"Ce ne serait pas un peu prématuré de se rencontrer si tôt ?"

Pensive, elle quitta la cuisine et se prépara pour sa journée de travail. Elle ne reprit son téléphone qu'une fois sur le seuil de la porte – sans pour autant songer à vérifier ses notifications -, ne désirant pas accumuler de retard par la possible discussion avec Kariboo1307, le pseudo qu'utilisait l'homme qui avait engagé la conversation avec elle hier et qui, jusqu'ici, n'était pas passé inaperçu dans le cœur de Mathilde.

La clé enfoncée dans la serrure, un tour à droite, extraction de la clé et l'affaire était bouclée : elle pouvait finalement se rendre vers l'hôpital qui, par chance, n'était situé qu'à une vingtaine de minutes de sa demeure. Bien sûr, le trajet en bus était naturellement plus court qu'à pied mais c'était une question de liberté : ce trajet matinal – et pré-nocturne, par la même occasion – lui donnait le temps de se réveiller pleinement et de s'accorder un moment de paix lorsqu'elle longeait le lac autour duquel toute la jolie nature s'agglutinait.

Ce matin-là, elle n'eut même pas besoin d'enfoncer ses écouteurs dans ses oreilles : les événements de la veille, pourtant sans grande ampleur d'un point de vue extérieur, l'avaient tout de même chamboulée et elle préférait observer l'environnement qui l'entourait plutôt que de s'isoler dans sa musique. Les jambes tiraillantes lui rappelèrent que la destination serait bientôt atteinte quand elle entama la dernière rue montante. Chaque fois qu'elle atteignait le sommet du voisinage, tout en haut de la montée, elle se sentait prise d'un air triomphant, se comparant à Rocky Balboa durant ses entraînements.

Elle admira néanmoins les quartiers qui s'étendaient autour de l'hôpital bien que cette vue soit devenue un détail anodin du paysage, ayant dépassé le stade de l'admiration qui avait tout de même duré quelques semaines. L'agitation des citoyens la ramena sur Terre, réalisant que son service commencerait dans une dizaine de minutes, comme lui apprit sa montre. Le temps dont elle disposait lui permit de grimper les trois blocs d'escaliers, délaissant l'ascenseur qui ne lui offrait aucune activité sportive, de saluer les quelques collègues présents dans le vestiaire, de troquer sa veste contre son uniforme vert pomme et de finalement s'attacher les cheveux avant de se désinfecter correctement les mains.

Sachant pertinemment que la journée serait longue et que la prochaine pause qu'elle pourrait s'octroyer ne précéderait pas les douze coups de midi, elle lut rapidement la réponse de Kariboo1307.

"On pourrait tout aussi bien attendre de toucher notre pension, si c'est ce que tu suggères. J'ai attendu toute ma vie un signe de l'avenir alors avec mes plus de vingt ans d'expérience, je peux t'assurer que si tu continues à vivre dans l'attente, tu rateras le train de la vie"    

// et ouais, je suis de retour. lâche un com, qu'on se tape la discut

ensanglantéWhere stories live. Discover now