Wolves (BMR Edition)

Chapitre 2 (partie 3) : En quête de vérité

J'ai très peu dormi et, surtout, très mal. Lassée de ressasser en vain mes pensées, je finis par me lever sur le coup des 7 heures. Je prépare du café, mais j'ai l'estomac trop noué pour avaler quoi que ce soit de consistant. Pour la énième fois depuis la veille, je me replonge dans les lettres de mon père.

Je brûle d'envie d'en savoir plus sur cette fille. Je sens en moi un besoin grandissant de la connaître, de la voir, de lui parler. Sébastien a raison sur un point : peut-être serais-je mal accueillie. Peut-être même qu'elle refusera de me voir. Mais si je n'essaie pas, toute ma vie je penserai à elle et à cette occasion manquée de créer des liens avec cette sœur mystérieuse.

Je ne suis pas une mauvaise personne et je ne suis pas responsable des décisions de mon père. Je suis sûre que je pourrai la persuader de m'accorder un peu de son temps. Nous sommes sœurs. Ça compte quand même, non ?

Je n'ai jamais mis les pieds aux États-Unis, mais je sais que je m'en sortirai. J'ai une adresse. Je commencerai par là. J'arriverai bien d'une façon ou d'une autre à remonter vers Sora et sa mère. L'ennui, c'est que je ne peux pas partir maintenant. Je dois m'occuper de l'héritage, d'autant plus que je n'ai toujours pas décidé de ce que je ferai de la maison de mes parents. Si j'entreprends un tel voyage, je vais devoir m'absenter pendant plusieurs semaines. À supposer que Sora accepte de me parler, je ne compte pas rester quelques jours pour ensuite repartir. Non. Je veux apprendre à la connaître. Je veux tisser des liens avec ma demi-sœur.

L'idéal serait que je démissionne de mon poste. Je pose mon préavis et je serai ensuite libre de partir. D'ici quelques semaines, je toucherai mon héritage et, avec l'argent de mes parents, je pourrai subvenir à mes besoins lors de mon voyage.

Mon plan me semble parfait. Reste à savoir ce que je vais faire de Sébastien. Je n'ai aucune idée du temps que je serai partie. Si Sora refuse de me voir, mon séjour risque fort de tourner court. En revanche, si elle se montre réceptive, je n'exclus pas de rester auprès d'elle plusieurs mois. Je devrais m'inquiéter de ce qu'il adviendra de mon couple. Je tiens à lui et je suis sûre de l'aimer. Pourtant, à ce jour, notre relation me parait moins importante que le besoin de retrouver ma sœur.

Je songe soudain à l'autre personne que je vais laisser en France : ma grand-mère paternelle. Elle est la mère de mon père et peut-être lui a-t-il parlé de cette fille rencontrée aux USA ? Je ne veux cependant pas croire qu'elle était au courant durant toutes ces années et qu'elle ait caché le secret de papa. Malgré mes doutes, je me dois de lui poser la question.

Nos rapports n'ont jamais été très chaleureux. Mamie nous a toujours porté très peu d'attention à Manon et à moi, même du temps où Papy était vivant. Elle était présente à l'enterrement de ma famille et c'est tout juste si elle a eu un geste compatissant envers moi. Peu m'importe de toute façon, je n'ai pas besoin de son affection.

Attrapant mon portable, je sélectionne son numéro dans le répertoire. Il est encore tôt, mais je suis sûre qu'elle est déjà debout.

— Allo, retentit sa voix à l'autre bout du fil.

— Mamie, c'est Chloé.

— Bonjour chérie, tout va bien ?

Les personnes qui posent cette question ont-elles réellement conscience des mots qu'elles emploient ?

— Pas vraiment, mais je ne t'appelle pas pour pleurnicher. J'ai découvert quelque chose au sujet de papa, lui lancé-je sans plus de cérémonie.

Je ne tiens pas à passer des heures au téléphone avec elle. Je veux juste obtenir des réponses à mes questions.

— Tu savais qu'il avait une fille cachée ? enchaîné-je.