Un bruit strident et une lumière aveuglante passa une demi-seconde. Fleur rouvrit les yeux dans un sursaut et regarda la voiture s'éloigner au loin. Tirée de sa douce transe, elle frotta ses paupières et se redressa. Il faisait encore nuit, sa somnolence n'avait durée que quelques minutes. L'excitation de l'aventure était partie en même temps que le bolide et elle se sentait fatiguée. Elle commença même à pleurer, se maudissant d'être sortie comme ça et parce qu'elle ne savait plus où elle était et ne savait pas comment rentrer et en plus elle avait mal au bras. Elle se releva les jambes pantelantes, et le vent qui plus tôt lui avait semblé si gentil et doux s'engouffrait sous ses vêtements pour lui mordre la peau. Fleur essuya avec véhémence ses yeux comme si elle leur ordonnait d'arrêter d'imiter une rivière en crue, resserra son petit pull autour d'elle et marcha le long de la route, frigorifiée. Elle avait l'impression de partir dans le mauvais sens mais tant pis, elle n'aurait qu'à se laisser mourir de froid et puis tout serait réglé.
Les yeux humides et la tête basse, Fleur continua de marcher encore quelques minutes et sentit qu'elle allait faire un malaise. Sa tête tournait atrocement, ses oreilles sifflaient, devant ses yeux s'étalait un pellicule brumeuse et elle ne voyait presque rien. Elle s'arrêta, le souffle court, ferma les yeux et respira lentement, et en voyant l'arbre à côté d'elle, passa ses bras tremblants tour autour du tronc et noua ses mains entre elles ce qui l'empêcha de s'écrouler au sol. Elle pressa sa tête contre l'écorce et pleura silencieusement. Une vrille s'enfonçait dans son cœur et le lui déchirait, elle ne voulait pas mourir. Ce n'était pas juste. Pourquoi ça arrivait à elle et pas aux autres ? Cette pensée était égoïste, elle pleura encore plus contre le seul être vivant qui voulait bien d'elle.
Peu à peu, elle se calma. Elle se sentait plus apaisée, plus sereine, mais pas vraiment en forme. Fleur resta encore un instant contre l'arbre, remplissant le vide de la nuit de ses reniflements, puis fini par s'en détacher et tapota doucement le tronc.
- Merci, mon ami.
Avec les manches de son pull elle s'essuya les yeux et reprit lentement sa marche dans le calme.
Soudain, une lumière terrible l'aveugla et elle protégea ses yeux avec son bras. En le déclinant elle remarqua qu'une vieille voiture s'était arrêtée à son niveau et la vitre du conducteur se baissa. Au volant était un jeune homme d'un peu plus de 18 ans à la peau mate et aux grands yeux noirs.
- Vous êtes perdue, m'dame ? demanda l'inconnu.
Fleur se retourna pour vérifier qu'il lui parlait bien à elle et constata qu'il n'y avait que la forêt dans son dos.
- Heu non, je... Non... Je me promène.
- À une heure du mat' ?
- Oui.
Le jeune homme haussa un sourcil et tapota la place à côté de lui.
- J'vous dépose quelque part ?
- Non merci.
- J'vais pas vous laisser toute seule dans le froid... Allez, v'nez.
Fleur hésita un instant. Mais à quoi bon ? Elle n'avait rien à perdre de toute façon. Elle contourna la voiture et s'y engouffra. L'intérieur était comme l'extérieur, vieux et défoncé mais ce n'était pas dérangeant.
- J'vous dépose où ? Eh mais, vous devez avoir super froid, attendez...
Le jeune homme se contorsionna pour atteindre quelque chose sur la banquette arrière et lui tendit une couverture. Fleur s'enveloppa dedans.
- Alors ? Je vous dépose où ?
- Tu vas où toi ?
- À la piste d'ULM.
- Emmène-moi là-bas alors.
Le garçon arqua une fois de plus ses sourcils. Qui était cette femme ? Qu'est-ce qu'elle faisait là ? Mille autres questions arrivèrent à son cerveau, mais il haussa les épaules. Elle avait l'air sympathique et passive. Il redémarra sa voiture qui s'élança sur la route dans un vrombissement. Plusieurs fois il tournait la tête pour l'observer, intrigué. Elle était toute menue, ses cheveux marron étaient un peu ternes et sa peau était atrocement pâle. Sous ses yeux se creusaient d'immenses cernes noirs et ses traits étaient tristes et tirés, trahissant une grande fatigue. Malgré tout et étrangement, elle avait un certain charme, elle était plutôt belle. Il ne savait pas vraiment quel âge elle pouvait avoir, mais ce qui était sûr c'est qu'elle avait plus de 30 ans.
- Au fait, vous vous appelez comment, m'dame ? demanda-t-il vu que personne ne parlait.
- Fleur.
- Fleur ? Fleur comme... Comme les fleurs ?
- Non, Fleur comme les oranges.
Il fronça les sourcils. Il avait dû louper un épisode. Pourquoi elle lui parlait d'oranges ?
- C'était une blague, dit Fleur qui le sentait perplexe.
- Ah, ouais, c'était bête comme question. Vous êtes marrante.
- Pas vraiment, non. Et toi, c'est quoi ton prénom ?
Le jeune homme toussa de manière très peu naturelle, comme s'il essayait de masquer une gêne.
- Hum... Jean-René m'dame...
- C'est sympa.
- Bof. J'suis pas spécialement fan.
- Pourquoi ?
- C'est pas très beau.
- Moi j'aime bien.
- Bah moi non.
- Pourquoi on t'a appelé comme ça ?
- Jean c'était l'prénom du frère de ma mère et René celui d'son père. Ils sont morts quand elle était jeune.
- Oh...
- Et vous ? Pourquoi Fleur ?
- Mes parents aimaient bien les fleurs.
- Ah ouais, c'est logique.
- Exact.
Le Silence s'installa confortablement sur le levier de vitesse entre eux et les regarda. Fleur avait moins froid depuis qu'elle portait la couverture autour d'elle, mais elle frissonnait toujours. Jean-René lui, conduisait avec sa nonchalance habituelle, mais à l'intérieur de lui s'immisçait un grand nombre de questions. Tout ceci était très étrange. Il trouvait une femme perdue à l'air fantomatique au bord de la route à une heure du matin, qui ensuite monte dans sa voiture et agi comme si tout était normal. Il pensa qu'elle avait peut-être des problèmes mentaux mais bon, il ne la connaissait pas alors il ne pouvait rien juger. Finalement le Silence fini par s'envoler par la fenêtre entrouverte lorsque que Jean-René prit la parole.
- On est arrivé.
- Pourquoi tu vas à la piste des ULM au fait ?
Pour toute réponse, le jeune homme sortit de la voiture et l'invita à faire de même. Il s'installa sur le capot de sa vieille Renault Mégane et s'adossa contre le pare-brise. Fleur ne voyait pas grand-chose mais se hissa également tant bien que mal à ses côté, son action lui demanda tellement d'effort qu'une fois assise, elle avait l'impression d'avoir couru un marathon de 100 kilomètres.
Jean-René qui était presque en position allongé lui conseilla de lever les yeux au lieu de regarder droit devant elle, elle s'exécuta.
Jamais les étoiles ne lui avaient parues aussi belles.
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On se reverra dans les étoiles.
General Fiction"Dans le cosmos je t'attendrai, Je te regarderai avec fierté. Réalise ton rêve tu en es capable, Parce que tu es quelqu'un de formidable. Ne sois pas triste de me voir partir, Ne sois pas triste de me voir mourir, Parce que voilà quelque chose que j...