#5 Le flaire

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Alife ne pouvait évidemment pas encore voler, mon père l'abritait donc sous son aile. J'étais aux anges! La première chasse de ma sœur faisait remonter les souvenirs de la mienne (où j'avais dû essentiellement apprendre seule, étant donné que j'avais une estaf terrestre), et surtout la première fois que j'avais croqué dans un cristaf! J'en avais l'eau à la bouche, rien que d'y penser. Mes moustaches remuèrent, et me remontèrent à la réalité. Je ne pourrais malheureusement pas assister aux exploits d'Alife, puisque, de un, je ne pourrais pas voler pour les suivre, de deux, j'allais être plus encombrante qu'autre chose, et de trois, je devais rejoindre Câline, ou plutôt, la lémurienne. Avant de me lancer à sa recherche, je repérai l'emplacement de ma robe pour pouvoir la retrouver dans trois jours. La mésange bleue s'élevait dans le ciel, dans le but de trouver un endroit propice pour apprendre le vol à ma sœur. L'aigle royale portait toujours la coccinelle bleue sous son aile. Je donnai un coup de museau dans la poitrine de mon père pour lui signaler que j'allais partir. Ma mère descendis, se posa sur ma tête, et me picora l'oreille, signe d'avertissement, un peu comme si elle me disait:

"Fais attention, ne galope pas trop vite, et ne nous rejoins pas trop tard."

Ils s'envolèrent ensuite tous les trois, me laissant seule au bord de la falaise. Je me sentais beaucoup plus confiante seule en étant animal, le renard étant plutôt solitaire, contrairement aux oiseaux. Je commençai à me concentrer sur mon odorat. Une flopée d'odeurs merveilleuses et étouffantes m'assaillirent. Tout d'abord le bois mouillé, la mousse douce, les champignons, puis la déliceuse  odeur de cristaf, piquante et sucrée. Et enfin toutes les senteurs corporelles des animaux alentours. Toutes ces flagrances normalement inaccessibles en étant une simple estafienne! Ma queue en frétilla d'excitation.

Je décidai de repérer Alife, étant donné que je n'avais pas eu beaucoup de temps pour sentir la coccinelle bleue. Je la repérai sans mal, son odeur d'estafienne différée très peu de sa senteur animale. C'était souvent comme ça, quand un estafien s'identifié complétement à son estaf. Très rares étaient les estafiens qui ne possédaient pas les mêmes effluves que leur estaf. La truffe toujours en l'air, je repérai un écureuil, Picel, sur un arbre devant moi, au-delà de la falaise. J'aurais bien aimé aller le rejoindre, et faire une course ensemble, moi sur terre et lui d'arbres en arbres (que j'aurais gagnée, sans trop m'avancer), mais j'avais le sentiment que Câline me jetterait des glands à la tête, si je me pointais plus en retard que je ne l'étais déjà. Je la trouvai enfin, après avoir divagué entre pomme de pins et serpents, à côté de sa mère et de Bennou. J'imaginais le calvaire qu'allais devoir vivre la suricate -la mère de Câline-, pour apprendre le vol à une coccinelle. Enfin, moi aussi, j'avais du apprendre plus ou moins seule, mais il me semblait plus facile d'apprendre à galoper en solitaire que de voler. Ils se trouvaient tous les trois vers le milieu de la forêt, sur la première branche d'un pin (soit dit en passant, avec une odeur exquise), sûrement pour habituer Bennou à l'altitude.

Je fis donc doucement le tour de la falaise, pour rejoindre les bois. La joie d'avoir à traverser la forêt en renarde l'emporta, et mes pattes se mirent à accélérer. Recevoir le vent sur le pelage était extrêmement agréable, ce qui me fis fermer les yeux quelques secondes, profitant de ce répit où je n'avais plus besoin de parler, de m'expliquer, de m'énerver, de...

-KIIIIIIIIK!

Je freinai d'un seul coup, en enfonçant mes pattes avant dans le sol. Je papillonnai des paupières, complétement déboussolée, et vis un rat gris protégeant une souris blanche, juste à mes pieds. Oh! Par mes ancêtres, j'avais failli les écraser! Le rat sembla me rouspéter après en brandissant son petit poing. J'inclinai mon encolure pour signifier que j'étais désolée. La souris se dégagea de derrière l'estafien et pointa un cristaf que j'avais ratatiner en marchant dessus. Le rongeur s'énerva encore plus et me fis bien comprendre que j'allai devoir leur en rapporter un. Je fis une dernière courbette d'excuse, puis me dirigeai vers l'orée de la forêt pour leur retrouver un cristaf.

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⏰ Dernière mise à jour : Apr 11, 2018 ⏰

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