Le réveil sonne. Je regrette de ne pas pouvoir lui tirer dessus alors je fais ce que je veux pour l'éteindre de ma main. Ce qui veut dire, dans mon jargon : l'envoyer valser contre le mur d'en face. Je l'ai lancé tellement fort que le mur s'est creusé à l'endroit de l'impact. Je n'ai toujours pas appris à contrôler ma force, en quarante ans. C'est génial !
_ C'était quoi ?, se réveille Kara en sursaut.
Elle me surplombe depuis le lit. Moi, j'ai dormi par terre car ils n'avaient pas prévu que la « seconde en chef » de Tobias s'incruste au pot de départ.
_ Le réveil a foncé contre le mur pour l'embrasser. Le cœur a ses raisons.
Kara me regarde et fait une moue amusée.
_ Tu dois reprendre ton cachet, me dit-elle. T'es redevenue toi-même.
Je pivote sur le côté et chope dans le coin la boîte qui contient les pilules vertes de Berty. J'en avale une et me redresse pour m'adosser contre le mur. Au bout de quelques secondes, les picotements s'estompent et Kara me fait un signe de tête pour me dire que je repris ma couverture.
Elle se lève et me laisse seule, tandis qu'elle se dirige à la salle de bain.
Je repense à ce que Kara m'a dit hier avant de parler du plan pour m'infiltrer dans le vaisseau.
Élise avait une rampe de lancement. Elle avait une putain de rampe de lancement ! J'ai passé près de vingt ans à la traquer dans tout le nord et je n'ai pas été assez attentive pour remarquer une rampe de deux-cents mètres de haut allant jusque dans les nuages !
Je me hais. Je me hais. Je me hais. Je me hais.
Mais Kara pense qu'elle était dans le sol, camouflée par une trappe la recouvrant ou dans la crevasse d'un canyon.
Elle n'avait pas à la camoufler, plus personne n'est allée dans le Nord depuis au moins une centaine d'années ! Alors à part peut-être des Hazes non modifiés, des empâleurs ou des Arbis, je vois pas qui aurait été la voir en disant : « votre rampe bouche la vue depuis ma maison ! Coupez-la ! ». Non, personne ne l'aurait signalé. Et même si quelqu'un l'avait fait, Élise ou Clark aurait très bien pu éliminer cette personne avant même qu'elle ait fini sa phrase.
Les chiffres sur le réveil sont encore lumineux. L'amour est plus fort que tout, on dirait.
4h12. Kara ne devrait plus tarder. Et quand on parle du loup !
_ Tiens, heureusement, notre taupe n'a pas eu trop de mal à le cacher.
Elle me tend un sac blanc presque mat. Au travers, je peux voir des vêtements noirs et un masque. Une phrase est écrite dessus, en blanc très net : « propriété de la milice ».
La guerre est finit. Ils devraient changer de nom !
Je l'ouvre et sors tout l'attirail.
_ Ça, c'est l'équipement que tu auras à mettre lorsque on aura décollé. Garde-le avec toi.
Je glisse le paquet dans mon sac à dos, entre mon neuf millimètre et mon Wheelock.
_ Pourquoi on a besoin d'un masque?
Je l'extirpe du paquet et le regarde, j'apprends à le connaître. Le masque représente le visage d'un homme dont les traits et les mimiques sont grossièrement exagéré. Il me ferait peur si je ne savais pas que ça m'aiderait à survivre. Le masque est mon ami !
_ L'air d'Atorn et l'air de la Terre sont très différents. Les masques nous protègent des bactéries dues à la quatrième guerre mondiale qu'il y a eu là-bas.