j'ai cessé de les traiter comme des objets, et je préfère les prévenir, chaque fois, que je ne cherche pas à vivre une grande histoire d'amour. Je me contente donc pour le moment d'histoires sans lendemain et surtout, sans attachement. À une exception près : Chloé Delage, l'une de mes amies les plus proches. Suite à de nombreuses déceptions amoureuses, elle a décidé de s'amuser sans se poser de question. Cette relation nous convient pour le moment, du sexe sans complication, sans les obligations liées au couple. Juste du plaisir et une belle amitié.

Liés corps et âmes (Sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant