Chapitre 5

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De retour à son bureau peu après les douze coups de midi, Yann fut surpris d'y trouver son reporter tranquillement installé sur son canapé alors que sa porte était restée ouverte comme toujours en son absence.

- Martin ? Je te croyais en pause dej'.

- moi aussi.

Le poivre et sel leva un sourcil intrigué vers le plus petit, il ne voyait pas où il voulait en venir.

- Hugo m'a organisé un rendez-vous arrangé mais elle n'est même pas venue.

- je suis désolé.

Son ton se voulait compatissant alors que ses fesses prenaient maintenant appui tout contre son bureau et qu'il fixait toujours son interlocuteur avec attention.

-'tain mais c'est quoi mon problème ? J'arrête pas de courir après la mauvaise personne, d'abord toi, maintenant cette fille.

La tête en arrière, Martin couvrit son visage avec ses deux mains, il avait l'air au bout du rouleau. Il soupira une nouvelle fois et Yann repensa aussitôt aux propos de son ami Vincent lors de leur pause déjeuner de la veille, le Mâconnais avait raison, son reporter avait le droit de savoir ce qu'il ressentait vraiment au fond de lui, il méritait de connaître la vérité ou tout du moins de l'entendre une seule et unique fois.

- peut-être que tu coures pas toujours après la mauvaise personne.

Son regard se voulait fuyant et son ton hésitant, il se trouvait archi nul pour ces trucs-là, il n'était vraiment pas doué, c'était un euphémisme.

- t'as pas entendu ce que je viens de dire ? Elle n'est pas venue, elle m'a posé un lapin, elle est pas intéressée, ça me paraît clair.

- je te parlais pas de cette fille.

Martin se redressa immédiatement sur le canapé et il sonda son patron du regard, la conversation avait pris un tournant inattendu, il n'avait pas prévu de parler de sa vie privée aussi longtemps en sa compagnie, pas du tout.

- de qui alors ? À part toi, il n'y a eu personne. C'est quelqu'un de la rédac' ? Je te préviens, si c'est encore pour m'arranger le coup et que ça finisse comme aujourd'hui, je marche plus.

Yann sentit la panique l'envahir tout à coup, le courage qu'il avait ressenti il y a quelques secondes à peine à l'idée de se déclarer venait de se volatiliser dans l'air, totalement.

- t'as raison. Tu sais quoi ? On oublie.

- nan vas-y, dis-moi Yann, tu parlais  de qui ?

De moi, espèce d'idiot ! Je suis la bonne personne ! Voilà ce qu'il avait envie de lui hurler au visage, mais il n'en fit rien, il était bien trop lâche, Vincent avait raison, Martin était cent fois plus courageux que lui.

- ben t'as deviné, d'un autre rendez-vous arrangé avec une fille de la rédac', c'est ça dont je te parlais.

- ah ok. Bon je vais me prendre un truc à manger. Je te ramène quelque chose si tu veux.

- non, c'est bon, merci, j'irai plus tard.

Mal à l'aise en sa présence après ce qu'il pouvait certainement qualifier de déclaration la plus ratée de l'histoire, le plus vieux n'avait qu'une hâte c'était que son cadet s'en aille loin de son bureau le plus tôt possible.

- comme tu voudras. À tout à l'heure, Yann.

- à tout' Martin.

Son reporter se leva, il répondit au petit sourire qu'il lui adressa et à l'instant même où Martin referma la porte derrière lui, Yann prit sa place sur le canapé en se laissant choir comme une masse sur ce dernier, il était totalement désemparé, ils n'y arriveraient décidément jamais tous les deux, jamais.

Pause dej'Where stories live. Discover now