3 Janvier

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C'est la rentrée. Je me lève à six heures le temps de me préparer. Je prends une longue douche avant d'aller déjeuner. Mon père est déjà en bas, il est assis au plan de travail avec un café devant lui. Son portable est posé près de sa main. Il a l'air absent.

Je pose mon sac à dos et me dirige vers lui.

-Salut, lancé-je en lui donnant une légère tape sur l'épaule.

Il sursaute à mon contact et renverse sa tasse de café qui se répand partout. Il agite les mains devant lui ne sachant que faire. Je me saisis de son portable complètement trempé et l'essuie avec un chiffon. Je nettoie ensuite le plan de travail sous le regard perdu de mon père. Depuis que ma mère est partie il est complètement paumé.

-Désolé, parvient-il à dire.

-Ce n'est rien, lui assuré-je, tu devrais partir au travail avant d'arriver en retard.

-Tu as raison.

Il se lève mollement en prenant sa veste. Il prend son portable et le regarde d'un air triste.

-J'ai bien peur qu'il soit mort...

Comme si nous avons les moyens de réparer ça... Je soupire en me passant la main sur la figure. Puis je lui désigne la porte pour lui indiquer de se dépêcher. Il me lance un sourire mi-gêné mi-triste avant de s'en aller. Il revient quelques secondes pour prendre ses clés de voiture. Il me les montre comme pour se justifier puis part de nouveau.

-À ce soir fiston, crie-t-il par-dessus son épaule.

Je marmonne un ouais puis me saisit de ma tasse de café. Un silence pesant règne sur la maison. On n'entend que le tic tac incessant de l'horloge accrochée au mur. C'est calme bien trop calme. Je prends mon sac à dos, laissant ma tasse de café intact et me précipite au dehors de ma maison. Je prends une grande inspiration d'air fraîche puis ferme la porte à clé. Je m'élance dans l'allée presque en courant.

J'étouffe trop dans cette maison. Elle est remplit de souvenirs trop douloureux et le silence quotidien n'améliore pas les choses.

Je me rends jusqu'à l'arrêt de bus qui se situe à quelques rues de mon domicile. Il fait encore sombre à cette heure ci. Les lampadaires sont toujours allumés. Je me rapproche petit à petit de l'arrêt et de là où je suis, je peux apercevoir mes deux amis Kim et Jonah.

Kim me vit et instantanément un sourire vient éclairer son visage. Jonah suivit le regard de notre amie et il me vit à son tour. Leur sourire n'avait plus rien de forcé. Je me souviens encore de l'époque où j'avais perdu ma mère. Tout le monde s'efforçait d'être gentil avec moi, je voyais la pitié dans leurs yeux et un sourire faux venait s'afficher sur leur face. Même mes amis. Toute cette compassion, tous ces sourires faux et les mots doux m'avaient tapé sur les nerfs et j'avais fini par craquer. Leur pitié ne faisait que croître ma haine envers le monde entier. J'avais hurlé aux gens d'arrêter. Je les avais supplié. J'avais plaqué mes mains sur les oreilles, le lycée entier se tenait là. Ils me regardaient tous. Kim avait été la première à s'approcher de moi. Elle avait pris mes mains pour les écarter de mes oreilles et elle m'avait sourit.

-Ça va aller, m'avait-elle assuré.

Puis j'avais éclaté en sanglots et elle m'avait alors pris dans ses bras. Depuis ce jour, tout est redevenu à la normal. Désormais, les personnes me regardent comme n'importe quelle autre personne, il n'y a plus aucune pitié dans leur regard. Et je me sens mieux ainsi.

Comme j'arrivais près d'eux, Jonah me donne une tape amicale sur l'épaule et je fais la bise à Kim.

-Alors ce nouvel an? me demande-t-elle curieuse.

les lettres de GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant