Course folle

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     La rue sombre n'était éclairée que par la faible lueur de la lune qui, dans le ciel, semblait se cacher derrière les nuages. Le vent me fouettait le visage et faisait danser mes cheveux. Cela faisait une bonne demi-heure que je courais sans m'arrêter à là travers la ville. Je ne devais pas laisser le temps me rattraper. Je soufflais de plus en plus fort sous l'effort. Mon cœur me suppliait de faire une pause mais ma détermination me l'interdisait. Je ne devais pas m'arrêter. Si je m'arrêtais maintenant, tout serait perdu. J'entamais le début de la fin.

     J'ai tourné dans une ruelle et je me suis retrouvée sur la route où un immeuble se dressait devant moi. Je n'ai pas hésité, j'ai empoigné la gouttière et j'ai commencé mon ascension. C'était un jeu d'enfant. Les prises étaient nombreuses, ce qui m'a permis d'arriver sur le toit en moins de dix minutes.

     Une fois en haut, j'ai continué ma course sans broncher alors que les rafales de vent essayaient de me repousser en arrière. Un espace d'au moins dix mètres me séparait de l'immeuble suivant. J'ai accéléré et au dernier moment mes pieds ont quitté les sol. J'ai atterri en roulé boulé au sommet du bâtiment. Je me suis relevée au quart de tour et je suis repartie.

     Les bâtiments m'offraient un chemin tout tracé vers ma destination finale. À chaque saut, j'avais l'impression de voler mais chaque atterrissage me ramenait à la réalité.

      Je suis redescendue en sautant sur une poubelle. J'ai atterri dans la rue où m'attendait mon épreuve.

      J'ai juste parcouru quelques mètres avant de voir la maison du maire. J'ai souri en voyant une fenêtre ouverte. J'ai observé quelques instants, tapie dans l'ombre derrière un muret. Je n'ai vu qu'un seul boîtier d'alarme qui sécurisait la porte d'entrée. Ça me semblait trop facile. J'ai escaladé la grille et j'ai sauté dans le jardin. Au dernier moment, j'ai vu la masse noire me foncer dessus, les crocs sortis. Je l'ai esquivé de justesse en sautant vers la droite. Je me suis réceptionnée parfaitement, ce qui m'a permis de foncer sur le molosse. Je l'ai plaqué au sol et immobilisé avant qu'il ne comprenne ce qu'il se passe. Le couinement qu'il a poussé m'a fendu le cœur. J'ai attaché sa gueule avec la cordelette de mon sweat-shirt et je l'ai doucement tiré vers la petite cabane à outils qui semblait avoir été mise laisse juste pour me faciliter le travail.

     J'ai jeté des regards autour de moi pour vérifier que je n'avais pas de public trop curieux et je me suis hissée sur le premier rebord de fenêtre.

     J'ai gagné quelques mètres et me suis retrouvée à côté du boîtier de sécurité. Je l'ai ouvert. Des dizaines de fils de connexion s'entremêlaient. J'ai sortir mon couteau suisse et j'ai coupé le fil permettant d'alimenter le sytème de sécurité. J'ai vu les petites LED s'éteindre et j'ai refermé soigneusement le boîtier.

     Je me suis glissée vers mon entrée privée sans faire le moindre bruit. La fenêtre était ouverte sur la chambre d'un enfant plongée dans le noir. Je suis entrée avec la plus grande des discrétion et j'ai longé le mur pour ne pas faire craquer le plancher. J'ai ouvert la porte et j'ai marché dans le couloir jusqu'à voir la porte que je cherchais. J'ai tiré ma capuche comme si cela allait me camouflé et je me suis mise à genou devant la serrure que j'ai commencé à crocheter. J'ai souri quand j'ai entendu le "clic" de la victoire.

      J'ai poussé la porte et j'ai vu tous les objets de valeur que possédait le maire. J'ai été tentée de prendre quelque chose en "souvenir" mais je n'avais pas le temps. J'ai sorti mon téléphone et j'ai cliqué sur le petit appareil photo. J'ai mis la caméra vers moi et je me suis prise en photo à côté de l'ordinateur super cher qui était posé sur une table en verre qui devait coûter plutôt cher elle aussi. J'en ai pris plusieurs au cas où et je suis sortie très vite du bureau. Je me suis dirigée vers la chambre du petit sur la pointe des pieds.

      Mon cœur a fait un bon quand j'ai entendu le téléphone sonner. J'ai poussé la porte de la chambre de l'enfant et je suis entrée dans sa chambre pour me diriger vers la fenêtre. Il s'est réveillé en se frottant les yeux et m'a regardé avec des soucoupes. Je l'ai  fixé un long moment et je lui ai fait signe de se taire. La sonnerie du téléphone avait causé une surchauffe de stress dans mon cerveau. Il a dû prendre ça comme un jeu et a souri, alors je suis sortie par la fenêtre le plus vite possible. En descendant le long du mur, j'ai entendu le maire pester contre la personne qui osait l'appeler à une heure si tardive. J'ai sauté pour atterrir dans le jardin.

      Alors que je sortais en sautant la grille, j'ai vu une voiture de policiers arriver dans la rue. Je me suis poussée en arrière sans réfléchir et j'ai plus ou moins réussi à amortir la chute avec mes bras. Je me suis collée contre le muret en priant qu'on ne me voit pas. J'ai entendu le moteur se couper et des portières se claquer. Les voix des policiers se dirigeaient vers moi et j'ai commencé à paniquer. J'entendais mon cœur battre dans ma poitrine et j'avais l'impression que les policiers pouvaient l'entendre. Ils ont sonné et des lumières se sont allumées dans la maison. C'était fini, j'allais forcément me faire voir. Le maire a ouvert la porte en se fâchant contre les flics qui, je cite, "n'étaient bons qu'à réveiller les gens en pleine nuit mais pour ce qui est des criminels, ils avaient plus de mal !".

     Je suis restée tapie dans un coin pendant que le maire s'énervait et devenait tout rouge. Je n'ai pas bougé. Je n'osais même pas respirer. Je n'ai pas réussi à entendre les policiers mais ils sont entrés dans le but d'aller inspecter la maison. Le maire ne les pas empêché. Un voisin les avait appelé car il avait vu quelqu'un escalader la façade. J'ai ravalé ma salive et j'ai senti mes joues devenir pourpres.

      Par chance, le maire les a fait rentrer. J'ai escaladé la grille à une vitesse phénoménale et je me suis enfuie en courant plus vite que je n'avais jamais couru vers la fin de mon calvaire.

     Mais mes idiots de pieds se sont emmêlés tout seuls et je me suis étalée sur le béton avec la grâce d'un vieux steak. Je me suis relevée tant bien que mal. J'ai vu l'état de mon pantalon et une grimace s'est dessinée sur mon visage. Mes genoux et mes coudes commençaient à rougir. J'ai serré les dents en me disant que ça picotait quand même un peu mais je me suis motivée à arriver le plus vite possible. Alors j'ai repris mon épuisante course.

      Je suis entrée dans le cimetière. Je suis passée en courant devant les tombes. Je n'ai pas ralenti et je me suis arrêtée net devant un mur qui délimitait le cimetière. Je suis passée de l'autre côté très facilement et coincée entre deux murs malheureusement très serrés, j'ai vu la trappe. Je l'ai ouverte et je me suis faufilée à l'intérieur. Une petite échelle m'a menée dans un tunnel très étroit creusé dans la roche. L'air frais souterrain m'a fait du bien. J'ai longé le mur taillé dans la roche jusqu'à tomber sur la Place, une gigantesque salle sous terre où trône une fontaine en son centre avec autour d'elle différents étalages où étaient vendus principalement des armes et toutes sortes de matériel de survie. La Place était vide mais c'était normal à cette heure ci. J'ai emprunté le tunnel six qui m'a conduite vers la salle d'entraînement.

       La salle d'entraînement est comme les autres salles, creusée dans la roche. Elle contient plusieurs "machines" qui ont été fabriquées par nos aînés. Récemment, nous avons fini le mur d'escalade qui est vraiment l'exercice le plus génial de la salle. La pièce était vide. D'un coup, tout mon épuisement est sorti et j'ai soufflé tout l'air que j'avais dans les poumons. Essoufflée et à bout de force, je me suis adossée contre le mur et j'ai profité de sa fraîcheur en posant ma joue contre.

       Je me remettais de mes émotions quand deux silhouettes se sont glissées derrière moi. Anxieuse, j'ai pris une grande inspiration et je me suis retournée. L'une d'entre elles a dit : "Tu as pris beaucoup trop de temps. Maintenant c'est trop tard."

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