Chapitre 6 : Le départ

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06:00 Le réveil de Capucine sonna. Il troubla le doux silence nocturne de la maison, sa mère dormait à points fermés et son frère bougea dans son sommeil. Capucine s'extirpa de son lit, bailla silencieusement et se dirigea sur la pointe des pieds dans le salon. Elle grelotta. Sans bruit, elle augmenta un petit peu les radiateurs puis s'habilla chaudement : un jean noir, un haut marin et un gilet en laine. Elle se dépêcha de déjeuner dans le plus grand calme. Elle engloutit deux tartines de Nutella et une au beurre salé recouverte de confiture de fraise, deux verres de jus d'orange et un bol de chocolat chaud. Elle fourra deux pains au chocolat et deux pommes dans son sac pour dix heures. Elle y mis aussi son ordi, son portable (ainsi que les deux chargeurs), un bouquin et son porte-bonheur que son père lui avait ramené de Turquie, un œil bleu qui chasse les malheurs. Elle se lava les dents, se débarbouilla, mis de la crème sur son visage, coiffa ses cheveux en bataille et mis du mascara. Elle regarda le résultat dans le miroir.
Ok, ça me vas pas du tout, se dit-elle en soupirant. On dirais un mammouth qui veut ressembler à une top modèle.
Capucine se dépêcha de l'enlever, en rageant contre la loi de la nature qui l'empêchait de mettre du maquillage. Elle mis du stick à lèvre rose Baby Lips et sortit de la salle de bains. Elle passa aux toilettes puis pris son sac, mis sa veste, serra les lacets de ses Converses et referma la porte d'entrée derrière elle. Ses narines se remplirent de ce vent glacial qui vous donne envie d'éternuer, elle ferma sa parka kaki et marcha en direction de chez Léïs. Elles allaient monter dans un train jusqu'à Paris, prendre ensuite le bus pour Saint-Denis et arriver au studio Lendit pour participer aux éliminations devant les jurys. Capucine soupira, elle devait réussir, elle pouvait... Elle le sentait au plus profond d'elle. Elle pouvait montrer au jurys qu'elle chantait avec son cœur, qu'elle voulait faire découvrir à tout le monde sa voix, ne plus se cacher, se dire que se n'était pas une honte... Elle chantait. Elle était fière d'avoir une voix comme celle-ci. Elle devait l'assumer. Ses pensées vagabondaient. Si jamais elle n'arrivait pas à sortir un note ? Si elle se ridiculisait devant tout le monde ? Déjà devant Quentin et Léïs, elle avait du mal... Alors devant Mika, Zazie, Florent, Matt et neuf caméras... Pfffffffff. Elle n'y était pas encore de toutes façons. Il fallait déjà plaire aux jurys. Elle repensa à sa prestation sur La bohème en sixième. Elle y était arrivée. Elle pouvait le faire aussi.
Ses pieds s'arrêtèrent sur le pas de la porte d'entrée de l'immeuble n°2, celui de Léïs. Elle sortit les clés que celle-ci lui avait donné hier et ouvrit la porte.
"Ne sonne surtout pas !" lui avait assuré Léïs, la veille, alors qu'elles préparaient leur plan d'attaque.
Ah oui, parce que les parents de Capucine ne savaient pas qu'elle participait aux épreuves. Elle n'avait pas eut le courage de le dire à sa mère, tellement elle avait peur qu'elle refuse. Elle lui avait dit qu'elle partait camper pour le week-end avec Léïs. Capucine monta les six étages en se demandant si elles auraient assez d'argent pour manger à Mac Do, puis entra dans le petit appartement de sa meilleure amie. Des plantes vertes étaient posées sur le sol et un tapis oriental ornait le petit salon. Léïs avait coiffé ses cheveux en tresse épis de blé et fermait la fermeture éclaire de son sac à dos Easpack. Elle se retourna et adressa un signe de la main silencieux à Capucine qui lui murmura un "Dépêches-toi..." hâtif. A vrai dire, elle avait quand même très envie d'y aller. Léïs avait mis une tunique rouge avec un jean bleu déchiré au genou et s'emmitoufla dans son blouson en cuir.
    - Voila, chuchota-t-elle, en attrapant ses clés. Tu es prête ?
    - Oui. T'inquiètes...
    Je ne sais pas trop en réalité.
Léïs laça ses baskets Nike puis les deux filles descendirent les escaliers de l'immeuble en rigolant le plus silencieusement possible. Elles étaient toutes les deux très excitées à l'idée de mentir à leur parents et aller à Paris toutes seules. Elles arrivèrent au bout de quelques minutes à la gare qui était toute proche et montèrent sur le quai B. Capucine sentait une sorte de boule qui se formait dans son ventre chaque fois qu'elle se levait très tôt le matin, elle s'assit sur un banc froid et posa son sac à côté d'elle.
    - Je vais acheter un truc à boire au distributeur, s'exclama Léïs. Tu veux quoi ?
Capucine se releva et vint avec elle. Elles passèrent la grande porte en bois et entrèrent dans la gare. Sur la gauche, une femme attendait derrière un guichet en pianotant sur un ordinateur en finissant un Starbuck. Quelques personnes étaient assises sur les bancs à droite : une grand-mère entourée de pleins de valises et de deux petits-enfants endormis, un couple entamant une boîte de Granola, une jeune fille aux cheveux roux qui lisait un bouquin d'au moins mille pages et un homme parlant sèchement à son portable. Il brisaient le silence matinal qui enveloppait la gare.
    - Non... pour ce soir. Ouiii. Ce soir je te dis, s'exclamait-t-il dans le hall résonnant.
Les deux filles s'arrêtèrent devant le distributeur de boissons. Il proposait du thé, du café ou du chocolat chaud. Léïs commanda un chocolat chaud puis glissa les pièces unes par unes dans la fente destinée à cela. Elle posa son gobelet sous le filet de chocolat qui le rempli. Une vapeur et une odeur délicieuse s'élevait de ce qu'elle tenait maintenant dans la main.
    - Tu veux quoi ? demanda-t-elle en soufflant sur son gobelet.
Capucine aurait bien pris du café, pour la réveiller, mais, malheureusement, elle détestait ça, avec ou sans sucre.
    - Du chocolat chaud, comme toi, finit-elle par dire en sortant son porte-monnaie.
Derrière eux, l'homme continuait à brailler dans son téléphone en faisant les cents pas.
    - Non ! Le producteur ne voudra jamais, c'est ce soir ou rien... Ouiiii, je sais qu'on a pas fini le montage...
Il finit par sortir dehors, laissant une odeur de déodorant pour homme derrière lui.
Les deux filles le suivirent avec leur boisson, fumante et débordante. Le froid leur piqua la peau tandis qu'elles sentaient le liquide chaud et sucré couler dans leur gorge. Une voix s'éleva dans un haut-parleur :
    - Le train venant de Marseille, à destination de Paris, vas rentrer en gare. Merci de rester derrière les lignes de sécurité jusqu'à l'arrêt complet de l'appareil.
Les deux amies se regardèrent. Capucine sauta sur place et Léïs éclata de rire.
Elles y étaient presque.
À The Voice.

Le jour où je suis passée à The VoiceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant