Affalée sur son canapé en cuir suédois, hérité de sa mère quand cette dernière avait voulu s'en débarrasser, Mathilde contemplait la tulipe qu'elle tenait en main. Elle l'avait trouvée dans un parc lors de son retour de l'hôpital et avait été fascinée par les nuances orangées que portait la fleur. Elle avait jeté un coup d'œil aux alentours afin de s'assurer que personne ne pouvait la voir, puis s'était accroupie, aidée par ses souliers qui mesuraient une dizaine de centimètres de haut, facilitant l'appui une fois proche du sol et avait tendue la main vers cette si jolie tulipe. Elle avait pourtant réfléchi une centaine de secondes quant à sa décision : elle ne voulait pas ôter la vie de cette fleur mais en même temps, elle voulait se souvenir à tout jamais de sa couverture semblable à une caisse d'agrumes.

Après l'avoir suffisamment tortillée entre ses doigts, elle la reposa finalement dans le verre d'eau qu'elle avait utilisé comme vase et elle se rallongea sur le meuble, fermant les yeux pour s'imprégner du parfum fleuri que recensait son appartement en cette fin de journée.

Cependant, un bruit la dérangea rapidement et ce fut à contre cœur qu'elle dut rouvrir ses paupières. Le son provenait de son téléphone qui avait atterri à côté de sa plante verte quand elle était arrivée dans son appartement. Heureusement, le son fut éphémère donc elle pouvait retourner à sa sieste, mais il avait été assez bruyant pour titiller sa curiosité. Que pouvait-il signifier d'ailleurs ?

Ce n'était certainement pas un appel car bien trop bref, ça pouvait être un message sans doute peu important, sinon il aurait été suivi d'un appel. Il ne restait plus que les notifications d'applications : par chance, elle n'en possédait pas énormément et une rapide réflexion lui confirma que ça ne pouvait provenir de l'une d'entre elles. Mais bien sûr, c'était un e-mail : elle en recevait une dizaine par jour et n'avait jamais eu le courage ni la volonté de se désabonner des nombreuses mailing-lists auxquelles elle s'était inscrite au fil des ans.

C'est ainsi qu'elle réalisa qu'un e-mail n'était pas à la hauteur de ses efforts et ne méritait certainement pas qu'elle se fatigue pour une information inutile, préférant refermer ses paupières et s'imaginer dans un champ de tulipes, bercée par l'air frais parvenant de la fenêtre entrouverte.

16.05.17

ensanglantéWhere stories live. Discover now