Chapitre 1

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Un nouveau départ difficile

Shay

Le ciel était chargé de nuages gris, reflétant mon propre état d'âme alors que je siégeais à l'arrière de la voiture de l'assistante sociale. Un silence pesant s'abattait sur nous, seulement interrompu par les sanglots étouffés d'Élise, ma jeune sœur de 13 ans. Elle tentait de cacher sa détresse, mais ses larmes trahissaient son chagrin.

Je l'observais, espérant qu'elle me ferait signe, qu'elle me parlerait, qu'elle échangerait un simple regard. Mais au lieu de cela, elle repoussa violemment ma main posée sur son épaule. Pourtant, cette fois, elle se retourna brusquement vers moi, dévoilant une chevelure d'ordinaire soigneusement attachée, désormais éparse. Sa peau semblait encore plus pâle qu'à l'accoutumée, et ses yeux, habituellement purs et azur, étaient rougis par les larmes qui coulaient inlassablement le long de ses joues.

- Ne me touche pas ! Tout ça, c'est de ta faute ! Je te déteste ! Tu ne pouvais pas réfléchir pour une fois. Il a fallu que tu emploies la violence ! s'écria-t-elle d'une voix brisée.

Mes lèvres murmurèrent à peine un "Je..." alors que je cherchais désespérément un regard compatissant de l'assistante sociale, concentrée sur la route comme si elle ne nous entendait pas.

À ces mots, mon cœur se serra, comme si une douzaine d'aiguilles m'avaient transpercé l'âme. J'avais conscience qu'elle avait raison. Je n'aurais jamais dû réagir ainsi, peu importe les raisons qui m'y avaient poussé. Si nous étions désormais prisonniers de cette voiture, c'était parce que j'avais frappé ma mère de toutes mes forces, la faisant chuter sans qu'elle ne se relève. C'est à cet instant qu'Élise avait pénétré dans la pièce, effrayée, et avait appelé l'assistante sociale.

Flash back : Point de vu d'Élise

J'étais assise à ma table, occupée à faire mes devoirs, lorsque j'entendis une porte claquer violemment dans la cuisine. Je sus immédiatement que c'était Shay, rentré du lycée dans un état de colère noire. Il m'avait expliqué à maintes reprises combien il se sentait exclu depuis qu'il avait redoublé sa seconde, ses amis Mike et Alex s'étant rapprochés, le laissant à l'écart. De plus, il détestait sa nouvelle classe, composée de ce qu'il qualifiait de "débiles profonds". Linda, sa grande amie, dont il n'arrêtait pas de me parler, était également source de préoccupation. Shay était un garçon remarquable, grand, élancé, avec des cheveux bruns soyeux, un teint légèrement bronzé, et de magnifiques yeux verts. Pourtant, malgré son charme, il n'avait jamais eu de petite amie, bien que de nombreuses filles aient tenté leur chance. Je pensais que Linda serait différente.

Cependant, je fus tirée de mes pensées par le bruit d'une altercation. Je me levai et m'avançai lentement vers la cuisine, m'inquiétant de l'état d'esprit de Shay. Quand j'ouvris la porte, je vis Shay dos à notre mère, la poussant violemment en arrière et lui assénant un puissant coup de poing au visage. Un filet de sang coula de la bouche de ma mère tandis qu'elle s'effondrait bruyamment sur le sol.

Shay, le visage marqué par l'horreur de ses propres actes, me fixa, ses yeux emplis de terreur.

- Non... Je... Je vais t'expliquer ! murmura-t-il, la voix tremblante.

Je ne lui laissai pas l'occasion de terminer sa phrase, courant hors de la cuisine pour appeler l'assistante sociale, une amie de la famille. Je lui expliquai précipitamment la situation, et elle arriva en un temps record. Entre l'appel et son arrivée, le temps sembla se suspendre, Shay et moi étions figés, comme pétrifiés. Une ambulance emmena ma mère, et l'assistante sociale, une femme au visage grave, s'entretint avec Shay dans la pièce adjacente. J'écoutai en cachette.

- Vous... Vous allez... nous séparer ! s'écria Shay, sa voix tremblante.

- Je n'ai pas le choix. Votre père est décédé, vos problèmes financiers se sont aggravés depuis longtemps, votre mère sombre dans l'alcool sans combattre, et maintenant, vous perdez le contrôle. Avec personne dans la famille apte à vous garder, je n'ai d'autre option que de vous placer dans un nouveau foyer, répondit-elle d'un ton empreint de gravité.

Mon sang ne fit qu'un tour, et j'ouvris brusquement la porte.

- Vous aviez promis que je pouvais compter sur vous, et maintenant vous voulez m'enlever ma mère ! hurlai-je en larmes.

- C'est ce que je fais, je vous aide en vous plaçant dans des foyers plus sains.

Des foyers ?! Nous allions être séparés en plus d'être séparés de notre mère ! Je m'effondrai au sol, submergée par la tristesse.

Fin du flash back.

Shay

Je luttai pour maîtriser mes émotions.

- Je suis désolé... Vraiment... Je...

Je m'interrompis, conscient que la moindre hésitation ferait jaillir mes larmes. Il fallait que je reste fort, au moins pour Élise.

L'assistante sociale coupa mon élan.

- Désolée de vous couper, mais nous sommes arrivés chez Monsieur et Madame Hamilton. C'est le nouveau foyer d'Élise.

Je me tournai vers la demeure qui se dressait devant nous, de l'extérieur, elle semblait immense et accueillante, une maison avec mille histoires à raconter. Deux personnes attendaient Élise sur le pas de la porte, semblant à la fois gentilles et plutôt âgées, peut-être la soixantaine ou même plus. J'imaginais qu'ils étaient de ceux qui, chaque fois que leurs petits-enfants venaient, cuisinaient trop à manger. Je priai pour qu'Élise soit bien avec eux, bien que seule elle risquait de s'ennuyer. Elle les salua timidement, et ils l'accompagnèrent à l'intérieur, le vieil homme portant sa valise.

Je me demandais maintenant où j'allais atterrir.

EnchaînementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant