Jeudi 23 février 2017
Le même schéma se poursuit de jour en jour ... La seule chose qui sort un peu de l'ordinaire dans cette vie monotone sont les entrevues avec la psychologue de l'école. Je commence à m'y faire, malheureusement, je n'avais pas eu le temps de prendre mon journal par faute de temps. Ce qui compte, c'est qu'elle ne m'en a pas tenu rigueur.
Vendredi 24 février 2017
Je me sens comme un volcan endormi. Bientôt, toute ma rage explosera et rien ni personne pourra m'arrêter. Heureusement, j'allais revoir la seule femme qui semblait m'accorder de l'importance. Comme à chaque début de séance, elle engagea le dialogue :
« Avant de commencer, je reprends ce qu'on a dit hier : tu ne parles plus car tu te sens pas à l'aise dans les mots via l'écriture. Pour toi, les paroles ne valent rien : l'éternité se trouve dans les écrits. Alors tu écris pour t'échapper, pour repousser les limites qu'on te fixe, de rêver d'une vie meilleure et peut-être écrire ton destin. Tu préfères alors vivre par procuration de ces écrits. Ma question est la suivante : comment en es-tu arrivé là ? Qu'est-ce qui t'as poussé à préférer les feuilles aux hommes ?
-Vous êtes en train de me demander comment et surtout pourquoi je préfère un objet à un être humain ? Je vous pose plutôt cette question : comment pouvez-vous faire confiance à un être qui serait prêt à vous trahir pour servir ses propres intérêts ?
-Je veux bien comprendre qu'on t'a fait du mal Léo mais veut-tu vraiment que quelqu'un t'aide ? Je n'en ai pas l'impression.
-Dans mon monde de rêve, je pourrais manger et vivre une vie comme tous les autres enfants de cette école. Dans mon monde de rêve, je ne serais pas obligé de parcourir les rues de Nouméa pour échapper à un enfer quotidien... Dans mon monde de rêve, j'aurai de parents qui m'aime, mais ce n'est pas le cas et vous savez pourquoi ? Parce que je ne vis pas dans ce monde que je décris et que la réalité est bien plus affreuse. Je suis seul face à une vie que personne ne mérite d'avoir mais malheureusement cette vie qui paraît si obscure et bien la mienne. Je me fais frapper de jour comme de nuit, je m'endors en pleurant et me réveille en ayant la boule au ventre. Donc qui n'aurait pas besoin d'aide ? Je préfère terminer la séance ici... »
Samedi 25 février 2017
Voilà maintenant un peu plus d'une semaine que je tiens ce journal. Je ne sais pas si cela est sain de se remémorer les mauvais côtés de notre vie. J'ai envie de tout quitter ; pas seulement mon foyer, mais tout : cette ville et cette île perdues dans le Pacifique ! Je veux fuir tous ces problèmes et m'en éloigné le plus possible.
J'ai l'impression que je vis pour une seule personne : ma psychologue. Il n'y a qu'elle qui compte pour moi. Rien que quand elle pose son regard, je me sens rassuré. Avec elle, je suis en sécurité, comme si rien ne pouvait m'atteindre. Quand je suis à ses côtés, je n'ai plus de problèmes. Je rêve de nombreuse fois qu'elle soit la mère que je n'ai jamais eue. J'aimerais tant pouvoir l'appelée « maman ». Une larme coule le long de ma joue après avoir écrit ce mot que je n'ai jamais prononcé.
Dimanche 26 février 2017
Je suis à bout... Je ne comprends pas comment on peut vivre comme je le fais. J'ai même l'impression de ne pas avoir eu d'enfance, comme si j'étais né adulte. Les problèmes que je rencontre ne devraient pas être ceux d'un enfant de onze ans. Je voudrais tellement avoir une vie normale comme n'importe quel camarade de ma classe...
Encore un jour avant que je la revois. Ça commence à en devenir une véritable obsession. On peut trouver cela fou et enfantin de s'attacher aussi vite à une personne mais imaginez-vous être seul pendant des années, sans personne sur qui compté. Ce manque de compagnie devient tellement pesant qu'il aurait pu me mener dans une profonde décadence morale. Je suis pauvre en amour et en affection. En plus de cela, je ressens le regret qu'on mes parents à me voir vivre. J'en viens à me demander si je ne suis pas qu'un accident dans leur vie.
Lundi 27 février 2017
J'ai l'impression d'être un boulet que mes parents traînent sans arrêt, ou alors c'est peut-être l'inverse. Je ne sais plus si je suis la victime ou non. C'est avec un petit coup de déprime que je me dirige vers la salle de rendez-vous où la psychologue m'attend. Comme à son habitude, elle commença :
« Alors Léo, comment s'est passé ton week-end ?
-Que préférez-vous que je vous dise ? Que ça s'est bien passé ou que je ressens comme une sorte d'addiction à nos entrevus quotidiens pour m'échapper de cet enfer ?
- Comment ça ?- Avez-vous déjà ressenti comme une attraction avec une autre personne ? Je ne parle pas d'amour, loin de là, mais j'ai comme ce besoin de me sentir protéger, c'est normal après tout, je ne suis qu'un enfant !
-Léo ... J'entends tout à fait ce que tu me dis, mais entre ces murs, je ne suis que ta psychologue. Tu es un garçon formidable et je m'attache énormément à toi, mais je ne peux pas remplacer ta maman. Le temps nous a pris de court, je ne serai pas présente demain, crois-tu qu'on puisse se voir mercredi après-midi ? Pas comme un rendez-vous pour parler de ton quotidien mais plus comme des amis ?
-Est-ce possible que je ne prenne pas mon carnet ?
-Naturellement, mais est tu en train de me faire comprendre que tu voudras me parler de vive voix ?
-C'est exact.
-Cela me touche profondément, je te félicite d'avance pour ton effort. À mercredi. »
Dans quoi t'es-tu embarqué Léo ?! Je suis complètement inconscient de ce que je fais. Je serai ridicule et je vais sûrement trop en dire en peut être me mettre en danger ...~
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Début d'une vie
General Fiction"Si je devais résumer ma triste enfance, un seul mot serai capable de décrire ma vie: désespoir. Cela parait un peu rabat-joie et certain dirais même que je ne cherche qu'a attiré l'attention, mais pensez-vous vraiment que j'en suis capable ? Oh non...