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L'AUTRE

L'AUTRE :

La veille, 22h04. New York.

Assis et nu dans une pièce obscure avec pour seul éclairage une bougie.

Il est assis devant un bureau en métal sur lequel sont posés des magazines, quelques pièces de monnaies, une lampe sans ampoule, divers stylos et un ciseau.

On devine dans la pièce exiguë et sombre un lit placé dans un coin, un sol brut en béton, aucune fenêtre, juste un fond sonore ou l'on croit entendre du Wagner.

Tout en feuilletant des magazines, Il découpe des photos de corps de mannequins, de visages, de jambes mais aussi des bijoux et autres pour les coller sur un cahier. Pourquoi fait-il ça ?

Soudain, la musique s'arrête. Il se redresse contre le dossier de la chaise et soupire en murmurant :

- C'est le moment, je suis prêt.

Se levant, il souffle sur la bougie, endosse ces fringues, un pull, un jeans et un blouson de cuir, prend ses gants et casque noir pour finalement claquer la porte et enfourcher sa bécane.

Dans le garage un modèle de Milwaukee. La fameuse Harley Davidson, il s'agit d'un de ces vieux modèles tant convoités par les collectionneurs. Le superbe modèle de 69 mis en scène dans le film Easy Rider.

La porte sectionnelle s'ouvre, les phares s'allument, le bruit et la puissance de la cylindrée se font ressentir comme un désir inabouti entre ses jambes.

Pendant le temps qu'il met à traverser la ville, beaucoup de songes et de questions lui apparaissent ou lui reviennent en tête. Il repense à son enfance heureuse, dans une famille moyenne.

- Pourquoi faire ça ? Pourquoi ?

Sa visière noire ne laisse rien entre voir de ces yeux. Il s'arrête devant la Tour Trump ou une soirée est organisée suite au défilé de ce créateur que tout le monde connaît.

Gens de la haute société, politique et sportif, tapis rouge, tenue de soirée élégante, queue-de-pie et redingote sont de mise, toast, mignardises, maître d'hôtel et serveurs, pyramide de champagne et de petits fours, le créateur, ses stylistes, ses mannequins, journalistes et photographes, quelque 750 personnes ont répondu favorablement à l'invitation...

La musique et la fête bat son plein.

Les célébrités rient, discutent, s'amusent, boivent et mangent.

Ayant vu le parterre d'invité, il décide de faire le tour. Il gare sa moto plus loin, passe discrètement par-derrière et endosse discrètement à l'abri des regards une tenue de serveur. Costume noir, chemise blanche et nœud papillon.

Dans sa tête, une voix triste chuchote :

-Non, non, non, arrête-toi s'il te plaît, non.

-Tais-toi ! Lui répond-il sereinement

Il prend un plateau de coupe et rentre contempler son arène. Il n'y voit que des proies potentielles, ce qui ne manque pas d'augmenter son désir et d'aiguiser son attention.

Intérieurement pourtant, il se dit :

-Non arrête je t'en supplie !

Prenant garde de ne pas se faire remarquer, il sert les convives, évite les autres serveurs et se fraie un chemin parmi l'assistance au gré de ses envies le regard bas.

Son calme et sa sérénité le caractérisent, il sait très bien ce qu'il fait.

Parmi toutes ces femmes, ces mannequins, une seule retient son attention. Elle est belle, 1.78m talon aiguille noir à la semelle rouge, d'origine latino, la peau dorée. De longs cheveux noirs ondulés parcourent l'intégralité de son dos. Sa robe moulante pourpre au-dessus du genou laisse deviner des formes généreuses et sublime. Beaucoup d'hommes sont autour d'elle, une coupe de Moêt à la main elle se fait courtiser par la bourgeoisie.