HOMELESS (Tome 1)

Chapitre 37

[Il y a une petite nouvelle à la fin de la note d'auteure, qui vous fera sans doute plaisir...]

-Ivy, réveille-toi ! Tout va bien, réveille-toi...

Je sursaute, et les bras de Nate me retiennent fermement contre lui. J'ouvre les paupières ; mes cils sont perlés de larmes, mon cœur bat à tout rompre. Mes yeux virevoltent dans la pièce, me prouvant que je suis bien chez Nate, à l'abri. Pourtant, la scène que je viens de vivre se rejoue devant moi.

-Tout va bien, murmure encore le garçon châtain en me caressant les cheveux. C'était juste un mauvais rêve.

Non. C'était la vérité. Le cauchemar éveillé que j'ai vécu l'année dernière, je l'ai revu à l'instant. J'en frissonne encore, perturbée par ce qui vient de se rejouer dans ma tête. Tout paraissait si vrai, si réel...

Un sanglot s'étouffe dans ma voix, et j'essuie d'une main fébrile les billes salées sur mes pommettes.

-Tu veux en parler ?

J'hésite durant plusieurs secondes, les yeux dans le vague. Je n'ai pas tout dit à Nate, tout à l'heure. Je ne lui ai expliqué que ce qui s'est passé ce soir-là, et comment j'étais partie ensuite, avant de rencontrer Bruce. Je me suis arrêtée avant de lui avouer les raisons qui font que mes parents ne m'aiment pas, et qu'ils m'accusent d'avoir gâché leur vie. C'était trop à assimiler d'un coup, pour lui comme pour moi.

Seulement, maintenant, je me rends-compte que j'ai besoin que tout sorte pour de bon. Je ressens cette envie irrépressible de lui livrer tout ce que je sais, même si mes géniteurs m'ont fait promettre de garder le secret.

-Ils ne s'aiment pas non plus, déclaré-je.

Nate me regarde avec de grands yeux, étonné.

-Mais pourquoi sont-ils mariés, alors ?

-J'y viens, espèce d'impatient, souris-je.

Cependant, ce rictus est forcé. Je me redresse sur le canapé, réajuste la couverture autour de mes épaules. Bien que j'en meurs d'envie, je ne tends pas la main vers la table afin d'attraper ma tasse de thé, car elle doit être froide, depuis tout ce temps. Face à moi, Nate semble avide de savoir le fin mot de cette histoire. Sa jambe droite tressaute nerveusement, et il ne me quitte pas des yeux, attendant que je parle.

-Ils se connaissent depuis le lycée. Mais eux deux, ce n'était qu'un coup d'un soir. Enfin, jusqu'à ce que ma mère se retrouve enceinte, à seulement vingt ans. Elle commençait à peine ses études pour devenir avocate, et cette grossesse venait contrecarrer tous ses plans. Alors elle a été contrainte d'appeler mon père, pour savoir ce qu'ils devaient faire. Ils ne se fréquentaient même plus, à ce moment-là.

Mon souffle est haché, et les mots sortent de ma bouche avec difficulté, comme s'ils me coûtaient d'être prononcés. En confiant cela, les explications de mes parents, plusieurs mois auparavant, me reviennent en mémoire. Et ça fait mal. Je sens mon cœur se serrer douloureusement, mon cerveau me supplie d'arrêter cette torture.

-Ils ont convenu ensemble qu'ils ne pouvaient pas garder l'enfant, dis-je d'un ton plus bas. Mais mes grands-parents n'étaient pas de cet avis. Ils sont contre l'avortement, et plutôt dans le schéma de famille « traditionnelle », genre un père et une mère mariés, avec des enfants.

Nate hoche la tête, les sourcils froncés. A voir sa tête, il m'est aisé de deviner qu'il n'est pas d'accord avec cette idée de famille traditionnelle. J'attends quelques secondes avant de poursuivre, car le plus dur pour moi arrive. Ma voix tremblotte, mais je n'en tiens pas rigueur. Il faut que ça sorte, c'est le plus important. Ensuite, je serais peut-être plus libérée.