2.

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« Je suis en phase terminale Gab, je ne vais pas survivre »

Je pleurais. Je ne pouvais faire que ça car j'étais impuissante. Gab me fixa un moment. Je vis une larme couler le long de sa joue. Je l'essuyai du bout de mon pouce. Il me prit dans ses bras et j'enfouis ma tête dans son cou. Nous restâmes un long moment comme ça. Je n'en pouvais plus. C'était la chose la plus dur que je n'avais jamais eu à faire. J'avais l'impression de les abandonner, un par un. J'étais encore vivante, mais on me pleurait déjà. Je voulais garder la tête haute, mais quand votre entourage s'effondre, vous finissez par vous effondrer avec. C'est ce que j'ai fait. J'ai sombré dans mon propre deuil. Mais je ne voulais pas faire le deuil de ma vie déjà maintenant. Je me retirai de l'étreinte de Gabriel et le regardai dans les yeux.

- Gab, je peux te demander quelque chose ?

- Tout ce que tu veux.

- Je ne sais pas combien de temps il me reste à vivre-

- Ne dis pas ça, me coupa-t-il.

- Je veux me sentir vivante une dernière fois.

Il avait souris et m'avait promis de m'aider à exaucer ce souhait. J'allais vivre les plus beaux moments de ma vie, avec lui à mes côtés.

*

BIP BIP BIP

Stupide réveil.
7h30.

BIP BIP BIP

Encore !?
7h40.

BIP BIP BIP

Putain ! Il est quelle heure ?
7h50.
Meeeerde ! Je suis en retard !

Je me levai en quatrième vitesse, m'habillai et allai à la salle de bain me brosser les dents. Pas le temps de manger. Je pris mes affaires et descendis très vite les escaliers pour arriver dans l'entrée. Gabriel venait me chercher car il avait la voiture, contrairement à moi. Je mis mes chaussures et m'apprêtai à sortir lorsque ma mère me stoppa.

- Lydia.

Je n'aimais pas quand elle prend ce ton.

- Oui ?

- Que fais-tu ?

- Je vais au lycée.

- Lydia.. Tu viens d'apprendre que ton état s'aggrave et tu vas au lycée ?

- Maman, j'ai besoin de continuer une vie normale.

- Mais tu n'es pas normale.

- C'est gentil de me le rappeler. Mais j'y vais quand même et c'est non négociable. C'est ma vie.

Je la laissai dans l'entrée et partis. Je montai dans la voiture de Gab et nous nous dirigeâmes vers le lycée. Une fois arrivés, Gab s'assura que tout allait bien de mon côté. Je me sentais bien. Physiquement je veux dire. Mentalement, je veux tout oublier. Une amnésie partielle ce n'est pas négociable ? Non ? Bon, tant pis. On fera avec.
Les cours passèrent très lentement. À chaque cours, les profs prenaient de mes nouvelles. « Oh Lydia, comment vous sentez-vous ? » « Êtes-vous sûre de vouloir continuer les cours régulièrement ? » « Je peux alléger votre emploi du temps si vous voulez ».
J'avais entendu ça toute la journée. Et pourtant, personne ne savait pour ma phase terminale. Ils savaient que j'avais un cancer, mais pas que j'allais très prochainement les quitter. Voir comme ils se comportent alors qu'ils ne savent pas tout me donne encore moins envie de leur expliquer.

*

J'étais allongée sur mon lit, Gab à mes côtés. Ma mère l'avait laissé dormir à la maison. Après tout, je voulais juste profiter de ce que j'avais et je crois qu'elle essaie de me rendre heureuse plus que jamais. Même si ma mère est parfois dure, je l'aime plus que tout et la voir tout faire pour me combler me réchauffe le cœur, même si je sais qu'au fond elle souffre. Perdre son enfant n'est pas anodin. Mais rester là, sans savoir quand vous verrez votre enfant s'en aller, c'est pire. Ma mère me contemplait chaque jour dans les moindres détails. Je crois qu'elle essaie de se fabriquer des souvenirs. Ça me rend triste de voir mon entourage sombrer à cause de moi. Je sais que je devrais penser à moi parce que c'est moi qui suis malade, mais je ne peux m'empêcher de me mettre à la place des autres.

- Lydia, m'interpella Gabriel.

- Oui ?

- Tu sais que je t'aimerai toujours, quoi qu'il arrive hein ?

Je le savais. Mais j'avais peur. Je ne voulais pas qu'il sombre à cause de moi. Je sentais que plus nous nous voyions, plus il avait peur. Peur de me perdre, peur que je m'en aille sans qu'il ne m'ait dit au revoir.
Mais j'allais bien. Reprendre une vie normale était tout ce que j'espérais. Hélas, mes visites à l'hôpital étaient obligatoirement fréquentes. Gab m'accompagnait tout le temps car il voulait être là au cas où.

Nous avions finalement passé notre soirée à regarder des films et à parler. J'adore parler avec lui. Gab est un garçon très ouvert d'esprit, avec qui nous pouvons parler de tout pendant des heures. C'est mon copain, mais également mon meilleur ami et la seule personne qui me comprenne vraiment. Il me voit comme une personne normale, même s'il s'inquiète pour moi. Contrairement à mes parents qui ont bien compris la notion d'enfant malade. Ils ne me traitent plus comme avant. Ils sont toujours au petit soin pour moi, toujours sur mon dos et j'ai l'impression d'étouffer. Je profite des moments où je suis avec Gab pour être tranquille. Je sais que je peux me reposer sur ses épaules et, quand il est là, j'ai juste l'impression qu'il prend mes problèmes pour que je puisse souffler. Mais je n'ai plus une minute à moi. Les visites à l'hôpital sont longues et nombreuses. Les médecins me demandent toujours comment je me sens, si quelque chose a changé, comment je vais moralement et ils obtiennent tout le temps les mêmes réponses, à tel point qu'ils pensent que je mens. Franchement, à quoi cela servirait de mentir ? Je sais que j'ai un cancer et je ne vais pas faire comme si ce n'était pas le cas. Ils me font peur parfois. J'ai l'impression de prendre ma maladie à la légère alors que j'essaie juste de ne pas y penser.

A la fin du film, je parlai un peu avec Gab de comment il se sentait vis-à-vis de moi, de ma maladie. Il me dit qu'il s'inquiète, mais que ça va. Je ne le crois pas. Si lui avait un cancer, je ne m'en remettrais pas. Je sais qu'il tient à moi et que ça le rend malade. Je ne poussai pas plus loin la discussion et m'allongeai sur son torse. Au bout d'un moment, je m'endormis dans ses bras. Et nous passâmes la nuit dans les bras l'un de l'autre.

Don't forget meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant