02, destin

449 53 6
                                    

décembre, 31

l'homme aime ce qui brille, pas ce qui fane. l'homme n'aime pas les pétales rouilles, l'homme n'aime pas les esprits ternes. les enfants ont peur du noir. l'homme n'aime pas mon espèce, espèce d'hybride muselé prêt à faire couler le long de sa gorge la moindre goutte du liquide soleil, parfois brûlé, car, nous, ni homme ni bête, aimons la sombre teinte d'une liqueur flétrie, le sombre goût d'une liqueur vieillie. car, nous, ni homme ni bête, seulement loin d'être sot mais traités comme tel par les bons, ne connaissons plus le beau. alors quelques regards me sondent, j'avance. leur jugement sur les épaules, je trace. rien n'est plus important que cette envie animale de conquête, ce besoin de séduire, de détruire. ce soir, il faut me nourrir dans leurs chairs goûtues presque nues.
les corps bougent, les visages se balancent et la splendeur s'éteint dans les multi-couleurs des projecteurs braqués sur la foule. ils crient, ils hurlent tous, ils se détachent et se collent, s'embrassent et se touchent. rien ne va plus, le monde flou par la buée des respirations haletantes ne paraît être qu'un amas d'inconnus titubant vers l'euphorie lunaire. ma tête cogne, mes mains glissent, mes lèvres se soulèvent. Il semblerait que je sourie à ces fous, il semblerait que je sois tout aussi fou qu'eux.

encore quelques secondes avant minuit.

dans quelques instants un nouvel an naîtra, mais plus personne n'y portera d'attention, car c'est ainsi qu'est ce monde.
ignorant.
ignorant du début, ignorant de la fin, ignorant de ce qui a été, est ou sera, ignorant l'infini plus grand encore que celui qui s'étant au delà des univers.
ignorant de tout mais croyant tout connaître.
l'homme n'aime pas les hommes mais idolâtre son propre être. l'homme est imbu, épris, de lui-même.
elles, amphibie créées par, pour mais contre la société, elles, impures bravant les règles pour rester dans la norme, aiment leurs semblables en détestant leur égal.

puis violemment, dans mon viseur enflammé, je vois rouge. un rouge primaire me brûlant la rétine, ton rouge sanguin me bouffant les pupilles. un sourire carnassier assombrit ma bouche, et, tandis que des yeux je te fixe, idéal écarlate, mes jambes se plient et se déplient avec trop de sensualité, trop de bestialité.
car eux aussi, me fixent, eux aussi, me sondent ; tes orbes aux teintes funèbres, aussi profondes qu'un lac sans fond, brûlantes, insistantes, étincelantes.
elles m'attirent, elles m'attendent, ton regard n'a d'yeux que pour moi, et je n'ai de pensée que pour lui.

« tu danses ? »

nul besoin de s'exclamer, tu m'entends d'un simple coup d'œil.
alors que tes lèvres te laissent de marbre, ce sont tes billes oculaires qui, malicieuses et amusées, me répondent en se soulevant. et tu lâches ses mots, ses paroles que seul toi pouvait te permettre, ji-min.

« seulement avec mon destin. »

ma chair s'allume, mon cerveau s'éteint.
je ricane.
tu te lèves.

et nous voilà au milieu d'inconnus.

collé contre ton âme, nos bras levés, nos hanches soudées, il me semble voler. l'air est léger, l'odeur s'est atténuée, ta chaleur court sur ma peau, ton souffle glisse sur mes maux. ta voix dans mes tympans, tes doigts contre mes flancs, nous survolons nos effrayants et incessants tourments. tes mains sur mes reins et mon chagrin contre le tien, nous nous élevons parmi les baladins du ciel sans fin.

mais nous sommes damnés, entre humain et vilain, vivant sans trop l'être, à demi mort, le souffle court, les cernes creusées.
l'homme hait le noir. les enfants ont peur du noir.
alors nos bouches, ce soir, le furent.

contact. / min-gukOù les histoires vivent. Découvrez maintenant