#4 La chasse

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Voilà maintenant une semaine, que je n'avais pas remis les pieds à l'apprentissage. Mon père avait conclus qu'il n'expliquerait sous aucun prétexte sa décision si soudaine. Même maman ne semblait au courant de rien. Elle ne cessait de faire des remarques et des sous-entendus pour mieux comprendre la situation. Il ne se démontait cependant toujours pas. Je passais le plus clair de mon temps avec Câline. Picel, lui, continuait à aller à l'apprentissage.
Câline et moi étions d'ailleurs sur le chemin de sa maison.

-Hey! s'écria Câline en l'apercevant avancer vers nous.

-Ho! Venez boire un jus de cristaf à la maison! J'ai plein de choses à vous dire!

Après avoir brièvement salué sa mère, dont l'estaf est une chauve-souris, nous montèrent dans sa chambre, en ne renversant aucune goute de jus sur le bel escalier en or. Elle ressemblait énormément à la mienne, nous étions tellement amis étant petits, qu'il avait voulu faire correspondre sa chambre à la mienne, quand il a déménagé avec sa mère et ses soeurs dans leur luxueuse maison. Elle était évidemment orange -quoique plus foncée que la mienne-, et sur chaque mur prônait d'innombrables étagères remplies de livres. Picel s'obstinant à ne se séparer d'aucun ouvrages qu'il possédait, sa collection datait approximativement de dix ans de lecture.
Je fus tout de suite à l'aise, grâce à la ressemblance flagrante à ma chambre. Je me jetai alors sur la couette en laine de mouton.

-C'est tellement doux! m'exclamais-je, en extase.

-On voit que tu te sens vite chez toi! rigola Picel en s'asseyant à côté de moi.

On ne pouvait pas en dire autant de Câline, qui avait rarement eu la "chance" de découvrir cette chambre. Elle s'installa maladroitement sur une chaise roulante en cuir. 

-Bon, dit-elle en croisant les jambes, ce qui lui donna un petit air effrayant de  conspiratrice, normalement tu arrives chez toi vers 18 heures, non? Parce que là tu es arrivé à 19 heures en même temps que nous! Dis nous ce qui t'as mit en retard.

Picel et moi échangèrent un regard mi-amusé, mi-inquiet : Câline donnait froid dans le dos quand elle voulait savoir quelque chose. Mais ça me confortait dans l'idée qu'elle allait devoir bientôt avouer, qu'elle aimait plus que bien l'estafien!

-Et bien justement, répondit Picel, je suis pas à l'heure parce que j'ai été "obligé" à faire quelque chose, et je voulais vous le dire.

Nous tournèrent la tête vers lui de concert, de plus en plus intéressées. C'est que le châtain savait parfaitement ménager son suspense!

-Nixtine et moi, (Câline se redressa d'un coup puis toussa faussement) quand on a fini l'apprentissage de la journée, on a suivi Chaussin... Je ne voulais pas le faire mais Nixtine m'a entraîné! Et puis, je me suis peut-être un peu laissé faire...

Je sentais d'ici la jalousie de mon amie, c'était tellement drôle !

-Mais c'est pas ça le sujet ! Bref, on l'a suivi jusqu'au salon, et on l'a entendu discuter avec le roi ! Et c'est là que ça devient intéressant ! Ils parlaient de mettre en place une sorte d'apprentissage géant pour tout le village ! On écoutait à fond la discussion, jusqu'à ce que le valet aux cheveux verts a sursauté en nous découvrant cachés derrière l'escalier. Le roi nous a ordonné d'approcher, faut avouer qu'à ce moment là, je rêvais de me transformer en souris, et puis il nous a fait promettre de ne pas le crier sous les toits. Ah ! Et Chaussin en a profité pour mettre en avant son travail de notre petit apprentissage.

Picel reprit quelques respirations après son monologue tellement il l'avait débité rapidement.

-Eh mais, je vous ai pas dit ! s'exclamât-il.

EstafiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant