1- Pourquoi ?

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Un peu après les pas de ma mère dans le couloir, le réveil sonne. Je cherche à l'aveugle mon téléphone pour arrêter ce bruit persistant, et profite de ces dernières minutes sous la chaleur réconfortante de mon lit. On est seulement que le 8 septembre et je ne veux pas affronter ce léger courant d'air, froid, ni affronter ma mère qui tente de "m'aider", ni les gens et ni la réalité de la vie dès le matin. Enfin trouvé ! J'entrouvre suffisamment mes paupières pour éteindre mon alarme et de pouvoir replonger dans un autre rêve, loin d'ici. Ainsi je m'accorde quelques minutes et je m'éloigne dans ce berceau de l'inconscience quand...

- Mia ! Debout maintenant !

Pourquoi ? Pourquoi faire ? Énervée, je me lève d'un bond et m'habille en quelques minutes en prenant mon jean noir de la veille et un t-shirt propre de mon armoire. Puis...Elle est de retour. Cette boule dans mon ventre qui surgit chaque matin au même moment, devant ce miroir. Je déteste ce corps. Je me déteste. J'observe mon reflet, en remontant mon regard petit à petit jusqu'à mes yeux, Je reste là, le regard fixe sur moi. C'est dans ma tête que défilent ces mots, ils hurlent. Ça ne s'arrête jamais...Je ferme les yeux, j'inspire et expire profondément...

- Mia !

Encore ! Je décide de sortir de ma chambre et d'affronter ma mère qui décidément ne me laissera pas tranquille ce matin.

- Ah ! Enfin Mia tu es là, aller dépêche toi ! me dit-elle en me voyant arriver dans la cuisine. Je ne réponds rien et laisse le silence s'en charger.

- Non mais regarde ta tête ! Un passage à la salle de bain s'impose ma chérie. rajoute-elle le sourire aux lèvres, amusée de voir mes cheveux en pagaille et mon visage encore endormi.

Je lui rends maladroitement son sourire avant d'approcher la tasse de thé à mes lèvres. Le silence s'empare doucement de la pièce et devient lourd. N'étant pas d'humeur je ne m'attarde pas et sous son conseil je me dirige vers la salle de bain. Comme chaque matin : je me passe rapidement de l'eau sur le visage, me brosse les dents et réunit mes cheveux blonds en queue de cheval. La tête dans la lune, je récupère mon sac et m'apprête à sortir de chez moi; quand les mots de ma mère m'arrête dans mon élan :

- Chérie ! N'oublie pas que tu as rendez vous ce soir après l'école. À 17h !

Et si, je voulais l'oublier. Encore une chose à affronter... Les écouteurs dans les oreilles, sans attendre, je dévale le long escalier avec le rythme entrainant de la musique. J'inspire un grand coup devant la porte qui me relie à ce monde effrayant; puis je me décide à l'ouvrir et fonce tête baissée affronter l'extérieur.

Je marche vite, les yeux rivés sur le trottoir et ce sentiment de mal-être qui m'oppresse. Autour de moi les gens passent, les voitures défilent et les bâtiments se glissent derrière moi. Cette boule au creux de mon ventre est permanente et s'intensifie à chaque regard posé sur moi. J'accélère le rythme de mes pas et me concentre durement sur la musique qui parcourt mes oreilles. Après une vingtaine de minutes de marche, je me retrouve au milieu des lycéens tout le long de la fin de mon trajet, une masse d'adolescents écervelés, jusqu'à devant la salle de cours. Je m'appuie contre le mur et je reste silencieuse. Quand deux filles viennent me voir, je les reconnais, elles étaient dans mon collège. Que veulent-elles ? Elles sortent leur bon discours du "Ahhh...ça fait longtemps !" et du "C'est fou ! Je savais pas qu'on était dans la même classe !". Elles aussi, ont peur de la solitude alors elles mettent leurs fiertés à deux balles de côté, pour rester avec une fille comme moi. Elles sont pathétiques mais moi aussi, je joue le jeu. Je ris fort avec elles, je leur souris; du moins je me force de leur faire mon plus beau sourire. Nous coulons en plein milieu d'un océan d'hypocrisie en attendant un semblant de changement de situation. Quand le professeur arrive et tout le troupeau d'élèves rentre et chacun trouve une place pour s'asseoir. Les heures de cours s'enchainent sans que j'y sois très attentive et j'essaie tant bien que mal de rattraper quelques heures de sommeil.

Aujourd'hui est encore une autre journée à subir la vie.

Quand la Lune rencontre son SoleilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant