Chapitre 4.

1K 108 116
                                    

Le lendemain matin, alors que le soleil daignait à peine percer la nuit avec ses rayons si lumineusement destructeurs, les deux jeunes hommes, qui n'avaient pu dormir que pendant une durée limitée, étaient déjà debout, chacun de son côté. Des brides de leur conversation précédente restaient bloquées dans leurs têtes, et surtout leurs derniers mots -après lesquels ils avaient sombrés dans un sommeil confortable, blottis l'un contre l'autre comme si leurs vies en dépendaient-. Cependant, ils reprirent ce qu'ils appelaient silencieusement leurs comportements "normaux" -leurs masques-, en tentant de dissimuler la gêne qui s'était infiltrée entre eux. Car, malgré tout ce qu'ils pourraient prétendre, ils savaient pertinemment que quelque chose de sérieux s'était déroulé la veille, quelque chose qu'aucun des deux ne pourrait oublier, quelque chose qui dépassait les simples mots. Mais, cette chose, ils avaient beau la chercher au plus profond d'eux-mêmes, ils n'arrivaient pas à mettre la main dessus. Peut-être parce-qu'à force de chercher trop loin, ils ne voyaient plus ce qui était juste sous leurs nez.
C'est pourquoi, ce matin, ils ne mangèrent pas ensembles, et restèrent éloignés, l'un enfermé dans son bureau, et l'autre en train de rassembler ses affaires -sa manager l'ayant prévenu qu'elle revenait le chercher, après quasiment une semaine de cohabitation-. Quand la sonnette retentit, le châtain descendit en courant, puis s'enfuit comme un voleur en ne laissant qu'un petit mot sur la table basse, avant de dire à la jeune femme de démarrer et de partir prétextant que le photographe était occupé. Mais ce qu'il ne sut pas fut que le photographe en question le regarda partir en soupirant, n'ayant pas réussi à lui parler malgré son souhait de le faire.
Pour le modèle, le trajet en voiture fut silencieux, mais bizarrement, il se surprit à se sentir soulagé par rapport à l'ambiance de la matinée dans la demeure lumineuse, sous le regard mi- rassuré, mi- protecteur de la manager. Mais il se sentait aussi -et surtout- frustré, pour une raison obscure. Comme si les deux garçons ne s'étaient pas tout dit, comme si le château de cartes des sentiments restait incomplet. Un simple, petit, insignifiant papier manquait, mais cette simple chose suffisait à faire s'effondrer la construction si complexe. Et ce détail énervait le plus grand, qui aimait les choses lisses et bien faites. Alors oui, certes, il se l'avouait, c'était -en partie- de sa faute si ils n'avaient pas pu en parler, mais il n'était pas le seul à blâmer, l'autre s'étant enfermé bien avant qu'Oikawa ne soit réveillé. Il avait, par ailleurs, regretté d'avoir trouvé le lit froid en émergent, se demandant si les choses se seraient passées différemment si ils s'étaient tout deux levés étreignis dans les bras de l'autre -et en y repensant, il s'avoua que cette sensation lui manquait-.
Au bout de quelques heures de réflexion, il décrétâ qu'il en avait assez, et que réfléchir comme ça le salait plus qu'autre chose. Il tentât diverses choses pour se changer les idées, tel que regarder des films, chercher de nouveaux looks avec ses vêtements, jouer du piano -il pratiquait de plusieurs instruments-, mais chaque tentative se solda par un échec. Frustré, encore une fois, fut le seul mot qui pu le décrire à ce moment là. Finalement, la fatigue vint à bout de lui, contre le fait qu'il ne réussit qu'à rattraper son sommeil manquant, qu'en respirant le pull piqué à Iwaizumi -en se faisant une fois de plus la remarque d'à quel point il aimait cette odeur si singulière- qui était embaumé de chez de l'homme en question. Oikawa s'aperçut tout juste avant de sombrer que lui aussi, sentait l'Iwa-chan -Dieu que cela le manquait de l'appeler comme ça, mais il ne voulait pas gêner le photographe-, et il sourit à cette pensée.

Mais l'autre garçon n'en menait pas plus large, vérifiant quatre fois sa maison en espérant trouver une affaire à Oikawa, qui lui donnerait un prétexte pour revoir son ami d'enfance. Il cherchait partout, sous le lit, le canapé, dans le placard, et déplaçait tout les meubles à la quête de ne serait-ce qu'un tout petit détail -un baume à lèvre lui suffirait-. Et il se frappa mentalement en se traitant d'idiot quand il remarqua qu'il était passé un nombre incalculable de fois devant la note laissée par le squatteur -il n'y avait que lui pour dessiner une petite tête d'alien en guise de signature- sans la remarquer. Il la prit, et la déplia lentement tout en s'asseyant sur son canapé -ou plutôt en se laissant tomber dessus-. Il parcourut lentement la lettre des yeux, en détaillant chaque phrase, chaque mot, chaque lettre. L'écriture d'Oikawa avait changé aux cours des années, devenant plus griffonnée, mais elle gardait un certain charme, qui reflétait bien son propriétaire, et le brun esquissa un sourire à ce constat. Dans ce message, le châtain remerciait Iwaizumi d'avoir pris soin de lui, lui disait qu'il était content de l'avoir revu, et s'excusait d'être parti aussi rapidement. Il y avait également, en bas de la page, en tout petit, un numéro crayonné avec écrit "appelle moi quand tu veux 👽".Le photographe enregistra directement le numéro, mais n'osa pas l'appeller, ne trouvant aucun prétexte pour le faire -il n'avait pas envie de passer pour un mec bizarre auprès du modèle- mais se promis d'en trouver rapidement un. Il reposa délicatement le papier sur la table, et remonta dans la chambre pour changer les draps et laver son linge. Ou du moins, c'est ce qu'il voulait faire, mais s'enroula plutôt dans les-dits draps qui portaient un mélange de sa propre odeur et de celle du mannequin. D'ailleurs, son odeur était, elle aussi, restée la même, dégageant une atmosphère douce et sucrée. Cela fit remonter des souvenirs enfuit dans sa mémoire, des souvenirs qu'il gardait précieusement pour lui, comme un dragon défendrait un coffre remplie de pièces d'or. Il ne s'endormit pas, mais resta comme ceci, immobile, plongé dans son monde privé à lui et Oikawa, pendant plusieurs heures.

Remember, Cap'tain. [IwaOi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant