KuroTsuki (partie 2)

Lundi 27 Février

Réveillée par un mauvais rêve, je ne me voyais pas me rendormir avec la possibilité d'en faire un autre, sachant que je me leverais dans une heure. J'en ai profité pour pouvoir me préparer à la salle de bain avant que ma soeur Kiryuuin (de son vrai prénom Sarah) ne l'occupe et ne me laisserait plus le temps d'y aller.

Depuis quelques semaines, je ne soulignais plus mes yeux de crayon noir ni ne mettais mes lentilles grises pour lesquelles j'avais un intérêt particulier, il y a encore trois mois. Le tout ne ferait qu'assombrir mon regard, plus que ce qu'il ne l'était déjà. Alors j'ai laissé mes paupières et mes iris noisette nus face au monde extérieur.

Auparavant, je les aurais sûrement portés avec la sensation que j'étais protégée, qu'ils agissaient comme un bouclier et que les autres ne me voyaient pas. J'étais naïve. Maintenant je tentais seulement de me donner une contenance et de faire semblant d'aller bien. Les seules choses que j'appliquais sur mon visage étaient une couche de mascara sur mes cils, une crème et un anti-cerne sous mes yeux pour essayer de couvrir les traces qui trahissaient mon manque constant de sommeil et par la même occasion, ma douleur.

Je suis sortie de la pièce puis descendue à la cuisine et je me suis préparée un simple bentō avec du riz, quelques carottes crues coupées en tranches et des boulettes de bœufs épicés. J'avais perdu l'appétit depuis un certain temps alors quand quelque chose me faisait envie, je ne m'en privais pas.

Pendant ce temps, j'ai bu une tasse de lait chaud en guise de petit déjeuner. Et j'ai profité de ce silence que le monde nous offrait dans l'obscurité de l'hiver. J'ai observé la rue blanche par la fenêtre, assise sur le comptoir, la neige semblait s'être arrêtée.

Ce n'était pas dans mes habitudes, de m'asseoir sur le comptoir. Mais beaucoup de choses n'étaient pas dans mes habitudes avant ces trois derniers mois. Désormais, j'écrivais, des chansons. Seulement pour moi mais aussi pour le groupe. Je dessinais aussi beaucoup plus souvent, j'écoutais moins de musique mais surtout moins de the GazettE, je passais beaucoup de temps à marcher dehors après les cours, je chantais même chez moi et parlais de temps à autre avec mes parents.

Il y a trois mois, je m'étais rapprochée de ma sœur à cause sa relation amoureuse avec le cousin de Ryuu qui était également serveur au café où KuroTsuki, notre groupe, jouait. Elle m'accompagnait souvent là-bas quand nous avions des répétitions. Depuis que nous étions devenus plus proches, mes parents m'accordaient de l'importance. Évidemment pas autant qu'à mon idole de soeur et pas au point de dire que nous étions une belle famille harmonieuse et soudée mais suffisamment pour que je remarque une légère différence et me sente un peu plus à l'aise dans ma propre famille. Étonnement, je m'ouvrais à eux au moment où je me fermais au reste du monde.

La maison a commencé à doucement s'éveiller avec la présence de ma mère, qui m'a rapidement salué d'un mouvement de tête que je lui ai rendu. Nous vivions dans la même maison sans vivre réellement ensemble.

Je suis remontée dans ma chambre pour me remettre à l'esprit notre nouvelle chanson, que nous avions composée sans Ryuu, avant de partir au lycée. Sans m'en apercevoir, j'ai chantonné les paroles tout le long du chemin jusqu'au portail.

Auparavant, venir en cours ne me posait aucun problème, c'était une habitude comme une autre. Cependant, ça avait changé. Maintenant c'était devenu un supplice, je me sentais prisonnière de ces bâtiments. Dès que je pouvais m'en échapper, je n'y manquais pas. Trop de souvenirs douloureux étaient ancrés dans ces murs. Je ne le supportais plus. Mélodie, ma tante, professeur et ancienne secrétaire qui avait laissé sa place à Nolan (son ex copain si je pouvais le qualifier comme tel), passait moins de temps qu'avant au lycée alors je la croisais moins souvent. Aussi, je l'évitais un maximum et me rendait rarement chez elle. Parfois notre complicité venait à me manquer mais ces moments nostalgiques ne duraient jamais bien longtemps.