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Elle est dans la salle d’attente. Surement entrain de lire un magasine people qu’elle a pris à sa sœur pour passer son stress durant mon osculation, ou entrain de jouer sur son téléphone à un des pauvres jeux qu’elle a téléchargé, pour oublier la situation dans laquelle elle se trouve. Je le sais, je le ressens, car à chaque fois que je passe entre les murs de mon médecin, c’est pareil. Elle me le cache, toujours, en permanence, mais ses yeux tremblants me disent tout pour elle : elle a à chaque fois un peu plus peur que la précédente. Peur que la fin s’approche de plus en plus, que mes jours soient de plus en plus comptés, que la vie qu’elle aimait partager avec moi soit encore plus courte que prévue. Déjà que la date butoir n’était pas à l’autre bout du calendrier, elle avait toujours peur qu’elle soit de plus en plus proche. A cette pensée, je tremble, j’ai peur de sortir.

Parce qu’effectivement, ce n’est pas une bonne nouvelle que je vais lui annoncer.

Ma machine qui me fait respirer me semble d’un coup insupportable tant elle est lourde. Ma main n’arrive pas à serrer sa poignée, tant elle est moite, tant elle tremble, et elle me rappelle à quel point cette chose qui me sauve est pire qu’un boulet de prison. Je l’ai toujours branché dans mon nez, tenu dans mes phalanges, et si je la laisse, tout s’arrête, brutalement. Et alors que d’habitude, elle est une simple routine que je traine depuis une année, et à laquelle je me suis habitué, cette fois, j’ai l’impression de retourner dans les premiers jours de ma phase terminale. Sans aucune volonté, sans aucune compréhension, sans elle pour me donner envie de m’en tirer, ne serait-ce que quelques heures de plus. Sauf que maintenant, je sais, j’ai envie de tenir, mais je ne peux plus, et cela me donne envie de pleurer contre la porte de la salle du médecin dans laquelle je me trouve seul, désormais, le docteur ayant quitté les lieux. Pour ne pas assumer cette pauvre période qu’il me reste, avec elle, et le désastre que je vais faire derrière moi.

Je suis une grenade. Bien sur que je le savais, mais je ne voulais pas le réaliser. Et maintenant que j’entends sa voix, là, derrière le cadran, je pleure de plus belle. Je pleure comme un gosse à qui l’on annonce une mauvaise nouvelle, comme une morte. Sauf que cette fois, c’est la mienne. Et le cœur brisé de l’enfant qui lui fait pleurer, ce sera le sien, et celui de mes proches, aussi dans la salle d’attente, qui espérait tellement que tout irait bien, que tout passerait. Mais ce n’est pas le cas. Cela ne sera plus jamais le cas. Le gong a sonné, le compte à rebours est lancé. Et je crois qu’elle l’a compris, car j’entends sa voix tremblante me dire :

-          Ce n’est pas en t’appitoyant sur nos sorts que nous pourrons profiter du peu de temps qu’il nous reste, hein ?

Je tente de me reprendre, mais je n’y arrive pas. J’entends la poignée de la porte bouger derrière moi, alors je m’avance quelques peu pour ne pas qu’elle nous tape, moi et la machine, lorsqu’elle ouvrira la porte. Je reste de dos, je ne veux pas qu’elle me voit dans cet état. Je ne crois pas qu’elle n’en ait envie non plus. Le cadran grince, j’entends ses pas frapper le sol, et je sens ses mains autour de ma taille. Je sens aussi sa tête sur mon épaule. Je laisse la mienne glisser sur la sienne. Et elle susurre :

-          Combien de temps ?

Je baisse les yeux.

-          La fin de tes vacances d’été.

Et d’une voix peu certaine, elle prononce :

-          On pourra encore profiter alors.

 

On ferra tout pour.

Corps et robe rouges // n.hOù les histoires vivent. Découvrez maintenant