L'Enfant aux yeux blancs - L'éveil

Chapitre 23

Elle se réveilla en douceur, dans son lit. Les songes ayant arrêté leur rite monotone, elle pouvait rejoindre son monde, une fois de plus. Elle resta immobile un long moment, contemplant le plafond. Aujourd'hui, elle reprendrait son épée, pour affronter quelqu'un. Elle se demandait quelle serait l'issue du combat. Allait-elle encore échouer ? Elle ne le savait pas. Elle soupira longuement, perdue dans les ténèbres de sa chambre. Le son se perdit dans les méandres du monde. Un monde qu'elle ne connaissait pas. Elle avait peur de le découvrir. Que lui réservait-il ? Quelle était la place d'une fille comme elle dans l'immensité de l'univers ? Que pouvait-elle accomplir ?

Elle s'assit finalement, les yeux perdus dans le vague, l'âme en perdition dans le sommeil dont la jeune fille venait de sortir. Elle s'étira longuement, avant de se lever. D'un pas tranquille, peu réveillée, elle se dirigea vers la fenêtre. Elle ouvrit les volets, et le monde se dévoila une fois de plus dans toute sa majesté : l'aube pointait, réveillant peu à peu la vie endormie, chatouillant de ses doigts de vent les plantes couvrant les vastes étendues. Bruyn s'éveillait, elle aussi. De part et d'autre de la ville s'élevaient des sons simples, symboles de la douce vie qui régnait en ces lieux. Une paix que rien ne pouvait briser. Cachée derrière les montagnes, la vaste ville semblait irréelle, protégée...

Lyra contempla le soleil, qui entamait sa course routinière, mais nécessaire. Les rayons inondaient son visage, chauds et agréables. Les fleurs s'ouvraient, accueillant avec plaisir la lumière régénératrice que leur léguait l'astre. Les couleurs s'épanouissaient, formant mille mosaïques sublimes ajoutant à la beauté des lieux.

Lyra s'habilla en vitesse, et descendit les escaliers de bois, rejoignant ainsi la cuisine, d'où se dégageait une délicieuse odeur de tisane. Damiant et Céleste étaient attablés, profitant avec retenue du contenu de leurs verres. L'enchanteur lui fit un signe de tête, la sylphe lui sourit. La jeune fille s'assit, et commença à préparer une tartine de beurre. Elle mangeait tranquillement, savourant le pain craquant. La porte s'ouvrit, et Ludwig arriva dans la pièce en baillant, avant de s'asseoir à son tour, visiblement fatigué.

Quelques minutes plus tard, Céleste se leva, avant de s'étirer :

— Profitez un peu de votre matinée. Nous vous évaluerons dans deux heures, déclara la sylphe, un sourire fatigué aux lèvres.

Les deux apprentis acquiescèrent en silence. Dès qu'elle eut terminé son frugal repas, Lyra se dirigea vers le cabanon dans le jardin. L'eau froide la réveilla complètement, et lui fit un bien fou. Une fois sa toilette faite, la jeune fille partit en direction de sa chambre. Elle fit glisser son regard d'un bout à l'autre de la petite pièce, et trouva ce qu'elle cherchait. Son épée, posée près de son lit, semblait l'attendre dans un calme morbide. Elle l'attrapa, et fit demi-tour.

La lame à la ceinture, Lyra se déplaçait en silence dans le vaste jardin. Le calme la berça doucement. Elle se sentait seule au monde dans l'air chaud du matin. Tout était calme, et seul le chant des oiseaux arrivait à ses oreilles, véritable rythme du silence. Tout était paisible. Le soleil la regardait de son œil chaleureux, les arbres semblaient danser à son approche, accompagnant le vent. Leurs feuilles étaient pareilles à une couverture, verte et magnifique. L'herbe était grasse, verte, regorgeant probablement de milliers de vies, tellement qu'on ne saurait les compter.

Lyra se sentait bien. Paisible. Calme. La journée commençait à peine, et tout était parfait.

Elle s'assit sur un banc, près de la petite fontaine qui glougloutait doucement. La jeune fille réfléchissait : le combat qu'elle devrait mener l'effrayait quelque peu. Elle allait affronter quelqu'un semblable à elle. Elle n'avait affronté que des monstres ou des gens bien trop forts pour elle. Elle espérait pouvoir faire jeu égal avec le jeune homme. Lyra se posait plein de questions à son sujet : Quel était son pouvoir ? Avait-il déjà voyagé ? D'ailleurs, d'où venaient-ils, lui et Céleste ? Tant de questions dont elle n'aurait pas les réponses dans l'immédiat.