Ce dernier était organisé en douze carrés bordés de pommiers et de rosiers tige Queen Elisabeth sur plus d'un hectare. Deux serres permettaient la culture des bulbes de jacinthes, amaryllis, narcisses, tulipes et la plantation de semis. Plus de 400 rosiers, des tubéreuses et des agapanthes les entouraient. Frantz fut ravi d'un tel spectacle et encore plus quand il vit le vent faire voler les longs cheveux noires d'Hélène, rendant encore plus féerique sa vision d'une créature céleste au milieu de ces multiples plantes.
Le spectre du Passé remit sa main sur l'épaule de votre arrière-grand-père alors qu'il serrait les poings à cette rencontre qui avait, selon lui, détruit sa famille. Pendant ce nouveau voyage, il se revit réprimander Hélène et lui interdire de nouer un quelconque lien avec le jeune officier allemand. D'autres scènes se présentèrent, lui montrant sa fille tout tenter pour ignorer ce Frantz. Déterminé et inexorablement attiré par la jeune femme, celui-ci venait régulièrement la voir à Chenonceau. Il réussit au fil des années à trouver un chemin vers elle. Ainsi, une amitié les lia. Cependant, l'intendant identifia bien vite une nouvelle lueur dans les yeux de sa fille qu'il n'avait plus vue depuis le décès de son épouse. Elle était de nouveau vivante. Soudain, le fantôme stoppa le défilement sur une soirée d'été étoilée de 1942. Les deux jeunes gens avaient ainsi 20 et 24 ans. Votre arrière-grand-père observait maintenant Hélène marchant doucement dans le jardin de Diane de Poitiers.
A droite du château, la structure de ce parterre de 12 000 m2, gardée par la Chancellerie, maison de l'intendant de Catherine de Médicis, offrait deux allées perpendiculaires et deux autres en diagonale délimitant ainsi huit grands triangles de pelouse décorés de délicates volutes de santolines. Les terrasses surélevées, qui protégeaient le jardin des crues du Cher, étaient ornées de vasques permettant de découvrir des arbustes, ifs, fusains, buis et laurier stin qui rythmaient les dessins des massifs. Plus d'une centaine d'hibiscus sur tiges y fleurissaient en cette saison. Entre ces arbustes, les plates-bandes de fleurs en soulignaient la géométrie rigoureuse. Tout autour du jardin, des rosiers grimpants Iceberg habillaient les murs qui soutenaient les terrasses.
Là, votre arrière-grand-père aperçut un homme s'approchant de sa fille. Une discussion suivit et se transforma en dispute où elle fut malmenée. Il voulait l'embrasser de force. Se débattant, Hélène vit son gilet déchiré et tomba sur le sol. Son agresseur se jeta sur elle dans l'intention d'abuser d'elle.
"- Non, Thomas ! Laissez-moi !"
Son père n'en revenait pas d'entendre ce nom et voulut intervenir mais en vain. Il passait au travers. Un autre réalisa son souhait. Il était imposant et portait son plus bel uniforme. La jeune femme le reconnut et murmura son prénom alors qu'il soulevait le frère de Sonia par le col.
"- Frantz.
- Ne t'approche plus d'elle ou je te tuerai de mes mains," menaça celui-ci en s'adressant à Thomas qui apprit à voler sur quelques mètres.
En effet, l'allemand l'avait balancé de toutes ses forces loin de celle qui avait capturé depuis leur première rencontre son cœur. L'agresseur préféra fuir la queue entre les jambes devant l'aura meurtrière et froide qui émanait du sauveur. Après sa fuite, se calmant, l'officier fit face à Hélène toujours à terre. Il lui tendit la main qu'elle saisit doucement, réconfortée par sa chaleur. D'un mouvement souple, Frantz la serra contre lui, humant l'odeur de ses cheveux. Sans qu'une seule parole ne soit prononcée, la jeune femme leva les yeux vers lui et se noya dans des prunelles où elle y lissait une lueur d'amour mélangé à un doux désir.
Quand au jeune homme, il était prisonnier de celles d'Hélène. Il y voyait la clarté de la lune s'y refléter. Sa résistance fut mise à l'épreuve et finit par céder quand sa vision dériva vers ses fines lèvres, l'appelant de leur douceur. Se penchant vers elle, Frantz lui offrit délicatement son premier baiser sous le regard effaré de votre arrière-grand-père. Hélène, bercée par un cocon de béatitude, lui répondit avec timidité et retenue. Malheureusement, réalisant leur geste, elle se libéra subitement de son emprise et s'éloigna de lui, les larmes lui brouillant la vue.
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Le Noël d'une âme brisée
NouvellesPouvons-nous revenir en arrière ? Pouvons-nous réparer nos erreurs passées et espérer la rédemption ? En ce Noël 1945, un homme parmi tant d'autres allait recevoir la réponse à ces questions et par des personnes dont il ne soupçonnait même pas l'exi...