Hier soir, sous la falaise, j'ai crié ton nom.
J'avais attendu la tombée de la nuit, là où le ciel brumeux semble se déverser dans l'océan, quand l'horizon disparaît derrière les volutes noires. Mes pieds écorchés foulaient le sable tiède, l'écume s'échouait à cadence régulière et j'entendais le chant dissonant des mouettes sur la berge. La surface de l'eau scintillait, reflétant la multitude d'étoiles qui miroitaient au dessus de moi. Je frissonnais un peu, le corps parcouru d'une fièvre doucereuse. La houle murmurait à mon oreille les relents glacés de tes anciennes promesses. Les nuages dans le ciel sombre avaient revêtu les traits de ton visage qui me hantait déjà. Ton parfum flottait dans l'air et me tournait la tête.Hier soir, sous la falaise, j'ai crié ton nom.
J'ai fait traîner chaque syllabes, m'enivrant de la mélodie âpre dont elles emplissaient l'air. Ton nom était une symphonie étonnement pure. Mais les notes ont chuté; elles se sont écrasées avec fracas, s'écroulant dans une plainte sourde.
Alors, j'ai hurlé à m'en déchirer les tympans, la gorge trouée des feux acides qui me rongeaient. J'avais les yeux fous, emplis de ces lueurs amères qui trahissent le désespoir. Le vent battait mes tempes et le sable me laissait des brûlures cuisantes; mon corps se cambrait sous des coups invisibles.Hier soir, sous la falaise, j'ai crié ton nom.
Debout face au vagues qui déferlaient, l'esprit embué, la poitrine noyée de rancœurs amères, j'ai voulu me plonger dans l'océan aux eaux tumultueuses; me laisser balloter par le courant, un liquide clair s'infiltrant dans ma cage thoracique pour en apaiser les plaies. J'ai voulu que mon corps diaphane flotte au dessus de l'eau, inerte, soulagé de l'ardeur folle qui le torturait. J'ai voulu me mêler à l'écume.Hier soir, sous la falaise, j'ai crié ton nom.
J'étais lasse... Les pas me coûtaient pour me jeter à l'eau.
Je me suis étendue sur le sable, raide et immobile. J'ai fermé les yeux.
Au loin, j'entendais un vague murmure: le vent avait emporté ton nom et déjà, le déformait, tandis que son sinistre écho se tordait sur la grève.