L'agence du destin

Chapitre 1, fleurs bleues

1h03. Les yeux grands ouverts et larmoyant, Rose écoute inlassablement le tic-tac de sa petite horloge. Le sommeil ne vient encore pas. La mi-juin arrive et depuis là 2 mois déprimant sont passés, en quelques secondes, son monde s'était écroulé en mille morceaux. Actuellement dans des études pro pour fleuriste, Rose doit tout abandonner. Plus elle trime et plus elle se fait aider, plus ses notes pratiques ne cessent de chuter. Son cœur et son monde se sont brisé quand son maître de classe l'avait appelée au bureau. Une seule question et sa vie avait basculée. Et comme tatoué dans son esprit, cette question ne cesse d'y résonner depuis.

" Rose est ce que vous vous voyez faire autre chose ? "

Sur le coup, elle n'avait pas su contenir ses larmes et le sol s'était comme ouvert sous sa chaise. Dans sa tête, son avenir en tant que fleuriste diplômé, avec une potentielle boutique à elle, avait volé en éclat. Elle était retournée en cours, toute étourdie, et sans un mot ses amies l'avaient pris dans leur bras comme signe de soutien à un maux, qui pour Rose, est invisible aux yeux du monde.

Deux semaines après, une lueur d'espoir lui était apparu. Elle avait obtenu, non sans se battre, deux jours d'essais à la bibliothèque de son école. Mais un mois après, par un chaud mois d'Avril, Rose dut partir au plus vite au sein de sa famille, habitant les environs de Paris. Sa tante, Anna, gravement atteinte de trois cancers, avait fait une sévère rechute qui s'annonçait comme lui étant fatale. Rose-la connait peu et partage de maigres souvenirs avec elle, mais la longue maladie qui ronge le cœur de sa famille, l'a marquée à vie.

Dans ses derniers jours, quand Rose était à son chevet, Anna lui avait donné de magnifiques conseils pour réussir ses jours d'essais en librairie. Elle était comme elle, passionnée par les livres, et désormais jamais Rose ne pourra pas lui dire que rien ne s'est passé comme prévu et que cet essai avait été froidement annulé.

Depuis donc 2 mois, pas une nuit ne passait sans pleurs et hurlement, dans un oreiller imprégné de tristesse. Ses amies, sa famille, personne ne comprenait sa décision mais personne ne cherche réellement. Rose préfère arrondir les angles à leurs yeux. Ils savent qu'elle a fait le bon choix. Ses 18 ans approchent, et son année sabbatique la terrifie sans même qu'elle puisse l'expliquer.

Samedi matin, lendemain d'une nouvelle nuit agitée, Hélèna sa mère, l'appelle pour un reçu de colis à récupérer à la poste. Arrivée en une minute à peine, elle l'observe, le regard interrogateur, avec un sourire bienveillant. Hélèna est en fière, elle a de beaux yeux clairs qui mettent en avant son visage souriant, le tout encadré par de longs cheveux châtains, qu'elle jalouse secrètement.

- « Pourtant je n'ai rien commandé sur internet ! Et je n'attends rien de personne ! Un colis, en retard, de papa ? » Demande Rose surprise.

Hélèna grinça des dents à l'entente de cette réponse, prévisible. Ce soi-disant père et mari, à l'époque, les avaient abandonnées quand Rose atteignait ses dix ans. Depuis aucune nouvelle, à part le maigre colis qu'il envoie chaque année pour l'anniversaire de sa fille.

- « Hum ... Dépêche-toi d'aller le chercher c'est peut-être plus important que ce que tu penses ! Le bureau de poste va fermer dans une demi-heure. »

Rose quant à elle, sourit à cette nouvelle quelque peu inattendue et elle saisit presque avec empressement sa veste et ses chaussures. Elle se rend d'un pas léger vers le bureau de poste qui se trouve être à moins de trois cent mètres de chez elles.

Elle y récupère bien quelque chose. Mais de là à savoir si le colis est important, elle ne pouvait le déterminer qu'une fois ouvert. Par le plus grand des mystères, aucun expéditeur ou raison sociale d'entreprise pouvait lui permettre de déterminer le potentiel contenu du carton. Même la réceptionniste au guichet, en haussant vaguement des épaules, lui a précisé que cela restait un fait rare mais qui, comme par magie, arrivait malgré tout. Sur le chemin du retour, Rose curieuse et inquiète, inspecta le colis et laissa son regard sur l'inscription en plein milieu du paquet. Son nom et adresse, y est écrit en belle et grosses lettres calligraphiées, sortant presque tout droit de l'imaginaire tant le trait de plume est parfait.