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Le lendemain matin, très tôt Benoît quitta son appartement, sans rien dire à sa mère. Il avait pris la lourde décision de rester vivre avec Léa. Il voulait gouter de nouveau à ce plaisir de partager le même toit que Madame Guérin, ou plus communément Vermandois.

Benoît tourna la poignée de la porte, et fit irruption dans la pièce. Au même moment, Léa se leva et le regarda, les yeux dépeints.

— Qu'est-ce que tu faisais ? lui demanda-t-il.

— Rien. Je dormais.

— Très bien.

— C'est quoi ça ? demanda Léa, surprise de le voir déposer ses bagages sur le sol.

— Mes affaires.

— Et tu comptes faire quoi avec ?

— Bah, à ton avis ! ? Je suis venu vivre avec toi, t'accompagnant jusqu'à​ ta mort.

Elle tourna la tête, répugnée.

— Pourquoi tu affiches cette tête ? Il y a quelque chose qui ne va pas ?

— Tu es sérieux ! ? Non mais...

Elle ferma les yeux, les rouvrit, marqua une pause et reprit :

— Tu es vraiment sérieux ! ? Tu as tué ma mère, ma meilleure amie, tu as tenté​ de tuer mes enfants, tu m'as emmené de force dans ce trou à rat, je suis obligée de dormir sur ce sol tout collant, mes dents sont sales parce que je n'ai pas brossé ma bouche depuis deux semaines, j'ai les cheveux tous secs, la peau grasse...

— Je m'en bats les reins, Léa... !

— ..., tu décides de vivre avec moi jusqu'à ce que tu me tues... Et tu me demandes s'il n'y a pas quelque chose qui ne va pas ?

Benoît esquissa un mince sourire et se servit un verre d'alcool.

— Est-ce que toi, tu vas bien, Benoît ?

— Parfaitement. Et je vais t'avouer quelque chose de fâcheux, Léa.

Elle baissa la tête et sa tignasse brune retomba devant son visage.

— Vas-y ! lança-t-elle. J'ai entendu tellement d'aveux de ta part que je m'attends à tout. Attends, laisse-moi deviner... Tu as tué Cédric ?

— Non, Léa, ne sois pas pressée. Pour l'instant, ton mari n'est pas un problème pour moi. Parce que je t'ai toi. Mais... Lorsque j'aurais assez d'entendre parler de lui, je le buterai.

Léa ferma les yeux et des larmes coulèrent le long de ses joues rosies. Sans doute était-elle en train de se préparer à accepter cette affreuse image qui s'apprêtait à se dessiner sous ses yeux.

— Arrête de pleurer, Léa, je n'aime pas ça... Tu sais que te voir pleurer me fait souffrir.

Elle leva la tête et planta son regard dans le sien avec une lueur d'espoir.

— Ah, il te reste une part d'humanité, dit-elle.

— Mais non, Léa, quand tu pleures, ton cœur s'apaise. Mais moi je veux qu'il soit lourd...

Il la fixa droit dans les yeux et ajouta d'une voix terrorisante :

— ... Jusqu'à ce que tu ne puisses plus le supporter.

— Tu ne voulais pas me voir pleurer à tes pieds, non ?

— Hum... C'est vrai. Tu as raison. Je le voulais. Mais il se trouve que tu ne pleures pas à mes pieds pour que je puisse t'humilier en compensation. C'est dommage ! Parce que j'aurais préféré​ que ça se passe ainsi. Mais vu que non, tant pis. C'est soit ça, soit rien.

UNE VIRÉE EN ENFER [ TERMINÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant