TROISIÈME CHAPITRE

2.6K 239 18
                                    


L'éclairage violent des lampadaires accentuait mon mal de crâne. Impossible de garder les yeux ouverts. Une main sur le front, les paupières fermées, je poussai un soupir. Les images de mon agression continuaient de me hanter et me donnaient envie de hurler, de pleurer, de... tout casser. Je n'arrivais toujours pas à y croire.

— Vous n'allez pas être malade, au moins ? s'enquit le policier. On peut s'arrêter quelques minutes si vous voulez.

— Quand bien même ce serait le cas, je n'ai plus rien dans l'estomac, lui assurai‑je.

Je n'osais pas ouvrir les yeux, de peur de découvrir mon reflet dans le rétroviseur. Je ne voulais pas voir ce qui avait changé physiquement chez moi, en dehors de mes cheveux et de mes yeux.

— Pouvez‑vous m'en dire plus sur votre enlèvement ?

— J'ai été traînée de force dans une camionnette il y a... en fait, je ne sais pas exactement combien de temps, racontai‑je, la gorge nouée.

Des siècles, me semblait‑il.

— Vous pourriez décrire votre agresseur ?

— Je me souviens de la froideur de ses doigts, de sa voix si troublante. Le genre de voix qui vous pousse à faire n'importe quoi. Je vous jure, il possédait cette faculté de m'hypnotiser. Il a déchiré ma culotte et il m'a...

Violée. Mon cœur se serra et la terreur écrasa mes côtes. Terreur mêlée à une profonde colère et à une bonne dose de honte. Mon corps se crispa alors que des détails sordides me revenaient à l'esprit. Sans pouvoir me retenir, j'éclatai en sanglots. Je serrai les bras autour de ma poitrine dans l'espoir d'oublier ses mains sur moi. Mais cela ne servit à rien. Je sentais toujours son étreinte.

— On en discutera au poste, soupira le policier.

Je hochai la tête. Nous pénétrâmes une rue peu éclairée. Le policier se gara le long du trottoir et me lança un sourire contrit.

— Je passe un appel, j'en ai pour une seconde.

— Faites donc.

Il décrocha le portable accroché à sa ceinture et composa un numéro.

— C'est moi. On a un code 100... Ouais, le central m'a contacté il y a une heure à propos d'un type qui aurait vu un truc bizarre. Il avait raison... pour l'instant, ça va, c'est calme... OK, je passe te prendre.

Après avoir raccroché, il se tourna vers moi.

— C'était mon coéquipier. Je pense qu'on va vous emmener à l'hôpital avant d'aller au poste.

— C'est quoi, un code 100 ? demandai‑je.

— Rien d'important. Vous savez, on a un nombre incalculable de codes dans la police, je ne vous raconte pas à quel point c'est difficile de tous les apprendre par cœur.

Il essayait sûrement de m'arracher un rire. Peine perdue.

— Vous parlez de quel type ?

— Vous savez, il y a des fous partout à Los Angeles. Selon lui, il aurait rencontré une bête...

Je croisai son regard appuyé, comme s'il s'attendait à une réaction de ma part.

— Je vois.

En réalité, je ne comprenais pas le sens de ses paroles. Ça m'était égal, dans le fond.

— Je sais que c'est ridicule de vous demander ça, mais vous allez bien ? continua‑t‑il.

— J'ai besoin d'un verre.

Sang à Crocs (sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant