Partie 4

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8:50

Voilà quelques minutes que nous sommes dans le noir, enfin plus tant que ça depuis que j'ai sorti mon smartphone et utilisé la torche intégrée. D'ailleurs j'étais plutôt fière de démontrer l'utilité de mon petit bijou de technologie jusqu'à que mon cher voisin se fit Le devoir de me rappeler qu'il existait des lampes de poche à moins de 600 euros..
J'ai capitulé à ce moment là.

"Je ne sais pas pour vous mais je ne tiens plus sur mes jambes"

Avant la fin de ma phrase, je m'étais laissé glisser contre la paroi de l'ascenseur jusqu'à une position plus confortable. Heureusement que j'avais choisi un tailleur pantalon pour l'occasion. Sinon, j'étais condamnée à rester debout jusqu'à ce que mort s'en suive.
Avec mon téléphone posée face contre sol, la lumière blanche suffisait à éclairer notre cellule de fortune. La pénombre avait au moins cette qualité de rendre l'ambiance moins froide et plus conviviale.

"Maintenant j'aurais l'air bête de rester debout."

S'asseyant de manière à ne pas froisser son costume, il enlève sa veste et la dépose près de lui aussi délicatement que s'il s'agissait d'un nourrisson.

"C'est rare pour un homme d'être si soigneux."

"Ou peut être que vous n'êtes entourés que de rustres."

"Peut-être bien."

"Mais vous avez raison, je dois admettre que le genre masculin n'est pas réputé pour cela et c'est regrettable. J'ai eu une éducation très stricte, voilà tout."

"Ah je vois.."

Ces mots sont sortis de ma bouche sans grande conviction. Un court silence d'en suivit jusqu'à ce qu'il le brise à nouveau.

"Mais sans indiscrétion, vous allez vous présenter comme ça, à votre entretien?"

Il me pose la question tout en décrivant mon voile avec son index, à croire que prononcer Le mot lui aurait fait pousser la barbe.

"Ça s'appelle un hijab, ou un voile si vous préférez. Mais pour répondre à votre question, oui, j'espère que mon futur patron s'intéressera plus à ce qu'il y a dans ma tête que sur mes cheveux."

"C'est bien utopique de votre part. Mais audacieux, je l'admets. Ne croyez pas que j'ai quelque chose contre les musulmans. J'ai juste une aversion pour tout type de religion. Imam, prêtre ou même le pape. Je trouve stupide de s'identifier à une religion au travers de vêtements ou de babioles supposées représenter une sainteté. Quelle foutaise."

"Je vois, vous êtes plutôt du genre scientifique. L'évolution, Darwin.. les singes, tout ça quoi"

"Je suis juste pragmatique. Darwin était un ignorant comme ceux qui clamaient que la terre était plate. Mais la religion et la foi sont les plus belle escroqueries de toute l'histoire. Les gens ont besoin de croire à quelque chose, pour vivre, manger, respirer et même mourrir. Le fait de ne pas avoir de réponse à leur questions existentielles les rendent fous. Alors un jour, un bon gars s'est dit qu'il pourrait faire croire à tout le monde que tout cela a un sens. Qu'il y a un Grand manitous et un "après". Que cette vie n'est que la surface de quelque chose de bien plus solide et concret. Et bien sûr, tout devient plus facile. On accepte les malheurs, et la perte des proches est adoucie. Que ça me fait rire quand les gens s'exclament 'Il est mieux là ou il est.' Et qu'est-ce qu'ils en savent? Personne n'est revenu à ce que je sache. Et les gens sont devenus obsédés par des soi-disant signes. Un buisson qui brûle et les gens s'exclament 'Le seigneur nous parle!' Quelqu'un échappe à un accident 'Dieu lui a donné une seconde chance!' Tout cela n'est que pur hasard."

J'en ai connu des réfractaires mais j'ai rarement vu autant de scepticisme réuni en une seule personne. Je crois que même si il avait vu de ses yeux Moise fendre les eaux, il aurait crier à l'illusion d'optique. Je trouve bien plus facile de débattre avec un partisan d'une autre religion que d'avoir affaire à un anti-théologien. Dieu guide qui Il veut mais lui, j'ai l'impression que c'est peine perdue. Enfin, qui ne tente rien n'a rien. Seigneur, guide mes paroles parce que la, j'ai affaire à du lourd..

"Donc, si je suis votre théorie, "nous" les pratiquants en général, ne sommes que des cerveaux lobotomisés par une espèce de folie générale et contagieuse. Vous croyez réellement que la vie n'a aucun but? Que nous avons été posés là sur Terre pour une durée indéterminée et Le jour de notre mort, tout s'arrête et qu'il n'y a plus rien?"

"Et pourquoi devrait il y avoir un but?"

"Tout simplement parce que toute chose en a un, c'est un fait. Chaque organisme vivant sur Terre a une utilité propre, cela a bien été prouvé scientifiquement concernant les plantes, les insectes et les animaux, alors pourquoi en serait il autrement des humains? Pourquoi tout le monde prendrait place sur ce grand puzzle et pas nous?"

Vu son silence, je pense que j'ai fait mouche. Je souris intérieurement quand un rire s'échappe de ses lèvres tel un ressort qu'on aurait tenu trop longtemps entre ses doigts.

"Mais dites moi, C'est une analogie digne de l'école élémentaire!"

En parlant de mouche, elle vient de se faire aplatir.
Mais avant que j'ai pu rétorquer quoi que ce soit, il continue.

"Mais je ressens que vous croyez vraiment en ce que vous dites et c'en est presque touchant. Mes paroles n'ont pas le but de vous blesser, je respecte votre foi mais ne me demandez pas d'y croire. Tout du moins, je me dois quand même de vous remercier."

"Me remercier? Mais pourquoi?"

À suivre..

Derrière les portes Où les histoires vivent. Découvrez maintenant