Amarante

Chapitre 3

                 La jeune fille se trouvait à genoux. Sa tête était baissée et ses cheveux retombaient sur son visage endormi.

Quand elle reprit conscience en se réveillant, elle ne put distinguer d'abord que de vagues formes ; puis, sa vision s'éclaircit et sa vue redevint normale. Autour d'elle se trouvait ses amis, qui s'étaient déjà réveillés. Ils restaient là, à genoux, ressemblant à des statuts, fixant tous le même point dans le vide.

La pièce était plongée dans une semi-obscurité. Une fenêtre au volet cassé permettait de procurer le peu de lumière qui les éclairait. Le parquet était vieux et abîmé ; et le papier peint collé aux murs grisâtres se détachait par endroit. Une odeur cramoisie régnait dans la salle.

Hermine fronça les sourcils. Elle était intriguée par le comportement étrange de ses camarades, qui gardaient un regard vide, sans expression.

Fixant le mur à son tour, une sphère remplit d'une fumée verdâtre, flottant dans les airs, en apesanteur, apparut devant elle. Elle avait quelque chose d'attirant.

Une voix douce qui semblait familière à la jeune fille résonna au plus profond de son esprit :

- Hermine...

- Qui es-là ? Qui est-ce qui me parle ? Où êtes-vous ? Répondit l'intéressée, méfiante.

- Ne crains pas. Je suis ta plus grande amie... dit-elle d'une voix calme et envoûtante. Je ne te veux que du bien. Je suis en toi, dans ton esprit...

La sphère scintilla.

- Que me voulez-vous et qu'avez-vous fait à mes amis ? Demanda la fille d'une voix forte.

Un rire tonitruant lui répondit puis une vague image se forma dans la fumée verdâtre. La sphère prit le contrôle de l'esprit d'Hermine.

- Prends ta dague en main et lève-toi.

Hypnotisée, la jeune fille obéit sans discuter.

- Tues cette fille, demanda d'un ton sec, la voix, en désignant Éléonore.

Envoûtée, Hermine s'approcha de sa cible. Elle leva son bras et s'apprêta à frapper lorsque, soudain, elle bloqua sa main tenant la dague, à quelques centimètres du cœur de sa camarade avec son autre main ; l'empêchant ainsi de se mouvoir et de toucher sa cible.

- Que fais-tu ?! Riposta la voix, inquiète. Vas-y !?

La sphère brilla de plus belle.

- Je... je ne dois pas... non...

- Vas-y !? Qu'attends-tu ?!

Brusquement, la jeune fille se tourna. Ses yeux lançaient des éclairs. Elle lança son arme vers la sphère qui, à son contact, se brisa en mille éclats. Et la fumée verte, libérée, se dispersa dans l'air.

Un cri strident traversa le corps d'Hermine, qui tomba au sol.

Une main vint se poser sur l'épaule de la jeune fille, qui leva la tête, regarda autour d'elle et laissa échapper un cri. Qu'était-ce encore que cela ?

La couleur des murs oscillait entre un bleu azur et un violet pâle. Le béton semblait fissuré en un millier de petits hexagones, qui s'envolaient, puis disparaissaient dans les airs petit à petit, chacun à leur tour.

Il ne resta bientôt plus rien des anciennes cloisons de la pièce.

Hermine prit alors conscience de la main toujours posée sur son épaule et se tourna. Une femme aux traits tirés lui souriait chaleureusement. Elle avait de petits yeux verts émeraude fatigués, et ses cheveux bruns retenus en arrière étaient regroupés en un chignon serré. La femme regardait la jeune fille tendrement.