Illusions absurdes

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Les gorges fatiguées ont tué les évidences.

Ça avait été un coup bref et fatal; on riait, et le tintement faussement enjoué, contrefaçon cristalline des éclats fades, avait eu raison des derniers fragments de conscience. Les mains pressées avaient chassé les débris mornes qui gisaient au coin des lèvres; la réalité s'était écroulée.

Oh! Tous prétendaient la voir encore. Le monde, pour satisfaire la cohérence, s'était saoulé de raisons fausses; des illusions doucereuses habitaient les rêves. Une indolence   salvatrice avait pris possession des corps, y ancrait ses pulsions affadies.
Les existences livides avaient les relents âpres de la putréfaction que l'on camoufle- vainement.

La vérité, c'est que les mains étaient encore empruntes de ces élans tangibles que la réalité avait laissé fuire en expirant: son cadavre flétri animait les corps.
Mais qu'importe! Ils ne savaient pas. Pour le moment, ils sommeillaient encore, bercés de songes à demi vrais.
Ils ignoraient l'indicible : leur existences se noyaient dans une démence absurde.

AsphyxieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant