Douceur acide d'adolescents

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Aloïs

Ca fait sûrement un moment que j'aurais dû te dire cela, mais c'est ô combien difficile de mettre des mots sur un sentiment. Est-ce vraiment un sentiment d'ailleurs, que ce sortilège terrrible, ce poison qui s'infiltre aussi bien dans le corps que dans l'âme, qui t'empêche de dormir, qui te poursuit jusque dans tes rêves, qui te fait délirer et t'ôte l'appétit et la raison ? Est-ce que ce n'est pas de la folie plutôt, que ces sueurs froides, cette fièvre incessante, ces mille et un tourments qui me torturent sans arrêt ?

Ne t'inquiète pas pour autant, je ne t'écris pas cette lettre pour te faire la liste des symptômes d'une maniaco-dépression, non, c'est l'amour que je te dépeins là. Parce que oui, je t'aime bon sang, je t'aime comme ce n'est pas permis, à ne plus pouvoir respirer quand je focalise mes pensées sur toi. Ton sourire si lumineux que face à toi, même le soleil semble pâlichon, tes yeux d'un vert si pur, avec lesquels les forêts les plus denses ne peuvent rivaliser, ta joie de vivre qui imprègne l'air alentour comme une eau de Cologne trop lourde, ton rire étincelant, qui me secoue de l'intérieur. (Avec toi je me sens shaker.)

C'est peut-être ton prénom qui a fini de me rendre dingue. Aloïs. Le dire c'est une caresse, l'entendre c'est un murmure. A la fois piquant et si doux, touchant et unique, comme toi.

Tout ces moments si agréables passés en ta compagnie... A tes côtés, les cours de physique n'étaient plus une torture, mais un retour à l'innocence enfantine que tu sais donner à toute situation. Les longues discussions entre midi et deux, avant le cours de théâtre, sur l'intérêt de l'art dans les enjeux politiques, le fonctionnement injuste du monde moderne, les incroyables avancées de la science en matière de robotique, d'informatique, de biochimie. Ces profondes réflexions, à la limite de l'incohérence, que toi seul sais formuler, ta capacité d'écoute pour mes théories les plus folles, ta patience et tes éclats de rire quand je ne trouvais pas de formulation politiquement correcte pour mes phrases. Ce n'était sûrement rien pour toi, tu ne dois sans doute pas te rappeler qui était ton binôme pour cette année de terminale, après tout, tu as tant de formidables amis, que pourrais-je t'apporter de plus ?...

Tu vois le fameux manque des fumeurs ou des alcooliques ? Eh bien je l'expérimente, mais sur une drogue ô combien plus douce et plus saine : toi. Et si tu savais ce dont je serais capable pour avoir ma dose... Cette lettre par exemple. Qui écrit encore des lettres à notre époque ? Et pourtant depuis toujours, l'encre et la feuille sont les meilleurs compagnons de l'épris d'amour. Ecrire, encore et toujours. Peut-être les mots sont-ils plus vrais, plus sincères, plus réfléchis aussi, lorsqu'ils sont sortis de notre esprit et couchés sur le papier. Et puis y a t-il de calligraphie plus belle que celle de ces trois mots, qui veulent dire tout et son contraire, le mal comme le bien, l'addiction comme le soulagement, le courage comme la crainte, l'envie de tout révéler comme le désir de tout garder secret.

Je t'aime.

Une phrase déclarative, et qui semble pourtant attendre une réponse. Mais ne t'inquiète pas, ce n'est pas ce que je veux de toi. Lis juste tout cela, et tente de comprendre. Aloïs, tu es une personne formidable, je sais que quoi que tu fasses, tu trouveras toujours le bonheur.

A bientôt ou à jamais, qui sait, le destin peut nous réserver de bien belles surprises...




P.S.: Si tu n'as toujours pas deviné, auquel cas je devrais vraiment m'inquiéter, c'est moi, Nola ;)

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Un style totalement différent, je vous l'accorde, ô combien plus drôle à écrire toutefois. Et à lire ?

Je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant