Partie 2

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  Voulant regagner la route qui traversait non loin de là la forêt en longeant la Rivière du Vieux Loup, je me propulsai en avant mais, avant de comprendre ce qu'il se passait, je me retrouvai à quatre pattes, parfaitement en équilibre mais effroyablement choqué. Je voulus jurer de panique mais tout ce qui sortit de ma gueule fut un grognement guttural. Je dirigeai mon regard vers ce qui me semblait être mes mains mais en découvris d'autres, toutes recouvertes d'un épais et hirsute pelage gris. Elles étaient dépourvues de doigts mais étaient cependant armées de longues griffes crochues, conçues pour déchiqueter et lacérer la chair. Alors, la terrible angoisse mêlée cette fois-ci à de la terreur repris possession de mon corps bestial. Les muscles de ces pattes étrangères répondaient à ma demande. Perplexe, je pivotai la tête et rencontrai le prolongement de ma colonne vertébrale, dissimulé lui aussi sous un rude pelage gris cendré. Affolé, je glissai inconsciemment ma langue sur mes dents qui me parurent alors être des crocs piquant ma lèvre inférieure. Je voulus crier, mais un long hurlement sauvage s'échappa de ce qui était maintenant ma gueule.

  Que m'arrivait-il ? Étais-je un loup dans un terrifiant songe ou bien l'étais-je réellement devenu ? Chacun de mes sens était en éveil et j'avais l'extraordinaire et grisante sensation de percevoir la respiration de la forêt, de ressentir les pulsations de son cœur enfoui sous terre et de percevoir chaque petite bête, et tout cela dans un vaste périmètre.

  Malgré ma peur grandissante, une délicieuse exaltation conquit mon coeur. Je fis quelques pas, impatient d'essayer ma nouvelle enveloppe charnelle, accompagné de la certitude que tout cela n'était qu'un rêve. Je me contemplai un moment au-dessus d'une flaque d'eau limpide. Oui, mon visage était bien celui d'un loup, grand canidé féroce tapi sous les branchages. Une incroyable protubérance faisait office de museau, mes petits yeux noirs et rapprochés se cachaient par les caprices du vent sous quelques poils tombant et mes oreilles, dressées et pointues sur mon crâne, ne cessaient de pivoter nerveusement, essayant encore timidement de capter le moindre bruit.

Le Chasseur ChasséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant