Chapitre 6 : Mina

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Lorsque je refermai la porte d'entrée derrière moi, la voix de ma mère retentit.

- Mina ! Est-ce que c'est toi ?

J'accrochai mon blouson sur le porte-manteau de l'entrée. Mes gestes étaient ralentis par la fatigue.

- Ouais, qui veux-tu que ce soit ? Répondis-je gentiment d'un ton las.

Ma mère vint à ma rencontre et balaya ma question d'un geste de la main.

- Comment s'est passée ta journée ?

J'haussai un sourcil, surprise et parcouru ma mère du regard. Elle était bien trop apprêtée.

- Eh bien, c'était super... pourquoi est-ce que tu...

Elle m'arrêta d'un signe.

- Nous avons des invités, ma chérie.

- Oh...

Cela expliquait ses habits et son soudain intérêt pour la journée que je venais de passer.

- Ton père a invité les nouveaux voisins à dîner.

Je réprimai un soupir.

- En fait je comptais me coucher tôt. J'ai eu une longue journée, et une autre s'annonce demain.

- Ah, tu retournes travailler à l'atelier ?

Sa voix sonnait faux, comme si elle espérait que je lui retourne une réponse négative. Elle ne voyait toujours pas ce travail d'un très bon œil.

- Seulement l'après-midi.

-Oh, pourquoi, tu en as déjà marre ?

Je me crispai.

- Maman, demain je prends ma matinée, c'est l'anniversaire d'Alex.

Son sourire se fana.

- Ah...

Il y eut un grand silence, et elle m'attrapa soudainement le bras en changeant de sujet.

- Mange au moins avec nous avant d'aller dormir, ça ne te fera pas de mal de voir de nouvelles têtes.

Avant que je ne puisse répliquer, elle me traîna de force dans le salon, où mon père était assis sur un fauteuil face à un couple. Je m'avançai, résignée, et les deux invités se levèrent pour me saluer. Quand je vis le visage de la femme, je me figeai.

L'homme me tendit amicalement sa main, me forçant à sortir de ma torpeur.

- Louis, se présenta-t-il en souriant.

Je lui serrai lentement la main, en tentant de ne pas trop fixer sa femme.

- Mina, répondis-je, quinze ans, j'adore le café.

- Quinze ans ? S'étonna l'homme sans s'intéresser particulièrement à ma dernière remarque, tu fais plus âgée.

- J'aurais seize ans dans un mois, continuai-je en souriant.

Cet homme me plaisait bien, il n'y avait aucune condescendance dans son ton, il me parlait comme si j'étais son égale alors qu'il devait bien avoir la quarantaine.

Il céda la place à sa femme, qui me sourit à son tour mais à laquelle je retournai un sourire plus crispé.

- Julia, se présenta-t-elle également/

Je retins le « Je sais » qui me brulai les lèvres et me contentai d'un léger hochement de tête.

- Bien, intervins ma mère, je vais sortir une bouteille de champagne.

Café au laitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant