La chute.

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Alors tu t'approches, confiant(e). Tu t'assois à ses côtés, tu lui dis « Salut, ça va ? », et elle te regarde. Cela fait deux mois que vous ne vous êtes pas parlé, à cause des grandes vacances et de la distance. Car tu ne peux la voir qu'au lycée. Tu remarques que ses cheveux ont un peu poussés, qu'elle s'est un peu affinée, qu'elle porte de nouveaux vêtements et que le petit point rouge sous son œil a disparu. Tu souris et tu ne lui dis rien, car tu as peur qu'elle te prenne pour un(e) dingue, et elle te sourit en retour, cette personne. Mais tu remarques que quelque chose a changé dans son regard, dans son sourire et même dans sa voix, depuis deux mois. Alors tu fronces les sourcils quand cette personne pose sa main sur ton bras, geste qu'elle ne fait jamais. Et ses lèvres s'ouvrent, et elle t'annonce qu'elle est en couple depuis un mois avec quelqu'un qu'elle a croisé pendant ses vacances.

Et elle te raconte toute l'histoire, qu'elle n'avait pas été motivée pour partir, qu'elle s'ennuyait là-bas, et que c'est là que son inconnu a débarqué. Elle te raconte qu'il a ravi son cœur, qu'elle n'avait jamais rencontré quelqu'un qui sache la comprendre aussi bien et aussi vite. Et à chaque mot qui sort de sa bouche, tu te demandes « pourquoi ? », et ton cœur se brise, et tu souffres, tu as mal, parce que tu te rends compte. Tu te rends compte que tu as étais trop long(ue). Tu te rappelles la lueur dans les yeux de cette personne lorsqu'elle te regardait deux mois plus tôt, et tu te dis que l'amour rend aveugle. Tu sais qu'elle t'aimait, maintenant, mais que c'est fini, que c'est trop tard et qu'elle est tombée pour un(e) autre que toi. Et tu as envie de crier, de hurler ta douleur. Tu te trouves con(e) de ne rien avoir vu avant, trop préoccupé que tu étais, par tes questions à la con. Alors, tu lui souris faussement et tu lui dis que tu es heureux(se) pour elle, tu lui souhaite tout le bonheur du monde, et elle te fait un câlin, mais elle continue de te cracher son bonheur à la figure, sans savoir que, derrière ton sourire, tu te déchires à chaque mot qu'elle prononce.

Tu l'écoutes toute la journée te raconter tous les détails de son aventure avec ce quelqu'un que tu ne connais pas, tu survis toute une journée, une trop longue journée, et le soir, tu rentres chez toi et tu t'enfermes dans ta chambre. Tu te jettes sur ton lit et tu cries dans ton oreiller, tu cries, et tu demandes « Pourquoi ?! ». Mais évidemment, personne n'est là pour te répondre. Tu te demandes si quelqu'un est en train de vivre la même chose que toi en ce moment même. Tu te dis « Probablement », ça te console un peu de savoir que tu n'es pas tout(e) seul(e) dans cette situation. Alors tu calme ta colère et tu te relèves, tu te dis que la semaine va vite passée.

Le lendemain, tu quittes une nouvelle fois ta maison, une boule au ventre. Tu ne sais pas si c'est la peur de devoir encore une fois affronter cette personne et son bonheur, ou si c'est la faim qui te ronge les entrailles. Car tu n'as pas mangé depuis hier soir, tu avais l'impression que tout avait un goût de merde dans ta bouche, malgré que tu n'en aies jamais mangé. Tu te dis que ça doit probablement avoir ce goût-là. Alors tu fais le chemin pour aller à ton lycée, devenu le pire endroit du monde depuis la veille. La journée passe, et le soir, tu t'enfermes à nouveau dans ta chambre, tu n'as pas non plus mangé à midi, la simple vue de la nourriture te dégoûtait. Tu as des crampes au ventre, tu as mal au crâne. Tu te claques la tête contre la porte de ta chambre et tu cries. Puis tu te mets à pleurer, imaginant la personne que tu aimes rire sur Skype avec la personne qui te l'a prise. Tu te sens mal, tu as l'impression qu'on t'a trahi, que quelqu'un se fout de ta gueule.

Au bord du gouffre. [BXB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant