Lettre 13

128 36 3
                                    

31 Mars 2018

Sylvie,
Je vous souhaite d'avoir un enfant, vraiment. Vous avez l'âme d'une mère, vous souhaitez protéger les gens. C'est rare. Je suis désolé(e) pour vous, et bien que ces mots ne ramèneront jamais le bébé que vous n'avez jamais eu, j'espère qu'un jour, vous pourrez sourire, et vous pencher au dessus du berceau d'un nourrisson. Vous le rendrez heureux, je le sens.
Mon père est quelqu'un comme vous. Il a toujours souhaité mon bien, et je sais que ma mère aussi bien qu'elle ne m'ait jamais compris(e). Je sais que ce qu'elle veut avant tout, c'est que je sois heureux. Mais je sais également que contrairement à mon père, elle a mis du temps à accepter qui j'étais, ce que j'étais. Je ne sais pas si c'était elle personnellement, ou si elle avait peur qu'on me juge, qu'on me fasse du mal. Peut-être un peu des deux. Quoi qu'il en soit mes parents m'ont plus ou moins toujours soutenu. Ils m'ont emmené chez la psy quand ils ont appris que je me mutilais. Ils n'ont jamais oublié un seul de mes anniversaires. Ils m'ont laisser partir une semaine avec mes amis. Ils ont accepté l'idée que leur fils était peut-être une fille, avec plus ou moins de temps. Ils se sont préoccupé de moi à la mort de Metias. Ils surveillent mes poignets attentivement depuis cette même période, et j'en passe. Je suis loin d'être un enfant facile pour eux, et j'en ai conscience. Mais ils ne m'ont jamais abandonné.

Vous non plus, vous ne semblez pas vouloir me lâcher - ce n'est pas méchant. Je ne sais pas pourquoi vous vous attachez autant à moi, mais quoi qu'il en soit, vous m'aidez, parfois.

Accrochez-vous. Vivez. Profitez. Faites de votre mieux. Donnez un frère ou une soeur à votre enfant. Tombez amoureuse si ce n'est pas déjà fait. Mais ne restez pas bloqué dans le passé comme je me rend compte que je le fais. Faites votre deuil, comme je fais de mon mieux pour faire le miens.

Ça me fait penser que je suis enfin allé(e) sur la tombe de Metias. Le vent soufflait, et sous ma veste en jeans je frissonnais. Mais c'était surtout la vue de la pierre tombale qui me faisait cet effet là. Je ne savais pas à quoi elle ressemblait jusqu'à samedi dernier. Je n'avais même pas assisté à son enterrement, je n'avais jamais rencontré ses parents. Le marbre était couvert de quelques photos, et d'une gerbe de fleurs. J'avais amené un bouquet, et je l'ai posé près d'une image de mon copain, où on le voyait sourire, une bouteille de bière à la main. J'ai sortie une image de nous deux de mon portefeuille et je l'ai laissé là. Puis je suis repartie. J'ai sentie que je commençais à lui dire au revoir.

Morgan.e.

Mamie_grumpy
Taquapax

Morgan.e.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant