Save Me

Chapitre 3

Elle avait reçu les messages de sa soeur qui lui confiait la tourmente dans laquelle elle se trouvait. Sans attendre, elle prit son billet d'avion et s'envola chez elle.

Elle était dans le grand aéroport de Bordeaux, enfin, dans le petit bâtiment loin du reste qui servait pour les vols low cost. D'ailleurs lorsqu'on arrive ici la première fois, il faut bien avouer que c'est un peu inquiétant. On sort d'un minuscule bâtiment, face à un grand parking, et généralement sous un ciel gris crachant quelques gouttes. Pour les gens du vrais sud (😇💕) on se croirait au Nord, un peu comme dans la scène du film très connu, où il se met à pleuvoir dès que le personnage principal passe le panneau indiquant le nom de la ville.

Elle passait la sécurité, prenant bien soin d'enlever tous les objets qu'elle portait sur elle. Evidemment le portique de sécurité sonna, je commence d'ailleurs à croire que personne ne peut y échapper. Une fois dans l'avion, elle se cala dans le siège, droite comme un piquet et attacha sa ceinture, nerveusement.

L'avion, quelle drôle d'invention. "Comment un tas de ferrailles pouvait rester dans les airs sans tomber ?" pensait-elle. Vous l'avez deviné, elle en avait très peur. Elle n'arrivait pas à comprendre comment ce truc qui pesait des tonnes pouvait voler. Chaque fois qu'elle le prenait, ou même un de ses proches, elle imaginait le pire. Il n'y avait aucune chance possible qu'elle ou quelqu'un d'autre s'en sorte vivant. C'était impossible. Comment sa soeur pouvait-elle adorer ça... Sa soeur... Oui ça l'aidait de penser à elle, après tout c'était pour la rejoindre qu'elle était dans cet avion. Elle attrapait une bague qu'elle lui avait offert pour un délire assez moqueur, et la serrait de toutes ses forces.

Ça va bien se passer, je suis dans cet avion pour te rejoindre pour qu'on soit enfin ensemble. Je ne suis pas seule, tu es toujours avec moi. Et dans quelques heures, on va enfin être réuni, on sera dans les bras l'une de l'autre et on fera tout ce qu'on a toujours rêvé de faire, ensemble.

Elle était enfin dans la ville de son ainée. Elle avait cherché sur internet comment se rendre jusqu'à son domicile et savait qu'il fallait prendre le bus numéro 23. Et ensuite marcher un peu, ou alors monter dans le n°4 ou même le n°7. Elle était vraiment débrouillarde, surtout lorsqu'elle avait un but aussi important. De nature flemmarde, elle évitait de se lancer dans de grandes aventures. Vous vous imaginez, cela signifierait marcher, se lever tôt, partir dans l'inconnu. Non, elle était mieux dans son lit jusqu'à 13h puis devant une série pour le reste de la journée, avec ses bouteilles de coca bien sûr. Mais là, c'était différent. Lorsqu'elle avait un objectif, elle changeait complètement. Je vous l'ai déjà dit. Cette fille était extraordinaire, elle avait le coeur sur la main. Et pour ses proches, elle pouvait soulever des montagnes, séparer des océans, et faire tourner la Terre dans l'autre sens. Alors pour sa soeur, cette personne qu'elle chérissait tant, elle serait capable de tout, vraiment tout.

"Je suis devant chez toi" envoya-t-elle par SMS.

L'ainée prit son téléphone au moment même où elle reçut le message. Cela arrivait souvent. Elle était capable de savoir quand sa soeur allait lui envoyer un message. Elle ne pouvait pas l'expliquer, elle savait juste quand prendre son téléphone et cela fonctionnait la plupart du temps. Elles avaient une connexion si incroyable.

"Ce n'est vraiment pas drôle" répondit-elle en soupirant. Comment pouvait-elle rire de ça. Ne pas voir sa soeur était une torture. Dès qu'elle n'avait rien d'autre pour se changer les idées, tout ce qu'elle ressentait, c'était le manque. Cela lui tordait les entrailles et lui écrasait le coeur peu à peu. Et le pire dans tout ça, c'était l'espoir, ce coquin qui arrivait à se faufiler chaque jour. Et là, bien qu'elle savait que c'était impossible, elle avait espoir que sa soeur soit réellement là.

Cette dernière ouvrit Snapchat, en constatant qu'elles avaient bien entendu perdu les flammes. C'était une catastrophe, elles s'envoyaient des photos tous les jours, des vidéos tous les jours, mais il y avait toujours un moment où elles les perdaient. L'application doit s'arracher les cheveux tellement elles n'étaient pas douées avec ça. Enfin, revenons à nos moutons. Elle se prit en photo, devant la porte de l'immeuble de sa soeur et lui envoya.

L'ainée ne bougeait plus. Elle restait devant cette photo pendant des secondes qui paraissaient être une éternité. Elle était sous le choc, sa soeur était là, en bas de chez elle. Dans quelques minutes à peine, elle allait pouvoir être dans ses bras. Enfin si elle arrivait à se lever. Pour l'instant, elle était juste assise dans son lit, devant la photo, en larmes sans réussir à se calmer.

"BON TU VIENS M'OUVRIR LÀ ?" reçut-elle.

Elle prit ces clefs dans une main, et dévala les quatre étages qui la séparaient de l'entrée de son immeuble. C'était bien elle. Sa soeur, aux longues tresses violettes, se tenait juste derrière la porte. L'ainée l'ouvrit, mais n'avança pas tout de suite. Elle ne pouvait pas décrocher le regard. Elle ne pouvait pas arrêter de contempler sa soeur. Elle était si belle. La plus belle personne qu'elle avait eu la chance de voir dans sa vie. Ses yeux en amande qu'elle ne pouvait pas quitter, son nez sur lequel elle avait toujours voulu appuyé (🙈🙈) et enfin ses lèvres fines et qui rapidement se transformèrent en un sourire magnifique qui illuminait son visage.

"Tu comptes rester là à me regarder en chialant encore longtemps ou j'ai le droit à mon câlin ?" demanda la plus jeune, brisant ainsi le silence.

Et c'est ainsi que les deux filles se précipitèrent puis tombèrent dans les bras l'une de l'autre, se serrant comme si leur vie dépendait de cette étreinte. Aucune des deux ne voulait lâcher l'autre. Elles avaient attendu tellement longtemps pour cela. Elles avaient tellement souffert de l'absence de l'autre... Maintenant qu'elles étaient ensembles, elles ne laisseraient rien, ni personne les séparer. C'était elles contre le monde, et rien ne pourrait les arrêter à présent.

Enfin arrivées dans l'appartement, l'ainée brancha l'enceinte et lança la playlist "Sis". C'était toutes les chansons qui signifiaient quelque chose pour leur relation. Il y en avait peut être une dizaine. Toutes ces chansons étaient importantes pour elles, et représentaient toutes un moment particulier. La première : "Perfect de Ed Sheeran" résonnait dans l'appartement. Elles étaient assises, sur le bord du lit, se tenant toujours par le bras, de peur de se lâcher. Mais au moment du refrain :

« Baby, I'm dancing in the dark with you between my arms.
Barefoot on the grass, listening to our favorite song.
When you said you looked a mess, I whispered underneath my breath.
But you heard it, darling, you look perfect tonight. »

Les deux soeurs se levèrent pour danser dans les bras l'une de l'autre. Elles étaient au paradis, ça y'est. Elles ne pouvaient rêver mieux. Elles dansaient, ensemble sur cette chanson qui signifiait tant, et étaient enfin ensembles. Une fois cette chanson finie, elles s'allongèrent dans le lit. Elles n'allaient pas discuter maintenant, elles n'allaient pas rire non plus. Pour le moment, elles allaient juste se blottir l'une contre l'autre, leurs chansons en fond, sans un mot. Cela peut vous paraître bizarre que deux soeurs, qui avaient la chance de se voir enfin, restaient la sans se parler. Mais rassurez vous, ça n'allait pas durer longtemps. Elles avaient juste besoin de faire une pause et de rester blotties. La vie les avait pas mal malmenées, alors elles avaient besoin de reprendre des forces, de s'allonger et de laisser tomber le masque, se sentant pour la toute première fois en sécurité.

Elle est avec moi, enfin. Plus rien ne peut m'arriver. Je suis avec ma deuxième moitié. Je suis enfin complète. Ensemble il ne peut rien nous arriver. Voilà, je sais maintenant ce qui arrive quand des âmes soeurs sont enfin réunis. Leurs cœurs se complète et plus rien ne peut les briser.