Tchéchénie

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Une lucarne le séparait de la réalité. Il n'était qu'un simple gamin comme les autres. Il n'avait que quelques effets personnels. Il était habillé d'une éternelle chemise blanche délavée et d'un pantalon au bord de l'usure. En bref, l'étudiant classique universitaire, il était mais classique n'était pas la société.

Mayra n'y avait pas cru une seule seconde. C'était sûrement une blague. De très mauvais goût, certes mais une blague quand même. Ou bien, c'était un mauvais rêve dont il était sur le point de se réveiller.

Non. C'était bel et bien réel. Le monde revenait plus de 70 ans en arrière.

De la fenêtre de sa chambre d'étudiant mansardée, il voyait plusieurs de ses congénères habitant l'immeuble se faire embarquer de force dans les trois combis de police.

C'était réel mais inimaginable.

On embarquait plusieurs de ses camarades d'immeuble dans les trois combis de police, les gyrophares surexcités par un tel nombre d'arrestations soudaines. On dirait des vaches prenant leur dernier voyage avant l'abattoir...

Mayra sentit la peur prendre possession de son corps. Il serra son livre de Carl Jung : Synchronicité et Paracelsica contre son torse plat pour essayer de trouver un grain d'assurance et de réconfort. La soie précieuse de la cravate bleue se marquait au travers du coton de chemise. Il soupira douloureusement face à ce spectacle.

Il avait du mal à y croire. Pourtant cela se produisait sous ses yeux ! Il ne voulait pas y croire. C'était insensé. L'espèce humaine valait bien plus que ça, non ?

Des pas retentirent dans les escaliers. Des pas lourds néanmoins rapides. Ils devenaient de plus en plus forts et se rapprochèrent. Mayra retint sa respiration tandis que son sang se gela. Il entendit la poignée de sa chambre tourner. Il colla au mur près de la fenêtre sans piper mot en fermant les yeux. Il voulait se réveiller de ce cauchemar !

La porte s'ouvrit avec un cliquetis de clefs. La seule personne qui avait eu le double des clefs était Lyav. Il avait disparu des bancs universitaires depuis des semaines, depuis que cette fameuse épuration avait commencé à faire des ravages.

Non.

Il était sûrement parti pour l'Europe comme il le fanfaronnait à toute personne voulant bien l'écouter. Là-bas, on l'a sûrement aidé. Là-bas, les gens ne sont pas que de vulgaires pions. Ou bien... L'angoisse revint de plus belle et le livre n'aidait plus à rien...

« Mayra. »

Cette voix.

Essoufflée.

Déchirée.

Soulagée.

C'était... L'appelé ouvrit les yeux.

Lyav.

Blessé.

Sali.

Amaigri.

Le jeune homme n'osait pas bouger du mur terrifié d'une possible mascarade. L'autre referma la porte à double tour de clé. Il portait toujours sa vieille veste en cuir trop grande pour lui. Son jeans était crasseux tout comme son visage suppléé de blessures et hématomes divers.

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