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J'arrive à l'arrêt de bus, descends prestement et m'assois nonchalamment contre l'abri de bus. Sachant pertinemment que mon père ne sera pas à l'heure, je sors un bouquin de mon sac et reprends ma lecture. Comme par reflexe, je sors mon portable de ma poche, regarde d'un coup d'œil rapide les messages qui s'affichent sur l'écran verrouillé. Aucun n'est particulièrement intéressant, je tape mon code afin d'accéder à mes applis et pose mon doigt sur l'icône avec une croche blanche sur fond violet, iTunes. Je fais défiler les musiques et choisis « feel invicible » de Skillet, les notes puissantes et les cris rageur du chanteur me permettent d'évacuer la tension de la journée.

J'entends un bruit de moteur et redresse la tête pour savoir de qui s'agit-il. J'aperçois alors la Mercédès noire de mon père et me lève en un soupir. J'attrape mon sac d'un geste rageur et le balance dans le coffre. Puis je me glisse cote passager et tout en affichant mon air le plus renfrogné possible, je tourne la tête vers la vitre.

Après un court trajet en voiture, nous arrivons à la grande demeure longère où j'habite avec mon père, mon petit frère, mon demi-frère, ma belle-mère et tous les animaux dont je m'occupe. Je sors en hâte du break et hisse mon Eastpak sur mon dos. Je trottine vers la porte en bois rouge écaillée du garage, en pousse le battant et grimpe les marches deux par deux et court me réfugier dans ma chambre. Je laisse mon sac retomber sur le sol puis sort en trombe de ma chambre, dévale les escaliers en bois et me dépêche d'aller dans le garage. Arrivé à mon but, je vais dans le cellier puis prends une dose de nourriture pour mon compagnon équin. Je reprends ma course jusqu'à atteindre le bout de mon jardin où ma monture fougueuse m'attend en renâclant. J'avance une main au-dessus des fils électriques et caresse avec délicatesse ses doux naseaux. Je désactive la clôture puis passe entre les fils pour remplir la mangeoire située au fond de son box. Après avoir vérifié qu'il avait assez d'eau dans son abreuvoir je fais le chemin du retour au trot. Je nourris le reste des bestioles et file dans ma chambre. Je ferme la porte, reprends mes écouteurs en glisse un dans chaque oreille et ferme les yeux. Je sombre assez vite dans un sommeil léger mais agité...

Je suis dans la voiture avec mon père...Nous roulons assez vite quand soudain, au détour d'un virage, au bord d'une corniche, je reconnais le visage féminin qui a berce mes plus jeunes années...Maman !! Je hurle à mon père de s'arrêter et il s'exécute non sans irritation. J'ouvre ma portière avec force et me précipite à sa rencontre...mais...à mon plus grand désarroi, mes mains et mes bras traversent son corps fragile et je ne peux que la regarder s'élancer dans le vide et son corps s'écraser avec mollesse sur les rochers pointus en contre bas... Je tombe à genoux, hurle et laisse les larmes se déverser sur mes joues rebondies...

Je me réveille en sueur et peine à retrouver l'endroit où je me trouve...Ah oui, ma chambre, je suis dans ma chambre ! Ce n'était qu'un cauchemar, encore... Je constate sans surprise que mes joues sont baignées de larmes... Je renifle et me roule en boule sur mon lit.

nostalgie paradoxaleWhere stories live. Discover now