Prologue

501 76 79
                                    


     J'étais sur le terrain, la coach m'avait mis en attaque. Je sentais les regards de Dvalin sur moi, son regard rouge comme le sang observait mes réactions, me testait. C'était insupportable. Aiden était là, prêt à reprendre le contrôle à tout moment. Je lui murmurai des paroles, le suppliai de me laisser jouer, mais il ne m'écoutait jamais. Ses réponses étaient mordantes, comme des blessures qu'il m'infligeait toujours plus régulièrement.

Le coup de sifflet avait retentit, le match avait commencé. Les joueurs du nouvel Epsilon étaient encore plus puissants, d'une redoutable efficacité. Mes coéquipiers ne se laissaient pas distancer, ils se battaient férocement pour la victoire. Utilisant techniques après techniques, aucun ne réussi à marquer un but. Tous les joueurs de Raimon attendaient de me voir courir à une vitesse folle vers les cages adversaires pour marquer. Je serrai les dents, je ne voulais pas avoir à demander l'aide d'Aiden, je voulais réussir à marquer tout seul. Je tentai en vain de me convaincre que c'était de moi que l'équipe avait besoin. Dvalin s'adressa à moi :

-Hé ! Toi, là-bas ! Je veux que tu tires au but !

Je sursautai, essayant de ne pas faire attention à sa provocation, mais quand il m'envoya le ballon, je ne pus m'empêcher de l'intercepter, toutes mes résolutions mises de côté. La voix de Jude raisonna à mes oreilles, m'encourageant à tirer « comme je savais le faire », je répondis sans réfléchir. Pourtant, dès que je m'élançai vers les buts de Dvalin, Aiden reprit le contrôle, j'étais encore une fois mis de côté par mon frère. Il parlait à travers moi, tandis que je me débattais sans succès. Il passait les défenseurs d'Epsilon avec facilité, son sourire presque dérangeant sur mes lèvres. Il se mouvait avec une rapidité que, moi, malgré les années passées, je n'avais toujours pas réussi à acquérir. Mes coéquipiers savaient pour nous, et pourtant, ils continuaient à me faire confiance, je sentais leurs regards à la fois désolée et pleins d'espoir. La voix d'Aiden raisonna dans ma tête :

-Ce que l'équipe attend, c'est la force de frappe d'Aiden Frost, l'attaquant. C'est pour cette raison que c'est moi qui doit marquer, c'est pour ça que je suis là, c'est mon destin !

Une fois devant les cages, il tira, utilisant Le blizzard éternel, la technique que tout le monde attendait. Dvalin, avec Perceuse, arrêta le ballon, lança une réplique moqueuse, me provoquant encore une fois. Aiden ordonna aux autres de lui passer le ballon, il voulait marquer, et, dans ces conditions, je le savais, rien ni personne ne pourrait l'arrêter. Et j'avais raison, il tira, tira et tira encore, le ballon s'arrêtait toujours dans les mains du gardien qui le provoquait pour le simple plaisir de voir la rage sur son visage et me voir souffrir. Sous mes yeux et sous les siens défilaient notre dernier moment commun, juste avant l'avalanche, juste avant sa mort. Nous remémorant les paroles de notre père, celles qui m'avaient forgés et m'avaient rendus meilleur. Nous voulions être parfaits, tous les deux. Il utilisa encore Le blizzard éternel, qui fut suivit d'un arrêt, d'un échec cuisant. Ca ne l'arrêta toujours pas, il retenta sa chance, mais cette fois, Dvalin stoppa le ballon à main nu, le sourire aux lèvres.

C'était impossible, et pourtant, il l'avait fait. Les cris de mes coéquipiers résonnaient jusqu'à moi, coincé à l'intérieur de mon propre corps. Je sentais la rage et l'étonnement de mon frère :

-Nan, c'est impossible ...

-Je vais être très clair : si c'est tout ce dont tu es capable, nous n'avons pas besoin de toi dans ce match !

Les paroles de Dvalin me firent comme l'effet d'un coup de poignard. Non. D'une dizaine de coup de poignard. Aiden lâcha un cri de douleur, le visage pétrifié, ses yeux orangés immobiles.

Soudain, tout devint noir. J'étais seul, seul avec Shawn et avec moi-même. Je murmurai, tremblant :

-Si l'on n'a pas besoin de Shawn Frost ...

-Si l'on n'a pas besoin d'Aiden Frost

-Alors ...

-Alors ...

Mon corps était partagé entre mon âme et celle de mon frère, nous rejetâmes ma tête en arrière et hurlions ensemble :

-A QUOI JE SERS ???!

Nos deux vois réunis mêlant incompréhension et douleur brisa quelque chose en nous. C'était comme un miroir qui se brise, les morceaux tombaient sans que personne ne puissent les voir. Je m'écroulais sur l'herbe humide du terrain, sans entendre les voix de mes amis, complètement détruit.


ParfaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant