Chapitre 3 : Mina, le Starbucks

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Dans le Starbucks, la queue était longue. Beaucoup trop longue.

Je piétinais sur place en grinçant des dents et en soupirant d'un air impatient. Pourquoi fallait-il qu'il y ait du monde le seul jour où j'avais besoin que ce ne soit pas le cas ? Paul devait déjà être en train de m'attendre...

A ma droite, installé sur une table avec ses parents, un petit garçon babillait en jouant avec un morceau de plastique. Il faisait pas mal de bruits, ce qui lui valait les regards appuyés de tous les autres clients présents dans le café. Cela ne semblait pas le gêner le moins du monde, au contraire il faisait un grand sourire à chaque personne qui le regardait et semblait ravi d'être le centre de l'attention. Ces parents, sourires gênés figés sur les lèvres, lui intimaient doucement de faire moins de bruit. Cela m'arracha un sourire d'amusement.

L'insouciance de l'enfance me manquait, nous n'avions aucunes responsabilités, à part celle de prendre soin de nos peluches et d'essayer de manger proprement, et on s'émerveillait pour un rien. C'était une époque bénie.

J'avais perdu mon âme d'enfant depuis longtemps déjà, beaucoup trop tôt, mais cela ne m'empêchait pas de pousser un soupir attendri à chaque fois que je voyais un bébé.

Le petit garçon se figea et se mit à regarder quelque chose se trouvant derrière moi avec une intense concentration presque comique. Fronçant les sourcils, j'allais me retourner pour voir ce qui l'intriguait tellement lorsqu'on me bouscula violemment. Je trébuchai en avant et, emportée par mon élan, je percutai une vieille dame qui se dirigeait tranquillement vers la sortie, un café à la main. Mon poids lui fit lâcher son café qui chuta et se répandit en bonnes et dues formes sur nos chaussures et nos bas de pantalons. L'accident ne passa pas inaperçu, et de nombreuses personnes se mirent à nous fixer. C'était à mon tour d'être le centre de l'attention.

La vieille dame ouvrit d'abord la bouche sans pouvoir rien dire, sonnée, avant de tourner la tête vers moi, les sourcils froncés.

- Mademoiselle ! Regardez ce que vous venez de faire !

Je ne savais pas quoi dire, les mots semblaient ne pas vouloir sortir de ma bouche.

- Je... je suis désolée, je n'ai...

Son regard assassin me dissuada d'en dire plus.

- Vous vous rendez compte ? Tout ce gâchis ! Heureusement que j'ai pris le café le moins cher !

J'ouvris mon sac à main.

- Je vais vous le racheter, ou vous rembourser.

Elle renifla d'un air méprisant, et je vis à son regard qu'elle était trop fière pour accepter.

- C'est la moindre des choses ! Mais je refuse. Au revoir, mademoiselle, et au plaisir de ne jamais plus vous croiser.

Et elle me laissa là, la tête haute, tandis que je ne pus que rester figée pendant de longues secondes, mouchée. Ayant du mal à réaliser ce qui venait de se passer, je rangeai lentement l'argent que je lui avais tendu et tournai les talons.

Je tombai alors nez à nez avec un jeune homme qui fixait la flaque de café d'un air impassible. A sa position, je compris que c'était lui qui m'avait bousculé. Ma journée avait très mal commencée, et si je n'avais pas pu me rebeller contre mes parents, il était hors de question que je me laisse faire par un inconnu. Alors, je sortis les pieds de la flaque et lui fit face, les poings sur les hanches.

- Tu n'aurais pas pu faire attention, non ? T'es content j'espère ! Le spectacle t'a plu ?

Ma voix laissait transparaître ma colère, ce qui me valut des regards désapprobateurs de pas mal de clients que j'ignorai royalement.

Café au laitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant