Partie 1 : introduction

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Tout le monde se tenait vouté, la tête rentrée sous la pluie battante. Un long cercueil en bois ouvragé était placé à côté d'un immense trou béant. On aurait dit la gueule d'un monstre  qui s'apprêtait à l'avaler tout rond. Gabrielle eu un serrement au coeur, en se rappelant que son oncle lui avait confié qu'il voulait être inhumé, et de la réaction de sa famille très catholique en l'apprenant. Ils l'avaient toujours rejeté, car il était différent des autres. Premièrement, il n'avait pas de religion, ce qui ulcérait ses parents, ensuite, il ne s'était jamais marié pour le plus grand malheur de sa famille, qui attendait désespérément un héritier. Il habitait retiré dans une immense propriété, qui comprenait une forêt sombre qui lui semblait infinie , une rivière entre autres. Lorsque Gabrielle faisait trop de bêtises, ses parents l'envoyaient chez son oncle. Loin de lui déplaire, ces moments comptaient parmi les plus heureux de son existence.

Elle détestait sa famille. La seule personne qu'elle adorait plus que tout était son oncle. Mais ce dernier était mort il y a une semaine, d'une mort foudroyante et inconnue. Les médecins disaient qu'il s'agissait certainement d'une crise cardiaque, mais Gabrielle savait qu'il n'en était rien. Elle ne supportait pas ses parents. Ils ne l'appréciaient guère plus et durant toute sa scolarité, depuis la primaire, ils l'avaient placés en pension, dans un internat accueillant uniquement les filles. Mais ce n'était pas l'internat génial que l'on voit dans les film mais un internat glauque, avec des filles méchantes et aigries. Si bien  qu'au lieu d'avoir des amies, elle passait son temps avec les animaux. Lorsqu'elle était en CE2, elle avait eu une souris blanche nommée Mrs Green, puis l'année suivante, une corneille, à savoir Mrs Hamilton, et l'année encore après, ce fut une couleuvre (Mrs Burnet) Elle s'était découvert un don avec les animaux et pouvait apprivoiser à peut près tous ceux qu'elle rencontrait. Et c'était à cause de ce don qu'il allait lui arriver une fabuleuse histoire.

Lorsque son tour fut venu, elle s'avança lentement et effleura le cercueil poli, une unique larme coulant sur sa joue. Mais elle ouvrit les yeux, sentant le cercueil vibrer. Elle posa sa main à plat sur la surface en ébène. Mais le frisson qui avait ébranlé le sarcophage avait cessé et Gabrielle se pris à espérer qu'elle ne l'avait pas imaginé, comme pour combler le vide déchirant causé par la disparition de son oncle. Ils étaient tous deux semblables et s'entendaient à merveille. Gabrielle vouait une admiration sans borne à son oncle, qui lui révélait les mille secrets de la forêt, ou l'emmenait voir les champignons vénéneux dans les bois.

De retour dans la maison parentale, Gabrielle alla se cloîtrer dans sa chambre. Elle lui était si peu familière avec ses murs blafards, sans aucunes décorations, une armoire en simili-bois blanc, un parquet de la même teinte ... Bref, cette chambre était tout sauf accueillante. Le seule chose qui était personnelle dans cette chambre, étai le vivarium contenant une grenouille verte avec des points jaune sur le dos. Elle portait comme nom Mrs Scamander. Toujours adorable et polie, elle savait se tenir comme le demandait son statut social. Et même ce vivarium avait été ramené de la pension.

La jeune fille s'allongea sur le lit dur et froid, en sentant la tristesse étreindre son coeur. De nouvelles larmes perlèrent sur ses joues et bientôt elle se mit à sangloter doucement. Elle tendit la main vers le vivarium et posa ses doigts sur la surface lisse. Comme ressentant sa douleur, Mrs Scamander vint coller son museau à la parois. Gabrielle souleva le couvercle de la boîte et saisit sa petite grenouille. Celle-ci sautilla le long de son bras, et enfouit sa tête dans ses cheveux. Elle eu un petit rire mouillé. Lorsque tout allait mal, on pouvait toujours compter sur les animaux. Elle resta ainsi pendant une heure, puis se décida enfin à bouger. Gabrielle était une battante. Malgré toutes les épreuves qu'elle avait du traverser, elle s'en était toujours relevée.

Sa penderie était vide, comme sa commode, son étagère ... La seul chose qui lui appartenait était un sac en cuir offert par son oncle. C'était un beau sac avec des poches partout et des breloques en perles d'agile accrochées à chaque fermeture. Elle fouilla dans la poche intérieur de son blouson, et y trouva un billet de 20 euros. Pas grand chose, mais suffisamment pour prendre le bus. Elle hissa son sac contenant ses peu de biens, ses vêtements,et ses insectes pour Mrs Scamander, sur son dos.

Sa fidèle grenouille sur l'épaule, elle ouvrit la fenêtre et l'enjamba pour ne plus jamais revenir, sans un regard en arrière. Elle bondit et atterrit souplement au sol, habituée depuis longtemps à filer en douce par sa fenêtre, lorsqu'elle était à l'internat. Elle avança d'un pas rapide, mettant le plus de distance entre elle et cette prison. Gabrielle arriva à la lisière de la forêt et vis un arrêt de bus. Patiemment elle attendit, perchée sur une clôture. Cela ne devait pas être commun de voir une adolescente juchée sur un poteau, un sac de voyage sur une épaule et sur l'autre, une grenouille sympathique.

Mais sa ténacité finit par payer et un bus arriva, soulevant une gerbe d'eau. Le conducteur sembla sincèrement surpris de la voir, mais il ralentit et ouvrit les portes tout de même, laissant passer cette jeune fille ainsi que son... d'ailleurs qu'est ce que c'était ? Grand dieu, un crapaud ! Les jeunes étaient de plus en plus excentriques, soupira-t-il en son for intérieur. 

Excepté  une grand-mère renfrognée, un homme avachit visiblement complètement défoncé, et une silhouette impossible à identifier au fond, le bus était entièrement vide. Le temps se mit à s'égrener et le paysage passa des bâtiments ternes et sans vie de la ville, à un paysage désolé avec quelques arbuste rabougris perçant la terre sèche ça et là, à une forêt luxuriante. Peut à peu la forêt s'assombrit, pour laisser place à une forêt plus sombre, plus dense, plus inquiétante. Soudain, le bus ralentit. Gabrielle se réveilla en sursaut, elle s'était assoupie. Le regard ahurie du chauffeur posé sur le plateau de commande alerta la jeune fille. La vielle femme se leva avec une agilité qui n'avait rien  à envier à un athlète de haut niveau. Elle récupéra un long bâton orné à son sommet d'une pierre orangée où tournoyaient des étincelles multicolores, et s'avança vers les portes du bus qui s'ouvrirent comme par enchantement. Gabrielle cligna des yeux persuadée qu'elle avait mal vu, mais elle dû se rendre à l'évidence que ce qu'elle voyait était bien réel. Subjuguée, elle observa l'endroit qui les entourait. C'était un village ancien, ou chaque pas de porte était envahie par des pots de plantes étranges, des empilements de chaudrons. Suspendues à chaque coins de rues, des lanternes illuminaient  les pavés d'une lueur chaleureuse. Gabrielle se sentis terriblement attirée par ce lieu. Mais déjà les portes du bus se refermèrent et le merveilleux endroit s'éloigna comme dans un rêve. La jeune fille aurait voulu se lever mais ses jambes étaient comme engourdies et elles refusèrent de la porter. Elle raffermit sa prise sur son sac, et attrapant sa grenouille, elle alla voir le chauffeur.

En s'approchant, elle se rendit compte que la place chauffeur n'était pas occupée. Elle hurla, d'un cri horrible et perçant. Tout ce mit à tournoyer autour d'elle, puis ce fut le vide.


La malle ...Where stories live. Discover now