- Dévotion

69 6 8
                                    

Pendant ma présentation, la cloche avait retentit, mais personne n'avait bougé. Et à vrai dire, je ne m'en étais pas apperçue, tellement poignée par ce que j'étais en train de lire.  Á l'instant où le dernier mot est sorti de ma bouche, je repris ma respiration discrètement et leva mon regard au niveau des élèves face à moi.  Personne ne disait rien, et personne n'avait encore bougé, c'est alors que notre professeur s'exclama un peu secouée : 

- "On reprendra cela demain, n'oubliez pas de retenir le texte qui vous a le plus touché, ou celui qui vous a le plus plû ! A demain."

Je retourne à ma place et me dépêche de faire un gros tas avec tout ce qui traîne sur mon bureau puis bourra le tout dans mon sac, sans aucune conscience.  J'attrapai celui-ci, et au moment de partir, j'entendis derière moi une voix qui me disait:

- "Waw Léo, ton texte était vraiment...  Enfin je veux dire...."

-"Bon, ça va, qu'est-ce que tu me veux?"

-"Le prend pas comme ça, je voulais juste te dire que j'avais adoré, mais si tu t'en fous, alors salut"

-"Non, mais Antoine, attend"

-"Si c'est pour me parler comme à un chien, laisse tomber"

-"Désolée.  Mais écoute, ça fait des mois que tu ne m'as plus adressé la parole, tu peux quand même comprendre que tu peux pas juste arriver comme une fleur et que j'oublie ce que tu as fait."

Il se rapprocha d'elle, et en quelques secondes seulement, il avait réussi à la faire rougir en la serrant dans ses bras.

-"Je suis désolé que ça se soit passé comme ça, mais laisse moi une chance Léo, je te jure que je ne referais plus la même erreur."

Antoine, c'était de l'histoire ancienne, mais ses charmes m'ont toujours fait revenir vers lui.  A chaque fois, il me faisait retomber inlassablement amoureuse de lui.  Je suis sortie avec lui.  Pas longtemps, mais assez pour qu'il me change complètement.  Avant lui, j'étais cette fille, simple et sans histoire.  La fille que l'on regarde sans remarquer...  Avec lui, je me sentais vivante, mais ça n'avait pas duré, parce qu'il ne voulait pas s'afficher en public avec moi.  Et du jour au lendemain, il a commencé à m'ignorer, sans jamais me donner aucune explication.  La seule fois que j'avais essayé de lui parler, il a fait comme si nous ne nous étions jamais parlé.  Il m'avait en quelques sortes plaquée, et il s'était affiché deux jours après avec Anaïs, la bombe du lycée, la fille qui représentait tout ce que je pouvais détester, et tout ce que je n'étais pas.  A la regarder, j'avais compris très rapidement pourquoi il ne voulait pas me présenter à ses potes, je n'étais visiblement pas à la hauteur, je n'étais pas assez bien pour eux.  Ca devait être ça, oui, c'était sûrement pour ça.  Je m'étais investie à cent pour cent dans notre relation, mais ce n'était pas encore assez.  Je ne pouvais que m'incliner face à cette garce.  Anaïs, je la connais depuis les primaires.  Elle a toujours été en concurrence avec moi, et à vrai dire, je la devançait dans bien des domaines, mais pour ce qui est de la popularité, j'ai jeté le gant depuis très longtemps.  Cette fille superficielle avait acheté toutes mes amies avec des échantillons du magasin de sa mère, et du jour au lendemain, elles avaient commencé à me dévisager et à devenir ce genre de fille-robot que je déteste.  Au fond, c'était un mal pour un bien, elle m'avait rendu un énorme service en me séparant d'elles; je ne m'imagine vraiment pas passer tous mes samedis soirs à me remettre du vernis et à parler de mon surpoids inexistant.  

Je regardais Antoine, face à moi.  Je ne savais pas ce que j'étais en train de faire.  Bien sûr, il me manquait terriblement, mais je n'avais pas envie de revivre cette humiliation et encore moins de lui montrer que ça m'atteignait.  Ceci dit, il y avait une traction entre nous si forte, que j'avais du mal à résister.

ExpressiveWhere stories live. Discover now