Chapitre 2

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Quarante minutes passées à écouter la voix cristalline de Mme Vandercrift. Quarante minutes pour la simple explication du plan du lycée, de mon emploi du temps, du règlement intérieur ainsi que pour la pratique du sport au sein du lycée. Bref, inintéressant. Les cours c'est les cours, peu importe la façon dont on te l'explique. Je ne suis pas une mauvaise élève pourtant, seulement je ne comprends pas quel est l'intérêt de passer ses journées assise sur une chaise à écouter un prof déblatérer sur ses connaissances soit disant "essentielles" à une classe remplie d'élèves qui n'en ont de toute façon rien à faire. On sait tous pertinemment que savoir calculer la masse du soleil ou que l'étude des œuvres de William Shakespeare ne servira pas à plus du dixième d'entre nous. Mais comme on dit  "il faut en passer par là". C'est donc pour cette raison de merde que me voilà rendue devant mon nouveau bahut. Génial. Au moins l'avantage est que, puisque je viens d'arriver dans une petite ville du fond des Etats-Unis, le lycée n'est pas trop grand et je ne risque pas de m'y perdre. L'inconvénient c'est que je vais bien me faire remarquer. En même temps on est mi-mars, dans tout les cas on m'aurait remarqué. Allez. J'inspire un bon coup puis avance vers la double porte d'entrée que je pousse avec vigueur avant de pénétrer dans le bâtiment en passant sous l'inscription en lettre rouge capitales "Aberdeen High School". J'atteins le premier croisement entre le hall et les premiers couloirs emplis de casiers et de salle de classe lorsque la sonnerie retentit. En quelques secondes, le couloir entier se retrouve envahit par les élèves. Je vois cette masse compacte fondre sur moi et se diviser en deux blocs distincts quasi-instantanément. Le flot des élèves passe de chaque côté de moi et m'évite en me regardant fixement. Pour la discrétion c'est réussi... J'entends déjà le souffle des murmures qui commence à courir à travers le couloir. D'ici quelques instants, tout le monde sera au courant de mon arrivée pourtant discrète. Enfin plus ou moins. Faut pas que tu restes là ! Evidement j'ai complètement oublié le numéro de la salle dans laquelle je dois me rendre. Tout comme l'étage. J'accélère le pas alors que je sens les regards toujours plus insistants des autres élèves qui se posent sur moi. Un rapide regard à mon emploi du temps que je tenais toujours dans ma main ne m'aide pas beaucoup plus puisque je n'ai aucune idée d'où se trouve la salle où je dois désormais me rendre.

-          Un petit coup de main ?

Je me retourne pour me retrouver face à une jeune fille brune qui doit être un peu plus jeune que moi.

-          Tu m'as l'air perdue, tu es nouvelle non ? me demande t-elle avec le sourire le plus sincère que j'ai jamais vu.

-          Oui, je viens d'arriver et je cherche le labo 6...

-          Je t'accompagne si tu veux, c'est dans l'autre bâtiment.

-          Non je pense que ça va aller... Merci !

Je serre mon sac sur mon épaule et me faufile entre deux groupes de personnes non loin de nous avant qu'elle n'ait le temps de me suivre. Je devrais bien réussir à me débrouiller pour trouver cet autre bâtiment, c'est pas comme si c'était gigantesque ici. En effet, une fois le couloir principal traversé je me retrouve devant une porte semblable à celle de l'entrée qui mène à différents bâtiments dont un gymnase et une cafétéria. Le plus proche est rempli de salle de cours, je n'ai qu'une petite cour à traversée pour l'atteindre et constater que c'est bien le bâtiment des sciences. C'était pas si compliqué ! Trouver le labo 6 ne me prends que quelques instants puisqu'il ne semble n'y avoir qu'un seul étage et que les numéros sont inscrits sur les portes. Voyant qu'une bonne partie des élèves sont en train de rentrer dans la salle je m'y engage à mon tour et me rends jusqu'au fond de la salle et je m'installe silencieusement à une place près de la fenêtre. Le monde semble tellement paisible dehors, en comparaison à l'agitation qui règne dans ce lycée. Combien de fois j'ai rêvé de m'échapper de tout ça ; de ce mouvement permanent, de ces bruits, de cette rumeur incessante, de ce murmure du monde. Après tout la Floride et ici quelles différences y-a-t-il ? Aucunes bien sur, c'est partout pareil. Combien de fois j'ai rêvé de pouvoir m'envoler loin d'ici et de finalement trouver ce calme, cet apaisement que tout le monde cherche au fond de lui. C'est effrayant je trouve qu'une jeune fille de 16 ans puisse être si las de la vie et du monde, ou du moins de la société de ce monde. C'est effrayant que si jeune une personne puisse préférer le silence et la solitude à la folie du monde. Qu'à un si jeune âge on puisse penser que les hommes répandent le mal et que rien ne peut les sauver. En réalité c'est plus triste qu'effrayant, car quand je lève les yeux sur les gens assis dans cette salle avec moi, attendant dans un relatif calme que notre professeur débute son cours, je pense à tous ces rêves que chacun d'entre eux doit nourrir et que seulement quelques chanceux pourront atteindre. Cette fille là-bas tout devant, assise parfaitement droite avec les cheveux  impeccablement coiffés en un chignon classique doit être le genre intello qui espère obtenir plus tard un joli diplôme d'une prestigieuse école que ses parents pourront afficher dans le salon, qui rêve d'un métier hautement qualifié et qui trimera toute sa vie pour l'obtenir car l'état actuel du marché du travail ne lui apportera surement qu'un travail indigne selon elle de ces capacités. Quand à lui ce garçon brun, athlétique, assis quelques rangs devant moi, lui il doit être un très bon sportif, mais qui à coups sur ménage ses efforts quand à sa scolarité qui ne l'intéresse pas beaucoup. Il voudra devenir pro à l'avenir, et lorsque ses rêves se briseront après une blessure ou l'arrêt de sa progression sportive, devra faire les rues pour trouver un petit job qui ne lui rapportera rien, et finira dans son canapé, une bière à la main à matter le match des Lakers à la télé entouré de sa petite famille dans son petit pavillon austère qu'il aura mis des années à se payer. Et celui là, à cinq mètres de moi, au fond de la salle, qui affiche clairement son total désintérêt pour le cours se déroulant devant lui, avec son grand sweat, son teint pâle et ses baskets usés, tombera dans la drogue à sa sortie du lycée et se retrouvera en taule ou au cimetière d'ici dix ans.

Complètement cliché, je sais. Seulement les clichés ne sont pas inventés, ils viennent obligatoirement d'une quelconque réalité. Et c'est bien ce qui attends chacun d'entre nous, la déception, puis enfin l'échec.

-          Excusez-moi Mademoiselle mais puis-je savoir qui vous êtes ?

Je mis plusieurs secondes à comprendre que c'est à moi que s'adressait ce vieil homme barbu. Quelques secondes qui suffirent à toute la salle pour se retourner vers moi. Ceux qui ne m'avaient pas remarqué en rentrant me fixaient désormais avec une intensité frissonnante.

-          Vous n'avez pas eu le mémo ?

-          Quel mémo ? Enfin Mademoiselle de quoi parlez-vous ?

Maintenant je passe pour une folle, super...

-          Je suis la nouvelle élève. On m'a dit que l'on vous préviendrait.

-          Ah... Eh bien je n'en étais pas informé, je réglerais ce problème plus tard. Vous avez un nom jeune fille ?

C'est drôle comme à cet instant précis les regards se sont fais encore plus insistants. Et oui la nouvelle à un nom, chose étonnante n'est-ce pas.

-          Héléna Monsieur, Héléna Linston.

-          Bienvenue dans ce cas Mademoiselle Linston.

Je sens déjà qu'elle va me saouler cette phrase complaisante...

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 01, 2017 ⏰

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