Parfois je me demande ce qui restera de moi quand je serai morte. Paradoxalement, je pense qu'il restera un sourire. Oui, je pense que quand les gens penseront à moi, ils souriront. Et sans le savoir, ils reproduiront ce qui m'a détruit. Ce sourire. J'en ai peur et j'en ai besoin à la fois. Je l'aime et je le déteste. Il est peut-être la seule personne qui me considère comme quelqu'un de digne d'intérêt et pourtant il me détruit doucement. J'ai l'impression que j'existe uniquement au moment où il est présent près de moi. J'ai l'impression que si je le détruit je ne serai plus rien. Je suis la fille du sourire. Si il meurt, je ne suis plus qu'une fille. Je suis la victime du sourire. Si il meurt, je ne suis plus qu'une victime. Je suis moi parce que mon bourreau existe. Quand il mourra car selon toute probabilité, il mourra avant moi, j'enverrai ce livre à une maison d'édition. Peut-être l'acceptera-t-elle, peut-être pas. Mais je l'aurai fait. Je n'ai pas besoin que vous lisiez ce livre pour détruire le sourire et moi par la même occasion. Non. Il suffit que je parle. Que j'écrive. Que quelqu'un sache. Si j'envoie ce livre à une maison d'édition et si s'en est une respectueuse, quelqu'un le lira. Et je serai libre. Ce que le sourire m'aura laissé sera libre. Si elle me dit non, je mettrai ce livre sur internet avant de mourir. Ce n'est pas pour moi. Moi je serai libre. Non. C'est pour les prochaines victimes du sourire. Quand j'oserai montrer ce livre, le sourire aura une nouvelle victime. Ce ne sera pas le même sourire ou du moins pas la même personne qui le portera, ce ne sera pas la même victime. Mais toi, nouvelle victime, je t'offre mon amitié même si elle a peu de valeur. Si tu veux te reconnaître car il est possible que tu ne sois pas encore au courant que tu as été choisi, répond à ces quelques questions concernant la personne que tu suspecte d'être le sourire.
-Cette personne agit- elle de la même façon en ta présence et en celle des autres?
-Cette personne fait- elle très attention à l'image qu'elle donne?
-Cette personne est- elle capable de te faire faire n'importe quoi sans que tu ne t'en rende réellement compte?
-Es-tu dépendant(e) de cette personne?
-Si cette personne était le sourire, serais-tu capable de la dénoncer?
Les réponses que tu aurais dû donner si cette personne était vraiment le sourire sont les suivantes:
-Oui, le sourire agit différemment en ma présence et en celle des autres.
-Oui, le sourire fait très attention à l'image qu'il donne.
-Oui, le sourire est capable de me faire dire n'importe quoi sans que je m'en rende réellement compte.
-Oui, je suis dépendante du sourire.
-Non, je ne suis pas capable de dénoncer le sourire.
Voilà les clés de ta survie, il faut que tu réussisses à changer cela. Prends y toi le plus tôt possible car quand la situation se sera installée, il sera trop tard. Bonne chance, prochaine victime.

Le sourireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant