Chapitre 1

35 2 2
                                    

Musique : Some Day Soon – Alexi Murdoch

"A mind filled with memories, weigh me down like gold"

***

      Je me souviens des après-midis d'été chez mes grands-parents. Ma grand-mère avait plusieurs plantations dans son jardin. Je raffolais particulièrement des tomates, elle me laissait m'en occuper. Je me souviens de leur odeur dispersée à travers le jardin, fraîchement rougies. Mais je me souviens particulièrement de l'odeur fruitée qui chatouillait mes narines dès que je passais devant, l'effluve des arbustes de framboises. J'en attrapais à chaque fois que je passais devant. Quelque fois, avec Lizzie et mes cousins, nous faisions la course à celui qui en ramasserait le plus. Nous avions chacun une barquette et nous essayions d'en récolter le plus possible. Mais, au final, nous en avions plus dans l'estomac que dans notre barquette. A la fin de ces journées à passer sous le soleil chaud de Faria Beach, nous mangions sur la terrasse en papotant de nos journées, en savourant la chaleur et la douceur des longues soirées d'étés. Nos journées se révélaient être toutes les mêmes pendant deux mois ; plage, jardinage, promenade, parties de Scrabble, coquillages, la foire, les conversations du soir, mais principalement les souvenirs et les secrets.

      J'essuyais mon front après plus de deux heures de rangement intensif dans le garage. Someday Soon dans l'enceinte qui me donnait l'envie de partir en voyage, de rouler sans avoir de but. Un petit road-trip à travers les états du coin pour commencer ces vacances. Cependant, mes vacances n'en seraient pas vraiment car je travaillais à mi-temps à la bibliothèque municipale. Je suis peut-être née dans un foyer aisé, je n'ai jamais été une personne inactive qui se contente de dépendre de l'aide financière de ses parents. J'ai toujours été un rat de bibliothèque. Au fur et à mesure des années, la bibliothèque avait été mon refuge, mon échappatoire, je connaissais par cœur ses rayons, ses couloirs, son rangement, son organisation. L'odeur des livres et de l'ancien bois étaient collés à ma peau, faisant partie intégrante de ce qui me définissait. J'ai été embauchée dans l'année de mes seize ans. Durant l'été, certains amis de la Clique partaient en vacances, d'autres lifeguard ou tenaient le magasin de surf sur les plages de Santa Monica dans le comté de Santa Barbara. Je me sentais un peu éloignée de ma bande, car j'étais la seule qui avait un job dans la ville et non au bord de la mer. Mais on se retrouvait presque tous les soirs et c'est à ce moment-là que nous savions que l'été nous appartenait, nous refaisions le monde comme des adolescents de seize ans.

      Mon portable sonna et me ramena à la réalité. Appel entrant : Jesse. Il était plus de quatre heures de l'après-midi, elle venait probablement de se lever après notre soirée de la veille.

Que me vaut l'honneur de cet appel très chère ? Demandais-je en prenant un air d'aristocrate.

Bonjour à toi rayon de soleil de ma vie, l'entendis-je ricaner, où es-tu passée hier soir ? Je me rappel t'avoir vu partir dans la véranda pour prendre l'air et après tu as disparu. Puis-je savoir où tu es allée petite cachotière ?

- J'ai eu une légère altercation avec Jake, et j'ai voulu rentrer, j'étais levée depuis trop longtemps, je voulais retrouver mon lit et...

- Tu m'as quand même abandonné, me coupa-t-elle. Attends, tu as discuté avec Jake ?

- Hum.

- De ?

- La vieille époque, lui répondis-je. J'espérais vraiment pouvoir éviter cette conversation.

The AnchorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant