Little Marcel

Amalric

     Jaune... Voilà la couleur de la chose sur laquelle je suis assis et qui n'arrête pas de me chatouiller les fesses ! Le jardin ! On m'a sortit de mon lit si confortable pour que je puisse prendre l'air dans le jardin ! Je ne sais même pas si le terme "prendre l'air" est le plus approprié à la situation, je pense personnellement que "s'étouffer et se transformer en grillade sous un soleil de plomb" conviendrait mieux...

Mais quelle idée stupide ! Surtout avec Maman dans les parages ! Voilà que je te mets un chapeau par ci, des lunettes de soleil par là et que je te tartine de crème solaire plus qu'il n'en faut ! À croire qu'elle veux que je me transforme en beurre au toast... Le seul point positif c'est que ça colle tellement que je n'ai qu'à arracher un peu d'herbe, quoique bien seiche, pour me transformer en un véritable nouveau Cetelem !

     Quand à mon cousin... stylo bic ? Non... Périodique ? Pas ça non plus... Amérique ? Je me rapproche... Amalric ! Mais oui mais c'est bien sûre ! Amalric ! Il me fixe depuis tout à l'heure a un point que je me demande ce qu'il me veut... Cheveux ? Propres, exceptionnellement, pas de fourmis ni d'araignées... Couche ? Un peu de terre mais rien de très important...

Pourquoi ses yeux ne quittent ils pas mon visage ? Il n'a jamais vu un bébé de sa vie ou sa mémoire serait-elle équivalente à celle de Bubulle ? Ça en devient très louche... ou inquiétant ! Mouais, la deuxième solution me parait plus juste, rien que le fait de se proclamer l'amoureux de Lola me permet de douter de son niveau d'intelligence... le pauvre, il ne sais pas a quoi s'attendre !

Du haut de ses sept ans, c'est le fils de Tata Myriam et de Tonton Nathanael, toujours un ballon à porté de mains et un caractère de cochon ! C'est monsieur non, et heureusement qu'il a la peau claire et les cheveux noirs sinon on l'aurait confondu avec schtroumpfs grognon...

     Tient, Tonton sort de table et vient nous voir ! Ça ne m'étonne pas le gâteau au chocolat vient d'être fini ! Il s'approche et se poste à côté de son fils avant qu'ils ne commencent à taper dans la balle... Qu'est ce que je disais ? Le foot avant tout ! Je pense que je devrai enlever les brins d'herbes qui me recouvrent car j'ai un peu l'impression de faire du mimétisme avec le gazon paillasson !

Ils préfèrent courir après un truc rond plutôt que de prêter attention au petit dernier de la famille ! Que d'amour ! Que de vigilence à mon égard ! C'est injuste... Sniff... Bon ben j'ai plus qu'à parler et jouer avec Toudou alors ! Lui au moins il m'écoute et il est toujours là pour moi, nah !

    Je commence à lui préparer de la salade en herbe jaune avant que je ne sente un petit courant d'air frais près de mon oreille gauche... et que je ne vois le ballon atterrir violemment sur mon doudou ! Toudou... le ballon... les larmes commencent à monter lorsque je comprends la triste vérité...

Ouiiiiin ! Ils ont tué mon Toudou ! Je le reverrais plus jamais jamais jamais ! La vie est tellement cruelle ! Comment je vais faire moi sans lui ? Il est irremplaçable ! Tellement d'injustice dans ce bas monde... sniff...

À cause de mes pleurs, Tonton se précipite vers moi et me prend dans ses bras alors que mon cousin rigole en déclarant qu'il s'est transformé en civet ! Bon, ça aura au moins eu le mérite d'attirer son attention mais j'aurais préféré que ça se produise autrement qu'avec la mort de mon doudou... Sniff...

J'attrape son cou de toute mes forces pour essayer de combler la perte de Toudou mais sans succès... sniff... Je l'entend me dire de me calmer, que tout vas bien mais ce n'est pas vrai ! C'est qu'un menteur d'abord ! Il a pas le droit de dire ça... Quand à Amalric, il me regarde, encore, avant de s'exclamer bruyamment :

"De toute façon, c'est qu'un bébé ! Et en plus d'être moche, avec des grosses joues toute rose, des bras et des jambes pleines de graisses et trois cheveux sur le caillou, ça mange, ça fais caca et ça pleure tout le temps ! À quoi ça sert ? On peut même pas jouer avec parce que c'est fragile et vous ne vous occupez que de lui, c'est injuste ! Je veux jamais de petit frère ou petite soeur !"

    Je le regarde s'éloigner d'un pas aussi rapide que Papa après avoir casser quelque chose, encore sous le choc... Il a pas le droit de me dire ça après avoir dégommé Toudou ! Qu'il me laisse au moins faire mon deuil, mince crotte zut flûte à la fin ! Et puis c'est même pas vrai on est pas moches d'abord ! On ressemble peut être un tout petit peu riquiqui à une limace mais rien de véritablement embêtant !

Quand au rose, c'est joli, Lola en est ravie d'ailleurs elle n'arrête pas de demander à Maman et à Papa de m'emmener dans sa chambre pour qui je puisse faire le caméléon ! Ça prouve même que je suis utile ! Après c'est normal d'être fragile, on est tout petit minuscule, c'est facile de dire ça quand on fait le double de ma taille !

C'est pas gentil gentil... Il est méchant... sniff... Tonton me dépose délicatement dans l'herbe gratouilleuse avant de partir rejoindre mon cousin... Ne s'occuper que de nous, quelle blague ! Voilà que je me retrouve encore une fois abandonné comme une vieille chaussette sale avec un trou pour laisser passer le gros orteil ! Quel humour, il est drôle quand même Cousin...

     De nouveau délaissé, je me met à avancer tant bien que mal mes quatres membres au travers de la pelouse épineuse avant que je ne m'envole encore une fois dans les airs
cette fois grâce à la compagnie aérienne Papa...

On se poste près de la voiture de Tata Tonton et Amalric pour leur dire au revoir et Papa ne peux s'empêcher de secouer mon petit poing pour leur signaler ma présence ! Je gigote pour m'échapper de son emprise et pour éviter de voir à nouveau la tête de monsieur non... En l'honneur de Toudou, je boude ! Nah ! Fallait pas le frapper comme ça ! Non mais... Faut pas rigoler avec Doudou, il est sacré !

J'attends que la voiture parte avec une partie de ma famille dedans avant de rentrer à la maison ou je garde mon Toudou avec moi pour lui offrir le plus beau discours qu'il mérite, à la hauteur de son importance pour moi !

Je me prépare à lui déclarer tout mon amour lorsque Maman me l'arrache brusquement et le met à la machine à laver où il ressort une heure plus tard, plus beau que jamais ! Je le sers contre mon coeur reniflant à plein poumon son odeur de fleur et savourant le fait de le retrouver en vie... C'est officiel, j'adore, presque tout le temps, ma famille !