Elisabeth

Chapitre 1 - Lac

J'étais avec elle au bord du lac cette nuit là, l'odeur de la cigarette et de son parfum Chanel me rappelait les vacances en Islande cet automne. Elle portait une veste en jean usée et un pantalon de soie noir qui la mettait à l'aise. Elle parlait de tout pendant que je ne pensais à rien. Bien que nous sommes en été, il faisait froid ce soir là. J'aurais aimé écourter son discours mais la douceur de ses paroles lentes et marquées ne me le permettait pas. Moi ni personne n'aurait pu imaginer combien j'aurais aimé lui dire je t'aime. Au fond de moi des larmes de joie d'être à ses côtés coulaient avec délicatesse, et je ne pouvais m'empêcher de poser mon regard sur ses lèvres obscures et rondes. J'ai envie de vous conter mon histoire à partir de ce moment, remettons-nous dans le contexte alors :

- Chéri, tu m'écoutes ? fait Elisabeth.

-Oui mon coeur, j'écoute, mais tu sais à quel point je suis fatigué ce soir, répondis-je.

-Peut-être que c'est moi qui te fatigue à te parler, je dois surêment être une emmerdeuse.. dit-elle, irritée.

-Oh non, tu ne vas pas recommencer s'il te plaît, je n'ai pas envie qu'on se dispute ce soir, cela va finir en drame et ce n'est pas bon pour nous.

-Ouais, ouais, tu as probablement raison. 

Cette conversation relève d'un froid, je décide donc de me lever et de me diriger vers le bord de l'eau. Je l'embrasse sur le front en passant.

-Où vas-tu ? demanda-t-elle, toujours aussi curieuse que depuis notre rencontre.

-Nager, ai-je rétorqué, enlevant mon tee-shirt à manches longues rayé blanc et bleu et m'empressant d'aller dans l'eau.

-Maintenant ? dit-elle, surprise. Tu ne penses pas qu'il soit trop tard pour nager ? Et puis l'eau doit être froide! 

Je continue de marcher, faisant semblant de ne pas l'entendre. (Il ne peut pas être plus froid que mes paroles, me fis-je remarquer). Je ne fais pas attention à la température dans laquelle mes pieds viennent de pénétrer et d'un saut net je plonge dans l'eau noire qui reflète la lumière du feu. Ce cri que je viens de pousser intérieurement me fait mal, l'eau glaciale parcours les traits de mon corps tout entier, poignardant chaque nerf, chaque muscle, chaque centimètre de peau et c'est sans saignement que je ressort la tête de l'eau, les yeux fermés de douleur, après avoir nagé 20 mètres. Bizarrement, je souris à Elisabeth, qui ne me regarde plus, car elle est déjà retournée lire Shining de Stephen King. J'ai cru apercevoir ses yeux levés au ciel quant à mon exploit aquatique, mais je n'en suis pas sûr. Peu importe, je nage pendant 5 minutes au moins, et regagne le large étant frigorifié. Pas un mot ne sort de la bouche de Lisa (dérivé d'Elisabeth, plus court) plongée dans son roman, j'attrape donc la serviette de bain dans le panier posé par là, et me sèche rapidement. Après m'être rabillé de mon bermuda gris et de mon tee-shirt des Beatles, je lui suggère de rentrer au chalet que nous avons loué pour la semaine. Elle accepte d'un mouvement de tête innocent, et éteint le feu dont les braises alourdissent l'atmosphère. Nous prenons tout deux nos affaires et nous dirigeons vers la maison, qui est située à 5 minutes du lac. Je sens alors une douce et rassurante chaleur se glisser entre ma paume et mes doigts immobiles, les courbes de sa main que je connais si bien laisse apparaître un sourire sincère sur mon visage et un bref frisson dans mon avant-bras. Sans la regarder, je lui serre la main d'une infirme force, et l'entraîne avec moi vers le chalet.