Le trajet jusqu'à chez lui fut le plus long de toute sa vie. Il était obligé de prendre le bus, un bus plein de monde, son sac plein de bagages à la main, alors qu'il se battait pour garder le peu de dignité qu'il pouvait avoir, et ne pas pleurer devant tout le monde.
La voix n'avait fermé son clapet longtemps, à peine Nathan monté qu'elle avait de nouveau repris son babillage, se moquant encore une fois du bleuté.
Faible et lâche. Bravo.
Il l'ignora, parlant avec son voisin. Il tentait tant bien que mal de sourire, mais sa voix déraillait à chaque fin de phrase, ses yeux avaient du mal à rester ouverts, sa gorge se nouait, dénouait sans arrête, donnant la nausée au pauvre bleuté. Il conclut la conversation avec le voisin, faignant le sommeil, mais à peine les yeux fermés, la petite voix reprit de plus belle.
Je parie qu'il ne voulait même pas te parler.
Nathan l'ignora, se mordant la lèvre. Lui qui pensait qu'une fois qu'il aurait quitté l'équipe, il se serait débarrassé de cet horrible grincement.
M'ignorer ne changera rien à la vérité. Tu es faible et lâche.
Faible.
Lâche.
La voix éclata de rire, un rire qui glaça le sang de Nathan. Un rire effroyable, et le bleuté se demandait pourquoi cette voix le haïssait autant.
Je ne traduis que ce que les autres pensent de toi. Cet homme assit à côté de toi regrette sûrement d'avoir pris ce bus là, ou cette place-là.
'C'est faux.' Pensa Nathan.
Tu en est sûr ? Imagine que tu te rencontres, est-ce que tu te trouveras intéressant ?
La bleuté ne trouva rien à rétorquer. Que ferait-il s'il rencontrait une copie conforme de lui ? Comment se trouverait-il ?
Faible, lâche.
D'autres mots n'auraient pu le décrire mieux. Il s'enfonça dans son siège, mal à l'aise et gêné d'avoir à imposer sa présence à son voisin. Il aurait tellement aimé disparaître à l'instant, et devenir invisible. Mais il était bel et bien présent et impossible à dissimuler. Il n'avait nul part où se cacher. Nul part.
Faible. Lâche. Tu veux te cacher maintenant ? Lâche.
'Laisse moi tranquille.' Pensa Nathan en se mordant la lèvre pour s'empêcher de pleurer.
Tu veux pleurer ? Oh, tu n'as encore rien vu, petit. Que va penser ta mère quand elle te verra rentrer plus tôt que prévu ? Que pensera-t-elle de son héros en plastique qui est revenu plus tôt que prévu ?
Une larme menaçait de couler mais le bleuté l'effaça rapidement, d'un geste furtif, inquiet. La voix avait raison. Sa mère allait être déçue de lui, c'était certain, et rien qu'à la pensée de ses yeux noir pleins de déception lui donna envie de vomir, de crier, de pleurer. Qu'avait-il fait ?
Tu es un désordre complet.
La voix s'était mise à soupirer.
Tu t'es laissé envoûté par Mark et sa motivation qui te disais que tu pouvais toute faire. Mauvaise influence. Tu es faible, rien ne peut jamais y changer quoi que ce soit.
Elle fut interrompue par l'arrivée du bus à destination. Au final, Nathan n'avait pas réussi à dormir le moins du monde, et avait juste laissé plus de place à la voix dans son coeur, alors qu'elle riait et se moquait de sa faiblesse. Il marcha, son sac en main jusqu'à sa maison.
Faible.
Lâche.
Il avait le coeur lourd. Qu'étaient en train de penser ses coéquipiers à cet instant ? Lui en voulaient-ils.
On en veut toujours à un lâche.
Se préoccupaient-ils de ce qui lui arrivait ? Pensaient-ils à lui ? Se demandaient-ils pourquoi il étaient parti ?
Ils s'en fichent de toi. Ils t'en veulent juste parce que tu as été lâche.
Mark était-il toujours aussi souriant ? N'avait-il pas le poids du monde à supporter en tant que capitaine ?
Il aurait eu moins de poids à supporter si tu étais resté.
'La ferme ! La ferme ! La ferme !' Hurla intérieurement le bleuté.
La voix se mit à rire de plus belle, maléfique, venimeuse.
Allons allons.. Tu n'aimes pas la vérité ? Je m'en doutais. Si tu pouvais la voir en face, tu n'aurais jamais décidé de rejoindre l'équipe.
Nathan arriva devant sa maison, et là, il prit peur. Il ne voulait pas voir la déception lisible sur le visage de sa mère. Et son père ? Lui qui disait toujours que son fils était un prodige, comment réagira-t-il quand il découvrira qu'il n'était qu'un lâche bon à rien ?
"Hors de question." Souffla le bleuté pour lui même et pour la voix.
Je vois.. Le petit Nathan se rebelle.
Le bleuté se mordit la lèvre, et changea la direction qu'il prenait. Il déambula avec son sac encore longtemps avant de trouver un petit hôtel où il s'installa, mal à l'aise.
Nathan, sache que ,
quelque soit l'endroit où tu vas,
quelque soit la décision que tu prends,
tu es et tu resteras,
faible,
lâche.