Chapitre 1

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Elle ne ressentait rien. Elle voyait. Elle était témoin d'une scène qu'elle n'avait jamais vue ni vécue. Les grands bâtiments blanc pâle d'une ville qui fut jadis probablement très belle contrastaient avec la couleur rouge vif des flammes léchant et consumant peu à peu chaque pierre. Des hommes en armures déferlaient dans la vaste ville, tuant et pillant ceux qui se trouvaient sur leur chemin. Parfois, ils se heurtaient à des hommes à capes noires, qui n'arrivaient pourtant pas à contenir le flux de leurs opposants,bien trop nombreux. Au milieu de la ville, il y avait une grande place, en proie aux flammes également, la submergeant et engloutissant les espoirs et rêves s'étant formés en son sein pendant des siècles.

Deux hommes se tenaient là : l'un, debout, était grand, et elle ne voyait de lui que ses cheveux blancs sortant d'une capuche noire. Il tenait une longue épée dont la lame bleutée arborait des stries sophistiquées, au manche long et à la garde pareille à un flocon.L'autre était allongé, haletant, vêtu du même manteau que l'homme qui lui faisait face. La lame noir de jais de son épée scintillait faiblement, en accord avec le souffle saccadé de son détenteur.

La ville, elle, en plus de ses bâtiments blancs, était surplombée d'une haute tour nacrée, dont les différents murs commençaient à s'effondrer çà et là sous la puissance du feu. On entendait le bruit des armes s'entrechoquant, les râles des hommes blessés, et les pleurs d'un enfant.

Les sombres silhouettes étaient immobiles. L'une contemplait le triste spectacle se déroulant autour d'elle, de ses yeux d'un blanc profond. L'autre, tentait de retrouver son souffle.

— C'est ce que tu voulais ? lança l'homme à la lame bleue, d'un ton méprisant. Voir tes amis et tes frères d'armes, avec qui tu as partagé tes douleurs et tes peines pendant des années, mourir sous les coups d'épée meurtriers de tes hommes ? Tu voulais te venger de la mort des tiens en commettant les mêmes atrocités ? C'est cela,le monde idéal dont tu rêvais ? Un monde de feu et de sang, que tu créerais de tes mains ? Et bien regarde, dit-il en levant les bras au ciel, montrant les bâtiments brûlant autour d'eux, regardes, tu as réussi, félicitations ! Mais, maintenant qu'il ne te reste rien, même plus la vengeance qui t'as conduite ici, que deviendras-tu ? Un tyran ? Un despote, détruisant les terres et engendrant toujours plus de morts, sans aucune pitié ? Regarde toi ! Ton jugement est altéré ! Tu pouvais changer ce monde, tu étais une des rares personnes pouvant le rendre meilleur, alors pourquoi ?Pourquoi as-tu pris nos frères, tué nos sœurs ? Pourquoi avoir massacré des enfants, exterminé des vieillards ? Qu'est devenue ta soif de justice, ton amour du prochain ? Les as-tu étouffé par vengeance seulement ? Réponds ! tonna-t-il.

L'homme ne répondit pas et garda le silence, visiblement très affecté par les dires de son opposant. Au bout de quelques minutes, il finit tout de même par se lancer, d'une voix emplie de rage, d'amertume et d'ironie :

— Et où était cette pitié dont tu parles, où était cette justice dont tu vantes le nom, quand les humains ont massacré mon peuple ? Quand ils ont pris ces enfants, ces sœurs, ces frères ? Où étaient ceux qui pouvaient rendre ce monde meilleur ? Je ne regrette pas mes actes, l'Ordre était corrompu, rongé jusqu'au sang par leur peur née d'une quelconque ignorance dont ils se repentent aujourd'hui. Où était ta vertu, quand des hommes en armes ont marché sur les corps sans vie d'autres êtres vivants ? L'Ordre aurait dû intervenir. C'était son rôle ! Et qu'à-t-il fait à la place ? Il a fermé les yeux et tourné le dos, parce-qu'il avait peur, et savoir cette race démoniaque disparu l' arrangeait. Et qu'as-tu fais pour les en empêcher ? Rien, tu n'as jamais rien pu faire. Tu es faible. Voilà la vérité.

Ils restèrent silencieux.

— Si c'est comme ça que tu vois les choses désormais, il ne reste plus rien de l'homme que j'ai connu et estimé par le passé.

Il s'avança vers son vieil ami, et leva son arme, se préparant à frapper l'homme à terre, qui n'arrivait plus à bouger sans souffrir. Soudain, il s'arrêta, et leva ses yeux blancs perçants vers la tour, où une détonation s'était fait entendre. Son visage se déforma d'effroi. L'homme à terre, quant à lui, afficha un sourire triomphant, et tenta en vain de se relever. Son opposant rengaina son arme, et fila à toute allure, le laissant au sol. Trois personnes, habillées comme les sombres silhouettes, arrivèrent en courant et relevèrent l'homme, avant de prendre la fuite. Une ombre grisâtre commença à se dégager de la haute tour, semblant stopper net toutes traces du chaos ambiant, et se répandant à une bonne allure. Bientôt, toute la ville fut figée dans cet écran gris, que ce soit les tristes soldats, les enfants en pleures, les corps laissés pour morts de par la ville, et tout s'arrêta.

Lyra hurla avant de se réveiller, en sueur. Elle regarda autour d'elle, et ne vit que la triste pénombre de sa chambre. La jeune fille était terrorisée, livide, et scrutait chaque recoin de la petite pièce avec anxiété, comme si quelque chose allait sortir de l'ombre. Sa fenêtre était ouverte, et claquait frénétiquement contre le mur, les bourrasques se déchaînant à travers l'ouverture.

Lyra se recroquevilla, avant de gémir doucement. Elle répétait quelques plaintes, qui se transformaient en une sinistre litanie qui se perdait dans la nuit.

Elle était perdue. Elle avait beau être chez elle, elle avait l'impression d'être étrangère à ces lieux. Chaque bruit la faisait sursauter, et la panique s'immisçait dans son esprit, dévorante, insidieuse.

Ce rêve... Cette détresse...Ce vide... Qu'est-ce qui n'allait pas ?Qu'est-ce qui avait transformé le songe en cauchemar ?Qu'est-ce qui avait tout fait basculer ? Quand... Quand sa vie était-elle devenue insupportable ?

Elle se plongea dans ses souvenirs. Elle ne se rappelait plus. Seul le chaos de la cité enflammée et inconnue se présentait à ses pensées. Elle devait aller plus loin. Elle devait trouver une explication. Une raison à cette douleur qui menaçait de la déchirer. Des larmes coulaient en abondance sur ses joues tremblotantes. Elle devait se souvenir... 

Oui...elle se rappelait de quelque chose... là d'où elle venait. Qui elle était... Et qu'est-ce qui la tourmentait...

***

Bonjour bonsoir, ici Desty152002 ! Je tiens tout d'abord à vous remercier de votre passage ici, en espérant que mon histoire vous plaise ! Je tenais juste à vous informer qu'une liste des personnages, des lieux, des monstres se trouve à la fin du livre, et je vous invite à la consulter si vous avez un doute sur tel ou tel personnage ou lieu (ils sont classés par ordre d'apparition, donc normalement pas de spoil !). Bien évidemment, vous pouvez aussi me le demandez, je vous répondrai avec joie :D

Bref, bonne lecture !

***

Petite note de fin, ce chapitre a été modifié. De fait, tout les commentaires datant d'avant le 27 avril 2018 portent uniquement sur le rêve.

L'Enfant aux yeux blancs - L'éveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant